Les températures fraîches commencent lentement à s'installer partout en province. Après un été ayant offert des chaleurs parfois étouffantes et une humidité difficile à supporter à tous ces courageux coureurs qui s'entraînaient pour améliorer leur bonne forme physique, voici enfin le moment tant attendu qui se pointe à l'horizon. L'automne est en effet la saison des courses d'endurance. Il n'y a qu'à jeter un coup d'œil aux calendriers de courses à pied de différents sites spécialisés nord-américains pour s'en convaincre.

Le Québec ne fait pas exception avec plusieurs épreuves de plus de 21 kilomètres au programme. Les marathons demeurent les courses les plus prestigieuses de toutes. Outre le populaire Marathon de Montréal (25 septembre), des courses de 42,2 kilomètres sont également à l'horaire à St-George de Beauce (1er octobre), Rimouski (2 octobre), Chicoutimi (8 octobre), Bécancour (9 octobre), Rivière-Rouge (9 octobre), Chambly (16 octobre) et Magog (30 octobre). À cela, ajoutez de nombreux autres marathons organisés à proximité, soit en Ontario, dans les maritimes ou en Nouvelle-Angleterre.

Cela représente donc des dizaines de milliers de coureurs qui prendront d'assaut les différents parcours plus haut mentionnés pour tenter de franchir la distance selon un critère de temps qui leur et propre. De ce nombre, plusieurs ressentent déjà une petite nervosité puisqu'il s'agira de leur tout premier marathon.

S'il y a une chose que j'ai apprise lors de mon premier marathon, c'est qu'il faut le vivre pour comprendre ce que ça représente en terme de complexité et de gestion. Personnellement, je m'y étais préparé du mieux possible en suivant à la lettre un plan d'entraînement spécialement conçu pour moi et en lisant un nombre incalculable de revues et livres variés traitant aussi bien de l'alimentation que du repos ou de la stratégie. Il y a ceux qui ne se préparent pas assez pour une course et ceux qui le sont trop. J'appartenais probablement à ce dernier groupe!

C'est donc aux petits nouveaux que je m'adresse dans cette chronique. À ceux qui s'apprêtent à rejoindre le club des marathoniens. Voici certaines observations que je retiens de ma toute première course de 42,2 kilomètres.

42,2 kilomètres, c'est long!

Il faut d'abord savoir que le stress et sa gestion peuvent peut jouer un rôle important dans la réussite ou non de vote premier marathon. Vous serez à même de constater à quel point le sommeil risque d'être difficile à trouver lors de la nuit précédant votre départ. C'est normal. Au matin, toute la logistique entourant votre déplacement vers le départ peut également entraîner une certaine nervosité. Vous verrez que vous êtes bien loin de votre entraînement en solitaire ou en petit groupe. Pas de panique, toute cette fébrilité est bonne pour vous. Ouvrez grand les yeux et puisez dans l'incroyable énergie qui se dégage d'une foule composée de coureurs motivés et excités.  Vivez le moment et commencez à garnir votre banque de souvenirs. Si vous avez bien fait vos devoirs, j'entends pas là votre entraînement, votre étude du parcours ou la vérification des points de ravitaillements, vous devriez déjà être rassurés!

Le départ est le moment de la course que je déteste le plus et cela uniquement parce que le risque de chutes est important. Il n'est pas rare de se faire bousculer. Tous les coureurs, même s'ils sont classés dans des enclos de départ selon un chrono estimé, ne vont pas au même rythme. Il faut zigzaguer et louvoyer pour se faire de l'espace pendant quelques kilomètres. Je vous conseille de vous tenir sur les côtés du peloton de course plutôt que de risquer d'être coincé en plein centre. Concentrez-vous sur votre rythme et ne vous fiez surtout pas sur tous les coureurs qui vous dépassent. Il est facile et dangereux de vous laisser entraîner à un rythme trop rapide. Cela pourrait hypothéquer sérieusement votre fin de course. De toute façon, vous rattraperez un bon nombre de ces coureurs intrépides plus tard dans l'épreuve. C'est sûrement ce que voulait dire Jean de La Fontaine: ne courez pas trop vite, mais partez à point!

Course à pied à Percé.Les dix premiers kilomètres doivent être agréables et faciles. Vous êtes une machine de course! Vous ne devriez surtout pas être à bout de souffle. Au dixième kilomètre, près du quart de votre marathon, jetez un coup d'œil à votre chrono et ajustez le rythme au besoin. Si vous êtes plus rapide que votre stratégie initiale, je vous conseille fortement de ralentir. Vous risquez d'en payer le prix plus tard en frappant le fameux mur du coureur.

Les kilomètres 10 à 20 sont habituellement une des périodes les plus calmes de la course. Votre rythme est constant et vos foulées bien cadencées ce qui fait que vous vous retrouvez à courir aux côtés des mêmes participants sur de longues distances. Pourtant, résistez à la tentation de les suivre. Vous devez obligatoirement respecter votre vitesse de course calculée et pratiquée  à l'entraînement.

Le 21e kilomètre peut être un piège. Il représente la mi-parcours. Vous le parcourez encore plein d'énergie ou bien assailli par un léger doute sur votre forme. Même si la fatigue s'installe, que les jambes et les bras deviennent lourds, vous ne devez surtout pas bouder les tables de ravitaillements. Si vous aviez prévu d'utiliser des gels énergétiques, il est primordial de le faire. Restez fort mentalement. Plutôt que de penser aux nombreux kilomètres qu'il vous reste à franchir, dites-vous que vous en avez déjà la moitié de fait.

Les kilomètres 20 à 30 sont ceux de l'endurance. C'est ici que vous devez songer à des choses positives pour vous motiver. Personnellement, je pensais à ma famille et aux sourires qu'ils afficheraient certainement lorsque je franchirais l'arrivée encore lointaine. Si vous êtes fatigué, il n'est pas déshonorant de marcher un peu. Profitez-en pour vous parler et vous convaincre que vous êtes capable. À ce stade, surtout vers le trentième kilomètre, fiez-vous davantage à vos sensations qu'à votre chrono. L'important est que vous terminiez ce premier marathon.

La plupart des coureurs ayant frappé un mur lors d'un marathon l'ont fait entre les 32e et 35e kilomètres. On pénètre alors pour la première fois  dans une zone jamais abordée à l'entraînement. C'est souvent ici, mes chers amis, que le marathon commence. Toutes vos heures d'entraînement, vos kilomètres parcourus, vos étirements et vos lectures des récents mois vous serviront à franchir les derniers kilomètres. C'est maintenant que ça va se jouer. Alors que tout votre corps vous implore d'arrêter, votre cerveau doit impérativement continuer de lui ordonner le contraire. N'allez surtout pas abandonner, une décision que vous pourriez regretter longtemps par la suite. Dites-vous que la souffrance est temporaire, mais que le triomphe est éternel. Tous les coureurs qui vous entourent souffrent également. Qui a dit que c'était facile de courir un marathon?

Les cinq derniers kilomètres peuvent vraiment être pénibles et souffrants. Votre réservoir d'énergie est presque à vide, les crampes s'installent et vous broyez des idées noires. « Qu'est-ce que je fais ici? On ne m'y reprendra plus! » Pourtant, vous ne vous êtes pas rendu aussi loin pour lâcher! Tout en vous assurant de ne pas mettre en danger votre santé physique, concentrez-vous sur chacun de vos pas. Réduisez votre foulée pour éviter les crampes. Découpez ces cinq derniers kilomètres en autant d'étapes à franchir une à la fois. Mais surtout, galvanisez-vous des cris et de la musique que vous commencez à entendre au loin. C'est la foule, vos amis, votre famille qui vous attendent au fil d'arrivée. C'est surtout votre victoire qui est à portée de main... ou de pied!

La voici enfin cette fameuse ligne d'arrivée. Vous devez comprendre que c'est un moment unique puisque c'est la seule fois de votre vie que vous terminerez votre premier marathon. Alors, vivez-le! Des photographes sont là pour immortaliser les derniers mètres de votre course. Retirez votre casquette et vos lunettes et puisez dans les quelques gouttes d'énergie qu'il vous reste pour afficher votre plus beau sourire. C'est le moment de bien paraître sur la photo qui ornera un de vos murs et qui sera admirée avec respect par tant de gens!

Après avoir reçu votre médaille, pleuré, vacillé, éclaté de rire, serré dans vos bras de parfaits inconnus ou des membres de votre famille, continuez de marcher un peu avec cette fameuse médaille au cou pour reprendre votre souffle. Regardez là bien et sentez son poids. C'est celui de votre effort.

Vous voilà un marathonien. Bienvenue dans le club!