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Caitlin Clark : une tempête parfaite pour le sport féminin

Caitlin Clark Caitlin Clark - Getty, RDS
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Ce printemps, le March Madness de la NCAA se conjugue au féminin et la bougie d'allumage de cette petite révolution peut désormais se targuer d'être la plus prolifique marqueuse de toute l'histoire du basketball universitaire américain, hommes et femmes confondus.

La montée de Caitlin Clark, la grande vedette de l'Université de l'IOWA, est phénoménale depuis environ 18 mois.

À 22 ans, elle est au centre de l'attention médiatique depuis la finale chaudement disputée de la saison dernière contre LSU. À ce moment, on savait déjà qu'elle avait de grands records à sa portée et, depuis, les matchs des Hawkeyes sont devenus des incontournables. À un point tel que les amateurs s'arrachent les billets sur le marché de la revente, un phénomène sans précédent dans le monde des sports féminins.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Qu'est-ce qui explique cette montée? Comment une joueuse, au milieu de l'Iowa, a réussi à se frayer un chemin dans l'imaginaire collectif jusqu'à atteindre des comparaisons avec les plus grands joueurs de l'histoire?

C'est une réalité qui dépasse ses performances incroyables sur le terrain.

Clark face à l'histoire

Dès ses années formatrices à l'école secondaire, le talent de Caitlin Clark s'est imposée au point de faire d'elle une joueuse très convoitée par la NCAA. Alors qu'on la croyait en route pour Notre Dame, l'originaire de Des Moines est restée proche de la maison en acceptant l'offre des Hawkeyes.

Partante dès ses premiers dribles dans la NCAA, Clark a débuté en novembre 2020 avec un match de 27 points, 8 rebonds et 4 passes. À l'époque, on se doutait qu'une grande carrière l'attendait, mais probablement pas avec cette ampleur.

Après tout, devant des gradins vides en raison de la pandémie mondiale de COVID-19, c'était difficile de se projeter dans un futur où elle deviendrait la porte-parole la plus en vue de Nike et Gatorade avant son départ vers la WNBA à la conclusion du March Madness.

Un peu moins de quatre ans plus tard, grâce aux règlements modifiés de la NCAA permettant aux athlètes de recevoir des compensations monétaires de la part de partenaires externes durant leur passage à l'Université, Clark a une petite fortune à son nom et toute la pression du monde sur ses épaules avec le regard soutenu de la planète sport.

Ce n'est pas banal que le tournoi féminin de la NCAA, cette année, a des billets en revente plus chers que ceux de l'équivalent masculin. Même chose au niveau de la visibilité et des cotes d'écoute. Avec la popularité de Clark et d'autres joueuses comme Angel Reese et Paige Bueckers, il n'est plus rare de voir les résultats du tournoi féminin au centre de la page d'accueil d'ESPN, par exemple. Même RDS, réactif selon l'actualité, a fait des pieds et des mains afin de diffuser les matchs féminins ce printemps.

Non seulement ça, mais le basketball féminin de la NCAA enregistre ses meilleures cote d'écoute à la télé depuis l'électrisante finale de l'année dernière entre Iowa et LSU. Pas étonnant, dans la foulée, que la WNBA se prépare à renégocier ses droits télévisuels au plus offrant en se dissociant de la NBA afin de voler de ses propres ailes et recevoir une offre à la hauteur de l'engouement entourant Clark qui sera le premier choix du Fever de l'Indiana lors du prochain repêchage. Sa rivale, Angel Reese, la suivra sans doute au deuxième rang de ce même repêchage.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Une situation parfaite pour les sports féminins

Les exploits de Caitlin Clark et tous les records qu'elle améliore depuis le début de l'année s'invitent dans un climat de changement dans le monde médiatique, si bien qu'elle devient, par la force des choses, le bélier pour enfoncer des portes entre-ouvertes devant l'intérêt grandissant envers les sports féminins.

Chez nous, par exemple, ça se témoigne par la vente quasi instantanée des billets pour le match de la LPHF qui sera présenté au Centre Bell en avril.

Aux États-Unis, on remarque une tendance à la hausse envers les sports féminins. Un match de volleyball de la NCAA, par exemple, a été présenté devant un stade de football plein à craquer. À la télévision, les cotes d'écoute explosent et la couverture du côté d'ESPN, par exemple, ne fait qu'augmenter au rythme des succès féminins.

Même son de cloche au soccer alors que la NWSL prend de l'ampleur à une cadence très rapide à quelques années de la présentation de la Coupe du monde en Amérique.

Les sports féminins ne sont pas récents, loin du compte, mais les succès n'étaient pas toujours au rendez-vous. Marginalisées, les ligues féminines étaient victimes des idées préconçues et, dans trop de cas, de gestions défaillantes.

C'était difficile à déconstruire et le tout s'est fait une brique à la fois, une équipe à la fois, une ligue à la fois et un investissement à la fois.

Combien d'équipes féminines professionnelles de hockey ont joué à Montréal avant la naissance de la LPHF ? C'est pratiquement une question piège en raison du nombre surprenant. La question se pose aussi au niveau des ligues de soccer féminines aux États-Unis, par exemple.

La tempête parfaite, en ce moment, c'est la combinaison des succès sur les terrains, de la réception de l'auditoire et de l'impact indéniable des médias sociaux et d'une génération plus jeune sur le panorama sportif.

Revenons dans la NCAA, où Caitlin Clark a cultivé sa légende, et comparons les athlètes entre eux.

Bronny James, avec 7,5 millions d'abonnés sur Instagram, est l'athlète le plus populaire des réseaux universitaires sur les plateformes sociales. Par contre, Bronny est le fils du célèbre LeBron James. Il est sous les projecteurs depuis sa naissance et sa popularité précède ses performances sur le terrain. Il a joué une saison plutôt ordinaire avec USC et il pourrait ne pas faire le saut dans la NBA en raison d'un manque d'intérêt de la part des équipes et d'un transfert attendu vers une autre école.

Après Bronny, c'est un autre « fils de » qui s'impose au niveau des sports masculins : Shedeur Sanders.

Le fils de Deion Sanders, qui a fait un coup de génie en devenant la tête du programme de football de l'Université du Colorado, est considéré comme un bon espoir pour la NFL et il n'était pas réellement sous la loupe avant son éclosion sur le terrain. Il compte 1,8 million d'abonnés sur Instagram et c'est avec lui que la comparaison devient très intéressante.

Clark, par exemple, qui n'est pas très active sur les plateformes sociales, compte 1,3 million d'abonnés au moment d'écrire ces lignes. Le chiffre gonfle au quotidien depuis quelques semaines et à l'aube de sa deuxième participation consécutive au Final Four de la NCAA, elle pourrait dépasser Sanders avant le repêchage de la WNBA.

Sinon, Angel Reese, la vedette de LSU et la grande rivale de Clark, compte 2,7 millions d'abonnés depuis son triomphe en 2023 et son attitude défiante sur le terrain qui a fait le tour du web. Sa coéquipière, Flau'jae Johnson, compte 1,7 million d'abonnés.

On parle ici des joueuses les plus populaires du circuit avec un rayonnement similaire, ou même largement supérieur, aux vedettes masculines. Caleb Williams, qui sera le premier choix du prochain repêchage de la NFL à moins d'une surprise, compte moins de 400 000 abonnés sur Instagram.

Avec la possibilité de recevoir des partenariats commerciaux, même sur les bancs d'écoles, ce que la NCAA interdisait il n'y a pas si longtemps, les joueuses sont désormais des petites PME individuelles et c'est pourquoi le rayonnement social n'est pas banal.

Olivia Dunne, la gymnaste, rassemble plus de 5 millions d'abonnés sur son compte Instagram. C'est un poids démographique qui force les grandes marques à se plier aux exigences de ces athlètes émergentes … et non l'inverse.

Dans ce nouveau climat où la popularité des athlètes donne une visibilité indéniable à un auditoire plus jeune, la balance est de plus en plus égalitaire. Ainsi, les sports féminins ne sont plus condamnés aux disciplines individuelles comme le tennis, par exemple.

En plus des médias sociaux, les jeux vidéo ont aussi emboité le pas depuis quelques années. EA Sports, notamment, inclus des joueuses dans ses séries NHL et EA Sports FC (anciennement FIFA). Alexia Putellas, vedette du FC Barcelone féminin, compte désormais plus de 3,3 millions d'abonnés. Évidemment, ce n'est pas la seule raison, elle a remporté deux Ballon d'or consécutifs en 2021 et 2022, mais c'est une vitrine qui rejoint l'auditoire de demain qui fera pencher la balance auprès des diffuseurs.

Cet effet domino, c'est le fruit de plusieurs décennies d'efforts afin d'offrir des opportunités égales dans différents contextes.

Prochaine étape : la WNBA

Caitlin Clark a annoncé, avant même le début du March Madness, qu'elle ferait le saut dans la WNBA dès l'an prochain même si elle avait toujours une année d'éligibilité dans la NCAA.

Elle n'a plus rien à prouver dans les rangs universitaires et elle est déjà une marque globale. Parlez-en à Gatorade, Nike, State Farms et Goldman Sachs pour ne nommer que ces commanditaires associés à ses incroyables performances.

Quand son nom sera annoncé par le Fever de l'Indiana le 15 avril, ce sera le début d'une nouvelle ère pour la WNBA qui recevra une vague de joueuses populaires de la NCAA comme jamais auparavant.

La ligue compte douze équipes pour le moment, un sommet depuis sa création en 1996. C'est quatre de plus qu'à l'époque et une treizième équipe, à Golden State, verra le jour dans un futur rapproché.

La WNBA est en pleine explosion depuis quelques années et plusieurs célébrités ont emboité le pas avec des investissements. Tom Brady, tout récemment, s'est joint au groupe de propriétaires des Aces de Las Vegas. Dwyane Wade, de son côté, a investi auprès de l'équipe de Chicago avec Michelle Williams et Magic Johnson est associé avec les Spakrs de Los Angeles depuis longtemps.

Les investisseurs sentent la montée et placent leur pion avant l'explosion du prix des équipes et, possiblement, une augmentation du nombre d'équipe.

La venue de Caitlin Clark dès l'an prochain marquera le début de la nouvelle génération pour la WNBA et elle bousculera la place au soleil des vedettes établies du circuit. Une dynamique fort intéressante pour la croissance du circuit, un peu à l'image de la LNH quand Sidney Crosby et Alexander Ovechkin ont fait leur entrée dans la ligue.

Il sera intéressant de surveiller les prochaines années de la WNBA, parce qu'on pourrait tracer les paramètres pour la croissance de la LPHF, par exemple, qui recevra elle aussi un jour de nouvelles jeunes joueuses issues de la génération inspirée par la montée des sports féminins.

Tout est dans tout, pour créer la relève, il faut cultiver la culture d'aujourd'hui et pour ce faire, il faut investir maintenant au lieu de se ranger derrière des succès quantifiables.

Nous arrivons à l'étape où les investissements dans le sport féminin portent leurs fruits. Caitlin Clark, au sommet de sa gloire, sera la Rosie la riveteuse de cette grande explosion quand la poussière retombera dans quelques années.

Assurément un spectacle qu'on ne voudra pas manquer.