Enfin de la fraîcheur
Hockey mercredi, 2 mai 2012. 18:12 lundi, 23 déc. 2024. 07:38
C'était le 29 janvier dernier. L'antichambre avait demandé au docteur Sylvain Guimond, un spécialiste de la psychologie sportive depuis plus de 20 ans, de réaliser une entrevue-portrait avec Marc Bergevin, un Montréalais qui s'était hissé au rang de directeur général adjoint chez les Blackhawks de Chicago.
Cette entrevue se prêtait bien à des confidences puisqu'ils sont des amis. C'était deux mois exactement avant le congédiement de Pierre Gauthier, mais déjà, les rumeurs de son départ se faisaient persistantes.
Mi-blagueur, mi-sérieux, Guimond avait eu cette question pour Bergevin. «Est-ce que tu dirais oui à un poste de directeur général à Montréal éventuellement?»
Bergevin s'était esclaffé. En cherchant une façon habile de répondre, il n'en finissait plus de rire. «Il va couler beaucoup d'eau sous le pont Champlain avant que cela se produise», avait-il dit, finalement.
C'était assez évident qu'il n'y croyait pas. Premièrement, le poste n'était pas libre. Quand il allait le devenir, il se disait sans doute que la liste des candidats serait très longue. Dans les circonstances, pourquoi penserait-on à lui, un gars qui a quitté le Québec il y a 28 ans?
Faut dire que Bergevin, qui est né et qui a grandi à Pointe-Saint-Charles, le plus vieux quartier de Montréal après le Vieux-Port, a toujours considéré le Canadien comme une organisation plus grande que nature. C'était son équipe. Il a porté les couleurs de huit formations dans la Ligue nationale, dont Chicago, Pittsburgh, Detroit et Vancouver. Il aurait été emballé de pouvoir endosser le chandail du Canadien. Toutefois, malgré une belle carrière professionnelle qui s'est échelonnée sur 20 ans, il ne s'est jamais cru assez talentueux pour patiner au Forum ou au Centre Bell. Il y a souvent pensé sans y croire.
«J'ai toujours pensé que je n'étais pas assez bon pour jouer à Montréal. Il faut être très bon pour évoluer avec le Canadien», disait-il.
Il aura une méchante surprise en faisant l'évaluation de sa nouvelle équipe. Quand il découvrira que les troisième et quatrième trios sont composés de joueurs de la Ligue américaine, il va vite constater que le Canadien, cuvée 2012, ressemble très peu à ce qu'il a déjà connu.
On dit qu'il est habile à évaluer le talent. Il n'a pas son pareil, semble-t-il. S'il faut être un bon joueur pour évoluer avec le Canadien, sa responsabilité sera maintenant d'en dénicher des bons.
On sait qu'il est très drôle. C'est un pince-sans-rire qui fait crouler son entourage par ses blagues et ses mimiques répétées. On en a eu la preuve durant son premier point de presse. Cependant, quand on insiste trop là-dessus, il corrige rapidement le tir. Il se dit sérieux au travail. Il est un homme responsable.
«Toute ma carrière, je suis passé sous le radar, explique-t-il. J'ai été un bon coéquipier. J'ai pris mes responsabilités à coeur. J'ai compris mon rôle et je l'ai accompli du mieux que je l'ai pu.»
Sa réputation de comique et de coéquipier capable de dérider un vestiaire l'a déjà bien servi. Au lendemain de l'attaque sauvage de Todd Bertuzzi sur Steve Moore, le directeur général des Canucks à l'époque, Brian Burke, est allé le chercher à Pittsburgh par le biais d'une transaction. Il y avait beaucoup de tension autour de l'équipe. Burke lui avait clairement indiqué qu'il avait fait son acquisition dans le but d'alléger l'ambiance dans le vestiaire, lui qui était en fin de carrière.
Mais le nouveau patron du Canadien est aussi un émotif. Il a failli craquer dans cette première apparition médiatique quand on lui a simplement demandé d'exprimer ce qu'il ressentait. Dans le cadre de son entrevue avec Sylvain Guimond, il a d'ailleurs éclaté en sanglots en rappelant tout ce que ses parents, aujourd'hui décédés, avaient fait pour lui quand il a donné ses premiers coups de patins dans le hockey. Comme Québécois, ses parents et lui étaient fiers de voir le Canadien empiler des coupes Stanley. Toutefois, malgré les défilés répétés dans les rues de Montréal, maman et papa n'avaient jamais vu la coupe de près.
Il y a deux ans, quand Bergevin l'a gagnée à titre de directeur du personnel des joueurs chez les Blackhawks, il a regroupé des membres de la famille avec la coupe Stanley au cimetière, près de la pierre tombale de ses parents. «C'était très important que je le fasse. Tu m'aurais donné une seule heure avec la coupe et c'est ce que j'aurais fait«, a-t-il admis.
Prochaine étape: l'entraîneur
Que peut-il apporter au Canadien? Certainement une personnalité comme on n'en a peu vues à cette enseigne au cours des dernières années. Un bagage d'expérience et de connaissances impressionnant, un flair pour le talent, une capacité de travailler en équipe, etc.
On a souvent dit ces derniers temps que le temps pressait pour identifier le successeur de Gauthier. Le repêchage s'en vient. Il y a des contrats à signer, des décisions importantes à prendre.
Compte tenu de ce que Bergevin est en mesure d'apporter, le Canadien est loin d'être en retard dans ses échéanciers. Il connaît parfaitement l'évaluation des espoirs faite par les Blackhawks au cours des derniers mois. Il n'avait nullement besoin de partir avec la liste de leurs recruteurs puisqu'il a déjà une bonne idée de leurs intentions. Un observateur attentif de la ligue, il connaît sans doute l'identité des joueurs qui seront les plus convoités le premier juillet.
Même s'il n'a jamais occupé cette fonction, il a déjà une profonde connaissance des responsabilités qui l'attendent après avoir été le bras droit de Stan Bowman et après avoir observé de près son père Scotty durant son bref séjour avec les Hawks. Difficile de profiter d'une meilleure école.
Il s'est excusé de ne pas pouvoir répondre à la majorité des questions qui lui ont été adressées puisqu'il s'agissait du jour 1 de son mandat. Ce qui ne l'a pas empêché de prendre sa première décision quand il a donné un coup de fil matinal à Randy Cunneyworth pour lui dire qu'il n'était plus l'entraîneur. Un geste habile de sa part qui lui a évité de répondre à quelques questions corsées au sujet de celui qui dirigera l'équipe la saison prochaine.
Il a aussi été très clair sur un point. Dans la mesure du possible, le Canadien n'échappera plus jamais des Québécois issus de la Ligue junior majeur du Québec. Le Canadien compte un recruteur au Québec. Avant longtemps, Serge Boisvert ne sera plus le seul à observer toutes les équipes de la ligue. Il l'a dit d'une façon énergique.
Autre point sur lequel il n'a pas patiné. Il n'a pas dit s'il échangerait son premier (3e) choix de repêchage, mais il n'a pas dit non plus qu'il ne l'échangerait pas. Il veut gagner le plus rapidement possible. Toutes les avenues seront étudiées pour y arriver.
Sa priorité sera probablement la nomination du prochain entraîneur. Son profil d'entraîneur est Joel Quenneville qui l'a dirigé durant quelques saisons. Pas exactement le type de personnalité qui se rapproche de Patrick Roy.
Toutefois, c'est en parlant qu'on se découvre des affinités. Geoff Molson ignorait tout de Bergevin avant de faire sa connaissance. D'une rencontre à l'autre, le grand patron a été impressionné de ce qu'il avait à raconter et à proposer.
Ça pourrait se produire aussi quand Bergevin prendra le temps de s'asseoir avec Roy. Il est le premier à dire qu'il a carburé à la passion durant toute sa carrière. C'est la passion qui a fait de lui ce qu'il est devenu dans le hockey.
Avec Roy, il ira à la rencontre de la passion à l'état pur. Peut-être qu'ils se reconnaîtront au premier regard.
Cette entrevue se prêtait bien à des confidences puisqu'ils sont des amis. C'était deux mois exactement avant le congédiement de Pierre Gauthier, mais déjà, les rumeurs de son départ se faisaient persistantes.
Mi-blagueur, mi-sérieux, Guimond avait eu cette question pour Bergevin. «Est-ce que tu dirais oui à un poste de directeur général à Montréal éventuellement?»
Bergevin s'était esclaffé. En cherchant une façon habile de répondre, il n'en finissait plus de rire. «Il va couler beaucoup d'eau sous le pont Champlain avant que cela se produise», avait-il dit, finalement.
C'était assez évident qu'il n'y croyait pas. Premièrement, le poste n'était pas libre. Quand il allait le devenir, il se disait sans doute que la liste des candidats serait très longue. Dans les circonstances, pourquoi penserait-on à lui, un gars qui a quitté le Québec il y a 28 ans?
Faut dire que Bergevin, qui est né et qui a grandi à Pointe-Saint-Charles, le plus vieux quartier de Montréal après le Vieux-Port, a toujours considéré le Canadien comme une organisation plus grande que nature. C'était son équipe. Il a porté les couleurs de huit formations dans la Ligue nationale, dont Chicago, Pittsburgh, Detroit et Vancouver. Il aurait été emballé de pouvoir endosser le chandail du Canadien. Toutefois, malgré une belle carrière professionnelle qui s'est échelonnée sur 20 ans, il ne s'est jamais cru assez talentueux pour patiner au Forum ou au Centre Bell. Il y a souvent pensé sans y croire.
«J'ai toujours pensé que je n'étais pas assez bon pour jouer à Montréal. Il faut être très bon pour évoluer avec le Canadien», disait-il.
Il aura une méchante surprise en faisant l'évaluation de sa nouvelle équipe. Quand il découvrira que les troisième et quatrième trios sont composés de joueurs de la Ligue américaine, il va vite constater que le Canadien, cuvée 2012, ressemble très peu à ce qu'il a déjà connu.
On dit qu'il est habile à évaluer le talent. Il n'a pas son pareil, semble-t-il. S'il faut être un bon joueur pour évoluer avec le Canadien, sa responsabilité sera maintenant d'en dénicher des bons.
On sait qu'il est très drôle. C'est un pince-sans-rire qui fait crouler son entourage par ses blagues et ses mimiques répétées. On en a eu la preuve durant son premier point de presse. Cependant, quand on insiste trop là-dessus, il corrige rapidement le tir. Il se dit sérieux au travail. Il est un homme responsable.
«Toute ma carrière, je suis passé sous le radar, explique-t-il. J'ai été un bon coéquipier. J'ai pris mes responsabilités à coeur. J'ai compris mon rôle et je l'ai accompli du mieux que je l'ai pu.»
Sa réputation de comique et de coéquipier capable de dérider un vestiaire l'a déjà bien servi. Au lendemain de l'attaque sauvage de Todd Bertuzzi sur Steve Moore, le directeur général des Canucks à l'époque, Brian Burke, est allé le chercher à Pittsburgh par le biais d'une transaction. Il y avait beaucoup de tension autour de l'équipe. Burke lui avait clairement indiqué qu'il avait fait son acquisition dans le but d'alléger l'ambiance dans le vestiaire, lui qui était en fin de carrière.
Mais le nouveau patron du Canadien est aussi un émotif. Il a failli craquer dans cette première apparition médiatique quand on lui a simplement demandé d'exprimer ce qu'il ressentait. Dans le cadre de son entrevue avec Sylvain Guimond, il a d'ailleurs éclaté en sanglots en rappelant tout ce que ses parents, aujourd'hui décédés, avaient fait pour lui quand il a donné ses premiers coups de patins dans le hockey. Comme Québécois, ses parents et lui étaient fiers de voir le Canadien empiler des coupes Stanley. Toutefois, malgré les défilés répétés dans les rues de Montréal, maman et papa n'avaient jamais vu la coupe de près.
Il y a deux ans, quand Bergevin l'a gagnée à titre de directeur du personnel des joueurs chez les Blackhawks, il a regroupé des membres de la famille avec la coupe Stanley au cimetière, près de la pierre tombale de ses parents. «C'était très important que je le fasse. Tu m'aurais donné une seule heure avec la coupe et c'est ce que j'aurais fait«, a-t-il admis.
Prochaine étape: l'entraîneur
Que peut-il apporter au Canadien? Certainement une personnalité comme on n'en a peu vues à cette enseigne au cours des dernières années. Un bagage d'expérience et de connaissances impressionnant, un flair pour le talent, une capacité de travailler en équipe, etc.
On a souvent dit ces derniers temps que le temps pressait pour identifier le successeur de Gauthier. Le repêchage s'en vient. Il y a des contrats à signer, des décisions importantes à prendre.
Compte tenu de ce que Bergevin est en mesure d'apporter, le Canadien est loin d'être en retard dans ses échéanciers. Il connaît parfaitement l'évaluation des espoirs faite par les Blackhawks au cours des derniers mois. Il n'avait nullement besoin de partir avec la liste de leurs recruteurs puisqu'il a déjà une bonne idée de leurs intentions. Un observateur attentif de la ligue, il connaît sans doute l'identité des joueurs qui seront les plus convoités le premier juillet.
Même s'il n'a jamais occupé cette fonction, il a déjà une profonde connaissance des responsabilités qui l'attendent après avoir été le bras droit de Stan Bowman et après avoir observé de près son père Scotty durant son bref séjour avec les Hawks. Difficile de profiter d'une meilleure école.
Il s'est excusé de ne pas pouvoir répondre à la majorité des questions qui lui ont été adressées puisqu'il s'agissait du jour 1 de son mandat. Ce qui ne l'a pas empêché de prendre sa première décision quand il a donné un coup de fil matinal à Randy Cunneyworth pour lui dire qu'il n'était plus l'entraîneur. Un geste habile de sa part qui lui a évité de répondre à quelques questions corsées au sujet de celui qui dirigera l'équipe la saison prochaine.
Il a aussi été très clair sur un point. Dans la mesure du possible, le Canadien n'échappera plus jamais des Québécois issus de la Ligue junior majeur du Québec. Le Canadien compte un recruteur au Québec. Avant longtemps, Serge Boisvert ne sera plus le seul à observer toutes les équipes de la ligue. Il l'a dit d'une façon énergique.
Autre point sur lequel il n'a pas patiné. Il n'a pas dit s'il échangerait son premier (3e) choix de repêchage, mais il n'a pas dit non plus qu'il ne l'échangerait pas. Il veut gagner le plus rapidement possible. Toutes les avenues seront étudiées pour y arriver.
Sa priorité sera probablement la nomination du prochain entraîneur. Son profil d'entraîneur est Joel Quenneville qui l'a dirigé durant quelques saisons. Pas exactement le type de personnalité qui se rapproche de Patrick Roy.
Toutefois, c'est en parlant qu'on se découvre des affinités. Geoff Molson ignorait tout de Bergevin avant de faire sa connaissance. D'une rencontre à l'autre, le grand patron a été impressionné de ce qu'il avait à raconter et à proposer.
Ça pourrait se produire aussi quand Bergevin prendra le temps de s'asseoir avec Roy. Il est le premier à dire qu'il a carburé à la passion durant toute sa carrière. C'est la passion qui a fait de lui ce qu'il est devenu dans le hockey.
Avec Roy, il ira à la rencontre de la passion à l'état pur. Peut-être qu'ils se reconnaîtront au premier regard.