La scène ne mentait pas. Seul au podium, Jean Pascal a annoncé que Marc Ramsay n’était plus son entraîneur après une association d’une quinzaine d’années. Freddie Roach le remplacera.

Pascal et Ramsay ont gravi les échelons de la boxe amateur et professionnelle de manière spectaculaire. Médaille d’or aux Jeux du Commonwealth en 2002 et participation aux Jeux olympiques d’Athènes en 2004 jusqu’à la conquête de la ceinture des poids mi-lourds du WBC à la suite de sa victoire sur Adrian Diaconu en juin 2009 à Montréal. Bref, les exploits sont réels.

Mais à l’approche d’un deuxième combat contre le champion unifié Sergey Kovalev le 30 janvier au Centre Bell, Ramsay ne marche plus. Pascal n’a pas été particulièrement compétitif pendant le premier affrontement en mars plus tôt cette année et son duel de retour face à Yunieski Gonzalez en juillet à Las Vegas a confirmé que ses meilleurs jours sont clairement derrière lui.

Dans le milieu tissé serré de la boxe montréalaise, un intervenant crédible prétend même que Pascal « n’a tout simplement plus le temps d’être un athlète professionnel à temps plein ». Une autre source confie que le pugiliste lavallois vit dans le déni en croyant en ses chances de battre Kovalev. À l’heure actuelle, Pascal se dirigerait vers un mur et le choc s’annonce assez brutal.

Évidemment, Ramsay ne plantera jamais un couteau dans le dos de l’athlète qui lui a permis de se forger une solide réputation d’entraîneur et de mettre beaucoup de pain sur sa table au cours des dernières années. « Ça fait déjà un petit bout de temps que je savais que Jean se magasinait un autre entraîneur, a-t-il mentionné en entrevue téléphonique au RDS.ca lundi après-midi.

« Je suis un des rares entraîneurs qui n’a pas de contrat avec ses boxeurs. Si l’un d’entre eux n’est pas heureux, il est le bienvenu d’aller voir ailleurs. J’ai déjà énormément de travail dans le gymnase avec mes autres boxeurs - Eleider Alvarez, Artur Beterbiev, Kevin Bizier, David Lemieux et Oscar Rivas notamment - et ma carrière d’entraîneur ne se limite pas à Jean Pascal. »

Ramsay avait d’ailleurs récemment confié qu’il souhaitait quelque peu ralentir la cadence après avoir consacré un nombre incalculable d’heures à sa passion depuis toutes ses années. En lisant entre les lignes, il faut comprendre qu’il n’a plus le temps et l’énergie d’attendre après un boxeur qui demande fondamentalement énormément d’attention. Pascal l’a même confirmé.

« Jean voulait voir quelque chose de nouveau »

« Marc pensait que je n’étais pas à l’entraînement parce que je n’étais pas dans le gymnase physiquement, explique-t-il. Il pensait que j’étais chez moi et que je faisais mes affaires, alors que j’étais à Los Angeles, Philadelphie et Las Vegas. Il se demandait comment je pouvais battre Kovalev si je n’étais pas à l’entraînement. Mais nous sommes encore à trois mois du combat. »

L’ancien champion n’est pas revenu sur le sujet, mais il avait commencé sa quête d’un nouvel entraîneur à Ahuntsic au gymnase de Stéphan Larouche. En gentleman, ce dernier avait immédiatement contacté Ramsay pour lui apprendre la nouvelle, sauf qu’il a rapidement été établi que Larouche ne serait pas le nouvel homme de confiance de Pascal. Un match imparfait.

Au final, le boxeur âgé de 33 ans a jeté son dévolu sur Roach, précisant qu’il avait été séduit par son approche unique des choses, différente de toutes celles qu’il avait connues pendant son magasinage. « Tant mieux », selon une source citée précédemment, qui n’a pas manqué de souligner que Roach a accepté de prendre Pascal sous son aile « uniquement pour l’argent ».

« Sans rien enlever à Marc, Freddie est différent des autres entraîneurs, a précisé Pascal. Il m’a montré des choses que personne ne m’avait apprises avant. J’ai été surpris. Il m’a montré comment me positionner pour lancer certains coups de poing et pour en éviter d’autres.

« J’étais à la recherche d’un entraîneur qui avait déjà été dans les plus hautes sphères de la boxe. Un entraîneur d’expérience, étant donné que je ne suis plus un jeunot. Un entraîneur avec un CV très étoffé. Bref, un entraîneur qui avait déjà entraîné des athlètes de ma carrure. »

Mais quiconque suit le moindrement le monde de la boxe sait que Roach est un homme particulièrement occupé. Sa liste de protégés est prestigieuse et compte notamment Manny Pacquiao et Miguel Cotto. Un peu comme Lucian Bute l’a été pendant son bref passage au sein de l’écurie l’année dernière, Pascal ne risque-t-il pas d’être l’un parmi tant d’autres?

« Je ne me considère pas comme un athlète de plan B. Dans ma tête - du moins -, je suis au même niveau que Cotto et des meilleurs boxeurs au monde, a répondu Pascal. Freddie va avoir du temps pour moi. C’est un entraîneur avec beaucoup de fierté et il ne voudra certainement pas ternir sa fiche à cause de moi. Je suis convaincu qu’il va m’entraîner de façon adéquate. »

Qui plus est, Roach serait convaincu que Pascal possède les outils pour venger la défaite qu’il a subie contre Kovalev. « Il a trouvé le combat excitant, mais il a noté de petites erreurs qui m’ont coûté la victoire, a relaté le boxeur lavallois. Je suis en train de corriger ces petits détails qui feront la différence. J’apprends vite et je vais être en mesure d’assimiler toutes les notions. »

Ainsi, Pascal prendra le chemin de Big Bear Lake en Californie au cours des prochaines semaines pour la première portion de son camp d’entraînement avant de le compléter au Wild Card Gym de Roach situé à Los Angeles. Entre-temps, il gardera la forme en s’entraînant à Montréal.

Les camps à l’extérieur sont aussi l’un des points qui ont incité Ramsay à prendre ses distances. L’entraîneur ne souhaite plus de déplacer loin de sa famille et de ses autres boxeurs pendant une longue période de temps, alors que Pascal n’a plus le choix de s’exiler pour se discipliner.

Un peu comme cela avait été le cas lors de l’annonce de son entente avec InterBox, Pascal sauve les apparences afin de maintenir un peu l’intérêt. La même source soutient qu’un destin de faire valoir l’attend inévitablement après son combat contre Kovalev, puisqu’il n’aura plus de valeur.