Tyson/Paul : une notoriété monstre qui pourrait influencer la suite
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C'est ce soir au AT&T Stadium à Arlington, au Texas, que « Iron » Mike Tyson (50-6, 44 K.-O.) va remonter sur le ring pour croiser les gants avec Jake « The Problem Child » Paul (10-1, 7 K.-O.).
L'événement a été précédé d'une promotion et d'un plan de marketing exhaustif partout sur les médias sociaux et sur la plateforme numérique de Netflix qui est la plus importante en son genre avec ses 282 millions d'abonnés dans le monde, dont 67 millions aux États-Unis seulement.
Par comparaison, Amazon Prime a 230 millions d'abonnés, ESPN 25 millions et DAZN 20 millions.
Si Netflix décidait d'investir en boxe ce serait une nouvelle phénoménale pour toute l'industrie. Il est possible que le géant de la distribution numérique utilise cet événement comme baromètre. Durant la promotion, nous avons vu des publications croisées avec Top Rank qui justement se cherche un nouveau distributeur étant donné l'échéance de son entente avec ESPN l'été prochain.
Ainsi la promotion autour de l'affrontement Tyson/Paul a généré une notoriété monstre, qui dépasse totalement des cadres de la boxe professionnelle. On a deux célébrités populaires, l'une comme influenceur dans les réseaux sociaux et l'autre pour son aura d'intimidateur par excellence dans l'histoire de la boxe durant ses meilleures années sur le ring.
Pour en mesurer l'impact, en mai dernier on a eu le combat le plus significatif en 25 ans chez les lourds en boxe professionnelle alors qu'Oleksandr Usyk unifiait les quatre ceintures contre Tyson Fury, en Arabie saoudite. En amont de ce grand combat, je n'ai pas été sollicité une seule fois pour exprimer mon opinion sur le sujet. Pour Tyson/Paul j'ai été sollicité de partout à de nombreuses reprises.
Vingt années ont passé depuis la dernière présence significative de Tyson sur le ring. On a oublié, et pour les plus jeunes on a même jamais vu, ses trois défaites par K.-O. à ses quatre derniers combats, dont son dernier en 2005 contre un faire-valoir, un Irlandais Kevin McBride. Ça fait maintenant presque 30 ans de l'époque où Tyson faisait trembler ses adversaires.
Malgré tous on reste fasciné par ce grand athlète qui a été le plus jeune champion du monde des lourds à 21 ans seulement en 1986 et qui a été dominant pendant 10 ans jusqu'en 1996. Durant cette période il était « The Baddest Man on Earth ». Il a été intronisé au International Boxing Hall of Fame à sa première année d'admissibilité en 2011. Il est, à ne pas en douter, une véritable légende vivante.
Depuis 2020, Jake Paul a voulu s'improviser boxeur. Au début il semblait se prendre moins au sérieux avec des victoires contre d'autres célébrités qui touchaient à la boxe pour la première fois comme le YouTubeur Ali Eson Gib, l'ex-vedette de Knicks de New York Nate Robinson, le retraité des arts martiaux mixtes Ben Askren et autres du même type.
Sa présence dans le pugilat a fasciné ses fans, de plus en plus nombreux au fur et à mesure que le discours de Paul a changé, qu'il s'est considéré lui-même comme un aspirant légitime et a même osé défier Canelo Alvarez.
La vérité est que Jake Paul, malgré des qualités athlétiques indubitables, ne sera jamais ce qu'il prétend être comme boxeur, mais il possède un charisme certain et est le meilleur vendeur de toute l'industrie après Canelo Alvarez. Cependant le Mexicain remplit les stades par de solides combats contre des aspirants légitimes et Paul réussit tout autant, mais par des spectacles de boxe, de là la grande nuance.
Ce soir il y aura 70 000 spectateurs à l'intérieur du domicile des Cowboys et probablement plusieurs millions sur Netflix pour une exhibition entre deux grandes vedettes qui vont empocher semble-t-il 40 millions $ pour l'influenceur et 20 millions $ pour l'ex-terreur du ring.
J'ai regardé la première des trois parties du documentaire sur Netflix et je me suis arrêté là, j'en ai perdu l'intérêt. J'ai observé la dernière conférence de presse où Jake Paul n'a cessé de défendre sa légitimité et où Tyson semblait s'ennuyer à mourir et répondait aux questions en demi-syllabes.
En revanche il y avait beaucoup de monde, incluant des représentants des médias de partout dans le monde.
Je vais quand même regarder cette soirée avec beaucoup d'intérêt même si je suis convaincu que l'action a bien été scriptée par les plus grands scénaristes dignes de Vince McMahon. Il faut juste que les attentes correspondent à la réalité et non à ce qu'on prétend nous présenter.
Ceux qui s'attendent à un vrai combat où les deux vont tenter de se passer le K.-O., ils vont être déçus. On ne fera pas ça au presque sexagénaire, on ne voudra certainement pas l'humilier. Les nostalgiques qui pensent que malgré son âge l'ancien élève de Cus Damato pourrait étamper son jeune rival ne réalisent pas l'importance de l'emprise du temps sur les capacités humaines du côté des réflexes et surtout sur les aptitudes d'encaisser un coup de poing.
Pour qu'une exhibition soit intéressante, il faut que les forces en présence soient inégales et ici c'est Jake Paul, malgré tout ce que j'ai écrit sur lui ici, qui a la compétence de pondérer les ardeurs. Alors ma prédiction est que les deux finalistes vont faire de leur mieux pour donner un bon show mais personne ne va se faire mal.
UNE GRANDE TRIBUNE POUR TAYLOR ET SERRANO
Il y a une autre raison importante de syntoniser Netflix ce soir, c'est le vrai méga-combat entre la championne unifiée des super-légers, Katie Taylor (23-1, 6 K.-O.), d'Irlande, qui va défendre ses ceintures contre la championne unifiée des plumes, la Portoricaine Amanda Serrano (47-2-1, 31 K.-O.).
C'est un combat revanche de l'un des meilleurs, sinon le meilleur, combat de boxe féminine de l'histoire qui a eu lieu le 30 avril 2022 dans un Madison Square Garden de New York rempli à presque totalité, 19 000 spectateurs en direct sur DAZN. Pour la première fois de l'histoire, deux femmes méritaient des bourses de 1 million.
C'était le titre unifié des légers qui était à l'enjeu à ce moment et Serrano emporté aux points en 10 rounds, une décision partagée qui a mérité une ovation debout tellement les gens avaient apprécié le spectacle.
Cette fois-ci, c'est 6 M$ que Taylor va encaisser pour défendre ses ceintures et 10 M$ pour Serrano, une protégée de Jake Paul.
La Portoricaine devra concéder 16 livres de son poids habituel de combat à l'Irlandaise ce qui n'est pas sans importance.
On s'attend à un autre affrontement titanesque entre ces deux grandes dames qui à lui seul mérite l'intérêt pour cet événement. Pour ma prédiction, j'ai l'impression que Serrano va réaliser qu'il y a une grande différence entre 140 et 126 livres et je crois que Taylor va l'emporter par décision.
GILBERTO RAMIREZ CONTRE CHRIS BILLAM-SMITH AUX « LATINO NIGHT » DES « SAISONS RIYAD »
À l'autre bout du monde, samedi soir, Turki Alalshikh des Saisons Riyad présente « Latino Night » en collaboration avec Golden Boy et Oscar De La Hoya.
Cette promotion a totalement été éclipsée par la publicité monstre autour du gala de la veille au Texas. C'est également le moins intéressant des évènements de l'éclatante série en Arabie saoudite. Cependant l'avantage est qu'on n'a pas besoin de payer pour l'acheter si on est abonné à DAZN.
Sur les six combats proposés, il y en a deux vraiment compétitifs qui méritent notre attention. Le Mexicain Gilberto Ramirez (46-1, 30 K.-O.), champion WBA des lourds-légers, va tenter d'unifier contre le Britannique Chris Billam Smith (20-1, 13 K.-O.), champion WBO.
Je n'ai jamais été un partisan de Ramirez, même quand il était champion WBO des super-moyens. Il est bon mais il m'a toujours semblé qu'il lui manquait une étincelle pour enflammer mes émotions.
Billam-Smith est moins connu mais il m'a impressionné en causant la surprise en détrônant Lawrence Okolie en mai 2023. (20-1, 14 K.-O.).
Il n'y aura pas de K.-O. ici et j'y vais pour une victoire serrée de l'Anglais aux points.
L'autre combat qui m'attire est celui de l'ancien champion du monde WBC et WBO des super-légers Jose Carlos Ramirez (29-1, 18 K.-O.) face à l'invaincu Arnold Barboza Jr. (30-0, 11 K.-O.), deux Américains avec des noms mexicains pour respecter le thème de la soirée.
Barboza Jr. est un boxeur efficace, brillant sur le ring, excellent en défense. Ramirez, c'est de la dynamite toujours prête à exploser. Ses meilleures performances, il les a réalisées chez lui à Fresno en Californie alors qu'il remplissait le Save Mart Arena de fans bruyants et gagnés à sa cause. C'est là qu'il a connu ses plus grands succès.
J'ai l'impression que le support de son public va manquer à Ramirez, lui qui boxe avec ses tripes et ses émotions. J'espère me tromper, Ramirez est un atout pour l'industrie avec son charisme et sa popularité, mais je crains qu'il soit un peu dénaturé dans l'environnement saoudien devant des spectateurs plus intéressés à se montrer qu'à participer émotivement aux combats. Barbosa par décision ici.
Bonne boxe et à la semaine prochaine.