Ciryl Gane se concentre sur le moment présent
La défaite fait inévitablement partie de la réalité de tous les athlètes en ce bas monde, mais elle est rarement autant scrutée à la loupe que lorsqu'elle est subie par ceux et celles qui pratiquent les sports de combat chez les professionnels. Encore plus quand ce revers est sans équivoque...
Notre époque étant ce qu'elle est, les images peuvent se mettre rapidement à tourner en boucle et parviennent même à semer un important doute chez le boxeur ou le combattant qui vient d'être vaincu malgré les efforts mis en amont pendant son camp d'entraînement. Il y aura continuellement quelqu'un ou quelque chose pour lui rappeler qu'il n'a pas été à la hauteur.
Pourtant, les défaites sont loin d'être la fin du monde et c'est précisément ce que Ciryl Gane a finalement réalisé après avoir été largement dominé par Jon Jones en mars dernier lors de leur affrontement pour le titre vacant des poids lourds de l'UFC, à l'UFC 285 présenté à Las Vegas.
Pour son retour qui aura lieu à l'UFC Fight Night 226 ce samedi devant les siens à Paris, « Bon Gamin », qui se mesurera encore une fois à un spécialiste du combat au sol, le Moldave Sergey Spivak, a décidé de ne plus ressasser le passé afin de se concentrer sur le moment présent.
« L'instant présent est résolument devenu le plus important, a affirmé Gane en entrevue avec RDS.ca. C'est certain que si je dois mettre un ordre, j'ai eu des adversaires qui étaient beaucoup plus importants et médiatisés, mais ça ne compte plus aujourd'hui. C'est uniquement le présent.
« Et c'est exactement la chose qui a changé [après la défaite contre Jones]. Il fallait s'alléger de toutes les pressions externes autour du combat et de l'entraînement. J'étais très concentré sur ce que disaient les médias afin d'avoir une bonne image. On a décidé de couper tout ce qu'il y autour du combat et de l'entraînement. On fait un sport, l'issue, on ne sait jamais comment ça va se passer... on gagne, on perd, peu importe. Après cette bagarre, on va retourner à l'entraînement et ensuite, on retournera se bagarrer. »
Gane reconnaît toutefois que ce changement de mentalité n'est pas survenu en un claquement de doigts. Le revers contre Jones – même s'il est considéré comme plusieurs comme étant le plus grand combattant « livre pour livre » de l'histoire – a été un énorme coup de massue à l'égo.
« On n'a pas à rougir devant la personne qui est Jones, mais la manière a fait très mal. C'est juste la manière qui a fait très mal, a avoué Gane. Parce que je suis un compétiteur, j'adore les sports, j'adore gagner. Du coup, perdre comme ça, c'est la première fois que ça m'arrivait.
« La seule défaite que j'avais eue dans ma vie, c'était [contre] Francis [Ngannou] et ç'avait été un match quasiment ex æquo. Ce sont des choses qui font mal, mais des choses qui t'endurcissent, parce qu'il n'y a pas que la défaite, il y a l'effet de la défaite sur les réseaux sociaux et plein d'autres sentiments qui viennent avec. C'était douloureux, mais tout ce qui est dur rend plus fort. »
Un combattant français bientôt champion?
L'événement de samedi marque le deuxième arrêt de l'UFC dans la capitale française, après celui du 3 septembre 2022 au terme duquel Gane avait passé le knock-out à Tai Tuivasa au 3e round. Un peu plus tôt cette semaine, quelques journalistes spécialisés locaux ont déploré le manque d'enthousiasme de la population face au gala, qui devrait néanmoins faire salle comble.
« Chaque fois, c'est très dur à dire, parce qu'on sort du mois d'août! Il n'y a pas grand monde dans les rues, toutes les télévisions sont un peu calmes. On n'a pas un ressenti direct de l'impact que ça a, détaille Gane. Mais le vendredi et le samedi, je parle pour l'année dernière, on a bien ressenti l'engouement des spectateurs et cette année, je pense que ça sera la même chose. Je reste persuadé que ça va être encore un événement incroyable. »
Cela dit, Gane insiste sur l'importance d'avoir des rendez-vous phares comme l'UFC Fight Night Gane c. Spivak. Ils permettent à de nombreux combattants locaux de se faire connaître auprès d'un plus large public et ensuite monnayer leur notoriété la plupart du temps durement acquise.
« Le fait de combattre dans son pays, ça change énormément, parce qu'on sent le soutient tout de même, explique qui a fait ses débuts avec TKO en 2018. Le public était vraiment magnifique l'année dernière et ça peut aider à la performance. On a plus de médiatisation que les adversaires, donc plus de sollicitation pour les plateaux de télévision. C'est un vrai plus. On gagne nos vies avec les combats, mais aussi avec les commanditaires. L'UFC aide beaucoup à ça.
La scène des arts martiaux mixtes française est en véritable ébullition depuis la légalisation du sport en février 2020. Il y a pratiquement des événements chaque semaine dans l'Hexagone et le jour où un athlète français règnera sur l'une des catégories de l'UFC n'est peut-être pas si loin.
« C'est une certitude, martèle Gane. C'est un discours qu'on avait avant même la légalisation. Quand on me disait que j'étais le porte-drapeau français, j'avais du mal à accepter ce rôle-là, parce que comme je l'explique encore, de tous les combattants français sur cette carte, je pense que c'est moi qui ai le moins d'expérience. Rien que cela veut dire beaucoup de choses...
« Ça fait longtemps que ces combattants-là existent et il y en a d'autres qui arrivent. On va voir de plus en plus de Français qui ont toujours été très bons dans les sports : au basket, au foot, en athlétisme, au rugby ainsi que dans les arts martiaux. Avant la légalisation, il y avait très, très peu d'intérêt de la part de l'UFC, parce que c'est une entreprise qui cherche à faire de l'argent. Et quand on ne parle pas des athlètes dans leur propre pays, ce n'est évidemment pas facile. »
En plus de Gane, Manon Fiorot, Benoît Saint-Denis, William Gomis, Yanis Ghemmouri, Morgan Charrière, Taylor Lapilus et Nora Cornolle seront également en action. Du lot, Fiorot est la plus près d'un combat de championnat, étant donné qu'elle est classée troisième aspirante chez les poids mouches. Elle affrontera pour l'occasion l'ex-championne des pailles Rose Namajuras, qui effectuera une première sortie depuis sa défaite contre Carla Esparza en mai 2022 à l'UFC 274.