Thompson-MacDonald : L’artiste et le légionnaire
UFC jeudi, 16 juin 2016. 22:39 lundi, 25 nov. 2024. 04:39OTTAWA – À l’automne 2011, une époque où la scène montréalaise des arts martiaux mixtes avait encore un pouls, l’organisation Ringside MMA avait fait signer un contrat de trois combats à un grand karatéka de la Caroline du Sud. Son nom était Stephen Thompson, mais tout le monde le surnommait « Wonderboy ».
Thompson avait été invité en ville par l’équipe de Georges St-Pierre pour aider ce dernier à se préparer pour son combat contre Carlos Condit. Tant qu’à y être, aussi bien prendre un peu d’expérience pour faire avancer sa propre carrière.
Mais « Wonderboy » ne s’est jamais battu au Québec. Quelques semaines après qu’il eut été présenté à la foule du Centre Bell, l’UFC l’a invité à joindre ses rangs. Cinq ans plus tard, il est reconnu comme l’un des meilleurs mi-moyens de la planète. Une victoire contre Rory MacDonald en fin de semaine à Ottawa ne laisserait aucun autre choix à ses patrons que de lui offrir le combat de championnat qu’il croit mériter.
« Le premier gala de l’UFC auquel j’ai assisté, je crois que c’était l’UFC 3 à Charlotte, en Caroline du Nord. C’est celui où Kimo (Leopoldo) s’était fait tirer par la queue de cheval! J’étais là avec mon père et je me rappelle de lui avoir dit que j’allais être dans l’UFC un jour. Ça m’a pris du temps avant d’y arriver, mais le voyage qui m’a mené jusqu’ici a été fantastique. »
Si Thompson a mis autant de temps à atteindre son objectif, c’est qu’il était occupé à mener une glorieuse carrière en kickboxing. Ce n’est qu’après avoir livré 37 combats victorieux chez les amateurs et 20 autres chez les pros qu’il a finalement fait le saut en arts martiaux mixtes. Et son père Ray, ancien athlète devenu entraîneur et gérant, a été à ses côtés depuis le début.
« On a déjà vu d’autres combattants, comme Roy Jones fils ou Floyd Mayweather, être incapables de bien collaborer avec leur père et je crois que c’est parce que le fils s’enflait la tête un peu et commençait à penser qu’il en savait un peu plus que le paternel. Moi, quand je suis au gym avec mon père, je l’écoute. Après, quand on en sort, on est capable de faire la part des choses. Je crois que c’est ce qui nous aide à traverser les petites épreuves du quotidien. Bien sûr, on s’obstine de temps en temps, mais ça ne change rien à l’amour que j’ai pour lui. Je sais qu’il ne veut que le meilleur pour moi. »
Stephen et Ray sortent d’un camp d’entraînement complexe. Le jeune Thompson a gagné ses six derniers combats, mais sa séquence est menacée par l’arrivée sur son chemin de MacDonald, qui est sur papier le premier aspirant au titre de leur division. Le spectaculaire cogneur juge que le Montréalais d’adoption est l’adversaire le plus complet qu’il a affronté depuis sa promotion à l’UFC.
« Il est très technique debout, sa lutte est au même niveau que celle de Georges St-Pierre et son jiu-jitsu est phénoménal, énumère Thompson. De mon côté, c’est évident que je ne veux pas aller au sol avec ce gars-là, même si j’ai travaillé très fort là-dessus. »
Mais Thompson offrira lui aussi à son rival un « look » inédit, de sorte que même s’ils sont amis à l’extérieur de l’octogone, MacDonald et lui seront confrontés à l’inconnu lorsqu’ils se retrouveront face à face dans la cage.
Pour s’acclimater au style peu orthodoxe de son prochain adversaire, MacDonald a fait appel à l’expertise de Raymond Daniels, un autre expert de kickboxing qui a confronté Thompson dans sa carrière précédente.
« Ça pourra l’aider d’une certaine façon, estime Thompson, qui a quant à lui passé une partie de son camp avec l’ancien champion des poids moyens Chris Weidman. Raymond est beaucoup plus grand et ses membres sont beaucoup plus longs que les miens. Il bouge un peu différemment aussi, il y a certaines petites choses que je fais qu’il ne fait pas. Mais je sais que Rory lui a surtout demandé son aide pour s’habituer au mouvement. Je bouge d’une façon qui peut rapidement devenir très frustrante pour quelqu’un qui n’a jamais connu ça. Je sais qu’ils seront préparés et je m’attends à un combat difficile. »
« Il m’a beaucoup aidé, a convenu MacDonald au sujet de Daniels. Il a probablement été le facteur le plus important de mon camp et explique pourquoi mon niveau de confiance est à son plus haut à l’approche de ce combat. »
Un Rory plus « animalesque »
MacDonald réapparaît dans le portrait après une absence de près d’un an. La dernière fois qu’il est entré dans l’octogone, pour défier le champion Robbie Lawler, il en est ressorti littéralement défiguré, le sang s’échappant de son nez fracturé peignant un visage devenu méconnaissable.
Les cicatrices ont guéri et le faciès du grand Britano-Colombien a repris ses traits familiers, des traits sérieux et imperturbables. Quand Rory MacDonald active l’interrupteur et pose toute sa concentration sur l’homme qu’il doit abattre, il devient un légionnaire sanguinaire tout droit sorti d’une autre époque. C’était vrai avant que Lawler ne le corrige et ça semblait l’être encore plus à deux jours de son retour.
« Je me sens différent, je me sens mieux. J’ai l’impression que ce combat m’a rendu plus "animalesque", plus affamé d’être un combattant et de m’entraîner comme une bête. Je suis en pleine forme », prévenait le leader du Tristar Gym.
« Ça sera un combat technique, mais il y aura assurément du sang qui sera versé », a-t-il plus tard ajouté en ne pouvant retenir un petit rire démoniaque.
Depuis sa victoire mémorable contre MacDonald, Lawler a défendu son titre une fois de plus en disposant de Carlos Condit. Son prochain test est prévu pour le 30 juillet contre Tyron Woodley.
D’ici là, « Wonderboy » et MacDonald entendent se positionner à l’avant de la file d’attente. Thompson, qui était déjà convaincu d’en avoir fait assez pour être considéré après sa victoire par K.-O. face à Johny Hendricks, croit que le gagnant du combat principal de samedi dans la capitale canadienne deviendra un candidat inévitable pour le titre de prochain aspirant à la récompense tant convoitée.
« Avec une bonne victoire face à Rory, ils n’auront pas le choix de me le donner. Je me croise les doigts! »
MacDonald, quant à lui, a appris depuis longtemps qu’avec l’UFC, la seule certitude, c’est qu’il n’y a jamais rien de certain.
« Il y a tant de prétendants de qualité dans cette division. Je crois que je devrais offrir la performance de ma vie pour passer mon message. »
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