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Comment as-tu fait Kristian Matte pour rester avec les Alouettes?

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MONTRÉAL – Comment as-tu fait Kristian? Pour rester avec les Alouettes quand personne ne pouvait se fier à Kavis Reed? Quand Mike Sherman était confus? Quand Dan Hawkins était dépassé? Quand on aurait pu écrire une télésérie sur la galère des propriétaires?

 

Pendant 14 ans, même si ça signifiait de renoncer à plus d'argent ailleurs, Matte a choisi la loyauté envers l'organisation montréalaise. Parce que, pour lui, le football est une affaire de cœur.

 

À ne pas en douter, il faut raffoler du football pour y « jouer » jusqu'à 39 ans. Car oui, Matte avait encore l'impression d'y jouer, mais ça signifie aussi de sacrifier son corps, jeu après jeu, en étant justement au cœur des tranchées.

 

« C'était une question de loyauté, j'ai été repêché par les Alouettes et j'allais tout donner à cette organisation. Quand les saisons étaient moins bonnes, on se dit parfois qu'on ne veut plus être ici. Mais je suis un travaillant et je voulais aider l'équipe à renverser la vapeur pour redevenir l'équipe dominante de l'Est. On l'a vu dans les dernières années que c'est revenu pour rester. C'est spécial ce qui règne dans le vestiaire, ça va être beau à voir », a confié Matte après sa conférence de presse.

 

Mais on l'a surtout compris quand l'émotion a coupé la voix de ce gentil colosse au moment de parler de ses enfants (Zackary et Ellison) et sa femme (Melissa).

 

« Mon fils est né en 2015 et j'ai joué mon meilleur football après leur naissance. J'ai voulu leur prouver que tout était possible et qu'il faut essayer d'être le meilleur dans ce qu'on aime. D'avoir partagé ces moments avec eux, c'est très spécial. On a encore des confettis (de la coupe Grey en 2023) dans le garage. Ils vont s'en rappeler toute leur vie. La famille reste la chose la plus importante », a-t-il exprimé en jumelant humour et affection.

 

Avec un tel palmarès, Matte pourrait quitter le terrain en insistant sur son imposante contribution pour redorer le blason des Alouettes. Il se sent « extrêmement fier », mais il part plutôt de l'usine avec l'humilité d'un employé modèle aimé de tous.

 

Cet amour qui règne chez les Alouettes, Matte avait assez de vécu pour en parler librement. Au terme de son 190e et dernier match, Matte a d'ailleurs prononcé un touchant discours en rappelant le dicton selon lequel « le football ne t'aimera pas en retour, mais que ce sont les amitiés bâties dans cette équipe qui vont te rendre cet amour ».

 

Kristian MatteMatte ne parlait pas à travers son casque. Quand les confettis tombaient encore à Hamilton, ses coéquipiers l'avaient choisi pour soulever, en premier, la huitième coupe Grey de l'histoire du club.

 

« Ça démontre le respect et l'amour dans notre vestiaire. Je l'ai déjà dit, on s'aime. Il y a un feeling différent à Montréal, les nouveaux le disent. Ce n'est pas juste moi qui les aime, eux aussi m'aiment », a témoigné Matte qui n'oubliera pas ce geste.  

 

« Pour les jeunes qui arrivent dans une organisation quand tout va bien, qu'il y a de l'amour et que les gens se respectent, tu ne réalises pas à quel point c'est unique. Il a été en mesure de le faire réaliser aux autres et on doit préserver le tout », a souligné son grand copain Luc Brodeur-Jourdain.

 

Matte a bouclé la boucle en caressant le vieux trophée, car il était arrivé avec les Alouettes en 2010, l'année de leur deuxième championnat consécutif.  

 

Puisque son dernier tour de piste a été complété, Matte s'est laissé transporter dans les souvenirs imprégnés dans sa mémoire. Le petit – mais pas si petit - garçon de 8 ans qui a développé sa passion du football à St-Hubert n'aurait guère pu s'imaginer vivre une carrière aussi épatante.

 

« Je n'ai jamais cru que j'aurais une si belle carrière. J'ai le cœur comblé, j'ai tout accompli ce que je souhaitais. J'ai quand même hâte au prochain chapitre pour redonner au football d'une autre manière », a confié Matte qui, vous le voyez, pense déjà à la relève.

 

Et non, Matte n'a pas été torturé à l'idée d'accrocher ses crampons. La réflexion s'est effectuée doucement dans sa tête. Sa femme et ses enfants n'ont pas eu à lui faire comprendre qu'il devait sortir sur les lignes de côté.

 

Sa longévité fascinante l'a mené au troisième rang de l'histoire des Alouettes derrière Anthony Calvillo (16 saisons) et Scott Flory (15 saisons).

 

« Je n'y avais jamais pensé, on me l'a fait réaliser l'autre jour. C'est un honneur juste d'être dans la même phrase qu'eux. Je ne crois pas que le réalise pleinement », a répondu Matte sur un ton admiratif.

 

On le sent, le numéro 51 aura besoin de temps pour réaliser l'ampleur de sa carrière. Il finira par constater que son nom s'ajoute à la liste des Québécois qui ont connu des parcours professionnels inspirants sur la ligne offensive comme Laurent Duvernay-Tardif, Pierre Vercheval et Brodeur-Jourdain.

 

D'ailleurs, Brodeur-Jourdain n'aurait pas raté la conclusion de ce chapitre. Il a senti l'émotion monter en écoutant son fidèle allié.

 

« Le premier mot, c'est ami. Le lien qui nous unit va durer jusqu'à notre mort. On a été forgés dans cette ère des Alouettes allant des années difficiles jusqu'au retour du succès. On s'est tenus ensemble pour revenir en force chaque année », a décrit LBJ.  

 

Notre petit doigt nous dit justement que Matte ne tardera pas trop à revenir dans le giron des Alouettes dans les opérations football. Il y investira tout le travail et le cœur qui ont façonné son succès.