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Les Alouettes, une passion sans frontière pour l'Américain Carl Anderton Jr

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MONTRÉAL – Vous ne rencontrerez probablement pas plus maniaque des Alouettes que Carl Anderton Jr.

L'homme de 51 ans ne manque pas un match et se déplace au stade une ou deux fois par année. Il passe sa semaine à se garder à jour en écoutant ses balados préférés, son téléphone est rempli de photos sur lesquelles il apparaît avec ses joueurs favoris et sa garde-robe déborde d'articles à l'effigie de l'équipe.

Rien là, direz-vous, jusqu'à ce qu'on vous précise qu'il habite à Ocean City, une petite ville côtière située aux limites du Maryland et du Delaware, à dix heures de route de Montréal.

Anderton est un rare rescapé de l'époque des Stallions de Baltimore. Il s'était laissé succomber aux charmes du football à trois essais quand sa ville, après avoir été ignorée pour l'expansion de la NFL au milieu des années 1990, a plutôt reçu une franchise de la Ligue canadienne.

Pendant leur brève existence, les Stallions ont été l'une des puissances de la LCF. Ils ont perdu en finale de la Coupe Grey en 1994 et ont remporté le gros trophée l'année suivante. Anderton était tellement épris de sa nouvelle équipe à l'époque que lorsqu'il a rencontré le receveur des Alouettes Tyson Philpot pour la première fois, l'année dernière, il n'a pu s'empêcher de lui confesser qu'il ne portait pas son père dans son cœur. Cory Philpot était porteur de ballon avec les Lions de la Colombie-Britannique, les champions de la Coupe Grey en '94.

« Mais quand on a gagné la Coupe l'année dernière, j'ai dit à Tyson que tout était pardonné maintenant, que son père et moi on était quittes! », précise le jovial Américain dans un éclat de rire.

Les Stallions n'ont existé que pendant deux ans avant de déménager à Montréal en 1996. La grande majorité de ses semblables ont vite trouvé consolation dans l'avènement des Ravens dans la NFL, mais le fier partisan qu'était Carl Anderton n'est jamais débarqué du train. Il y a plutôt vu une occasion de doubler son plaisir et d'élargir ses horizons.

« Au début, ils parlaient de déplacer l'équipe à Houston, puis à St-Louis, raconte-t-il. Quand Montréal est arrivé dans la conversation, j'ai trouvé ça pas mal cool parce qu'au même moment, ma ville natale de Salisbury a hérité de la filiale de niveau A des Expos. Orlando Cabrera, Javier Vazquez, Michael Barrett, je les ai tous vus grandir. Quand ils sont montés dans les Majeures, on a eu envie de les suivre. Et on s'est dit qu'on allait pouvoir faire d'une pierre deux coups parce que hey, mon équipe était ici! »

Carl et sa femme Sara ont donc visité Montréal quelques fois à la fin des années 1990. L'arrivée de deux enfants dans leur vie les a ensuite contraints à un style de vie plus casanier pendant quelques années, mais depuis environ une décennie, leur pèlerinage dans la métropole francophone des Amériques est une tradition annuelle.

Anthony Calvillo et Carl Anderton Jr

Pendant que de nombreux Québécois réservent chaque année un week-end pour descendre assister à un match de la NFL, le couple fait le chemin inverse pour venir encourager les Moineaux. Les amoureux ont visité la ville au moins une fois pendant chaque mois de la saison. En novembre dernier, ils ont fait l'aller-retour en 36 heures pour assister à la parade des champions au centre-ville. Et ce n'était pas un hasard s'ils étaient au Stade Percival-Molson jeudi soir. Ils tenaient à y être pour le dévoilement de la bannière commémorant le dernier titre de la franchise.

« J'adore ça ici. La bouffe, tous les trucs qu'il y a à faire, le rythme de vie et la gentillesse des gens. C'est une culture complètement différente », s'enthousiasme Anderton, fier de dire qu'il a maintenant ses habitudes et ses endroits secrets loin des lieux habituellement fréquentés par les touristes.

Son équipe, sa montagne

À la maison, Carl Anderton entretient sa passion comme s'il habitait dans un condo du Plateau.

Jadis forcé de se rabattre sur les occasionnelles diffusions sur ESPN, il profite maintenant des nouvelles technologies pour regarder sans ambages les matchs sur les chaînes canadiennes. « Je peux même regarder le repêchage! », s'emballe-t-il.   

À longueur de semaine, il satisfait sa soif d'information en s'abreuvant de balados qui traitent de l'actualité de l'équipe. Il raffole aussi des émissions d'après-matchs, animées par Joey Alfieri, que les Alouettes diffusent en direct sur leurs plateformes numériques. Le contenu bilingue l'a aidé à se familiariser avec la langue de Luc Brodeur-Jourdain.

« Je suis capable de comprendre un peu, de lire aussi. Quand je regarde des vidéos sous-titrées, je peux faire des liens. Maintenant quand je vais au restaurant, je ne suis plus déstabilisé par le menu en français. Petit à petit. »

Sans qu'on le dirige vers le sujet, Anderton aborde ensuite la célèbre envolée de Marc-Antoine Dequoy après la victoire de l'automne dernier contre les Blue Bombers de Winnipeg.

« J'ai éprouvé de la sympathie pour lui en le voyant prendre la parole de cette façon. Je ne crois pas que je peux comprendre entièrement la cause qu'il défendait, mais je la respecte certainement. Et je suis d'avis que si c'était quelque chose qui lui tenait à cœur, il a bien fait d'utiliser sa tribune pour en parler. »  

Le fan fini utilise lui-même ses plateformes pour parler avec son cœur. Anderton travaille en politique. Il a déjà été maire d'une petite ville de 3000 habitants et depuis 2015, il est membre de la Chambre des délégués du Maryland.

« À cause de mon métier, les gens viennent toujours sur mon Twitter pour chercher à connaître mes positions sur tel ou tel sujet, mais tout ce qu'ils peuvent trouver, ce sont des infos sur le football des Alouettes! », s'esclaffe-t-il.  

À force de casser les oreilles à son entourage, Anderton affirme avoir réussi à rallier quelques personnes à sa cause. Des amis viennent regarder les matchs chez lui et l'accompagnent parfois dans ses virées sur les routes de la côte est.

Il aimerait éventuellement prolonger ses road trips pour visiter Trois-Rivières, Québec et l'île-du-Prince-Édouard. Suivre son équipe à l'étranger ne fait toutefois pas partie de ses projets futurs.

« J'ai visité des stades d'autres équipes, mais y assister à des matchs? Si je fais douze heures de route, je veux manger de la bouffe maison! Je ne veux pas aller m'asseoir à Hamilton! Je veux être sur la montagne », justifie le Montréalais d'adoption.