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Les mains sûres et créatives de Kaion Julien-Grant

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MONTRÉAL – D'aussi loin qu'il se rappelle, Kaion Julien-Grant a été attiré par les superhéros et l'univers des dessins d'animation japonais. Encore aujourd'hui, à une époque de sa vie où une partie de son temps d'écran doit être dédié à l'étude de ses prochains adversaires, il continue de cultiver son intérêt pour les personnages de fiction qui ont bercé son enfance.

Avec les années, le receveur de passes des Alouettes a développé une nouvelle façon d'entretenir sa passion. Quand il n'utilise pas ses mains pour capter les passes de Cody Fajardo, le numéro 11 manie le crayon pour coucher sur papier ses propres créations.

« J'ai toujours aimé dessiner », nous racontait après l'entraînement de mardi Julien-Grant, qui a complété une mineure en arts en plus de sa majeure en kinésiologie pendant ses quatre années à l'Université St. Francis Xavier.

Son talent caché a été révélé au grand jour en fin de semaine lorsque les Alouettes ont dévoilé une collection de deux chandails commémorant leur conquête de la Coupe Grey.

Le premier étale les grands moments du parcours éliminatoire de l'équipe sous forme de bande dessinée, le médium favori du dessinateur footballeur. Y sont notamment dépeints Marc-Antoine Dequoy pendant sa célèbre entrevue à RDS, Kabion Ento en pleine interception et Tyson Philpot célébrant le plus important attrapé de sa carrière. On a aussi demandé à Julien-Grant d'y faire son autoportrait même si une blessure l'a contraint à un rôle de personnage secondaire dans les succès désormais immortalisés de son équipe.

« [Mes coéquipiers] ont beaucoup aimé ça! Plusieurs m'ont taquiné parce que je ne les avais pas dessinés, mais hey, j'ai dû leur faire comprendre que l'espace était limité », rigole l'artiste.

Le deuxième chandail est frappé d'un imprimé de différentes dépêches de journaux et de photos soulignant le triomphe.

En tout, Julien-Grant avait soumis cinq idées à Camille Perrin-Ridgway, la coordonnatrice marketing production et contenu des Alouettes qui lui avait proposé le projet. Deux d'entre elles ont été retenues.

« J'ai peut-être passé deux à trois heures par design. Mais la bande dessinée a été plus longue à cause de tous les personnages qui en faisaient partie. J'en avais fait d'autres aussi qui n'ont pas fait la coupure. Au final, je ne pourrais pas te dire combien d'heures j'ai mis là-dedans! »

Pour mettre au monde ses créations, Julien-Grant peut dessiner directement sur son iPad à l'aide d'un stylo électronique. Il lui arrive aussi d'y aller à l'ancienne et de caresser son carnet de croquis au crayon à mine. Il prend ensuite une photo de son œuvre et la téléverse dans le logiciel Photoshop, où il la reproduit et la colore jusqu'à l'obtention du produit fini désiré.

Julien-Grant exprime aussi son côté créatif par le développement de sa propre image de marque qu'il a créée pendant son passage à l'université. On la reconnaît à son logo distinctif qui représente ses initiales, « KJG », et à un personnage souriant coiffé d'un impressionnant afro.

« Pendant la Covid, je m'ennuyais et j'ai eu l'idée de l'imprimer sur des casquettes. Quand on a finalement pu recommencer à jouer, je me suis mis à les porter. B.J. Cunningham a été le premier coéquipier à m'en demander une. Puis les gens ont commencé à poser des questions, beaucoup de questions. Ça a fait boule de neige. »

L'engouement est devenu tel que Julien-Grant a décidé d'ouvrir une boutique en ligne. Une demi-douzaine de modèles sont présentement disponibles. Il aimerait éventuellement y ajouter d'autres articles, des chandails par exemple, et en varier la présentation.

« Les affaires vont plutôt bien, surtout quand je sors des nouvelles couleurs. J'ai beaucoup de support au sein de l'équipe, tellement que je dois toujours en transporter quelques-unes avec moi juste au cas. Mais même à la maison, des gens qui ne savent même pas que je joue au football m'en parlent. C'est ce que je veux, au fond, que mes trucs ne soient pas nécessairement reliés à moi et à ce que je fais sur le terrain. »

Un artiste en crampons

Paradoxalement, Kaion Julien-Grant se considère aussi comme un artiste lorsqu'il enfile son casque et ses crampons pour aller écrire le récit de sa florissante carrière athlétique.

« Tout ce que je fais, je veux le faire au meilleur de mes habiletés pour m'assurer d'être fier du produit final », compare-t-il.

Jusqu'à maintenant, les accomplissements du vétéran de cinq saisons pourraient lui valoir un beau vernissage à la fin de la saison. Après cinq semaines, le receveur natif de Toronto arrive au septième rang de la LCF au chapitre des verges récoltées par la passe (288) et au quatrième rang pour les verges obtenues après le premier contact (139).

Il a capté 79% des passes dirigées en sa direction (26 sur 33). Parmi les dix receveurs les plus productifs de la Ligue, seul son coéquipier Tyson Philpot affiche un plus grand indice de fiabilité.
C'est un retour en force pour un joueur qui a raté la moitié de la dernière saison en raison d'une blessure à une main et d'une fracture de la clavicule.

« Au début de ma réhabilitation, ça m'a traversé l'esprit, le stress de potentiellement ne pas être capable de revenir au même niveau, admet l'athlète de 28 ans. C'était mon but premier pendant ma remise en forme. Je voulais être sûr d'être aussi bon qu'avant, sinon meilleur, à mon retour au jeu. Ça allait bien mes affaires l'année dernière et je voulais bâtir là-dessus. »

S'il reste en santé, Julien-Grant anéantira les références qu'il a enregistrées en 2022, alors qu'il avait généré des gains de 517 verges sur 36 attrapés en 18 parties.

Déjà, il a réussi quelque chose qui lui avait échappé la saison dernière : marquer un touché. En inscrivant les premiers points de la victoire de samedi dernier contre les Stampeders, « KJG » a célébré un premier majeur depuis le 29 octobre 2022.

« Je commençais à croire que j'étais allergique à la zone des buts, sourit-il. J'ai eu l'impression qu'un énorme poids est parti de mes épaules quand c'est arrivé. Ce n'est peut-être pas grand-chose, mais pour moi c'était gros. »

Le perfectionnisme n'est-il pas le propre de tous les grands artistes?