SHERBROOKE - Malgré ses six pieds quatre pouces et 296 livres, ça demeure difficile pour Kristian Matte de déloger l’un des cinq membres de la ligne offensive des Alouettes de Montréal.

Cette unité, qui veille au confort d’Anthony Calvillo dans le nid montréalais, constitue l’une des forces indéniables de l’organisation et Matte s’affaire à accentuer son répertoire sur le terrain pour se forger une place au sein de ce groupe pour le moins imposant.

À l’aube de sa quatrième saison avec cette formation, Matte doit donc continuer d’affiner sa patience parce qu’il ne risque pas d’hériter d’un poste de partant en 2013 sous la férule de Dan Hawkins.

Ouvert d’esprit et perfectionniste, Matte a ainsi accepté d’ajouter une corde à son arc cette année en apprivoisant le métier de centre pour devenir le remplaçant de Luc Brodeur-Jourdain.

« Je me retrouve dans une situation où tous les gars devant moi sont plus vieux et plus expérimentés, donc j’attends ma chance. Quand je vais l’obtenir, je vais montrer que je suis capable de jouer à ce niveau », a convenu le colosse qui a développé son art avec les Stingers de Concordia.

En quelque sorte, Matte devient victime du succès de ce groupe qui s’avère l’une des priorités pour le directeur général.

« C’est sûr que la ligne offensive a toujours été solide à Montréal et c’est grâce à Jim Popp, qui veut toujours miser sur de solides joueurs de ligne canadiens aussi. Il s’assure non seulement d’avoir de bons partants, mais aussi de bons substituts », a ajouté Matte à la suite d’un entraînement à Sherbrooke.

Contraint par le contexte, l’athlète originaire de St-Hubert ne pourrait être blâmé de regarder ailleurs, mais il a conclu que l’environnement montréalais lui plaisait davantage. Sa relation étroite avec son père atteint de sclérose en plaques s'avère sans doute un facteur dans l'équation. 

« Je suis très choyé d’être à Montréal, c’est ici que j’ai grandi en regardant les Alouettes. L’an passé, c’était la dernière saison de mon contrat et je n’étais pas certain de ce qui allait arriver, mais les Alouettes voulaient vraiment me garder. Je devais me demander si le gazon était plus vert ailleurs et je n’étais pas convaincu de cela. J’ai la chance d’apprende des meilleurs joueurs de ligne offensive dont Scott Flory, Luc Brodeur-Jourdain et Josh Bourke », a confié le garde de position naturelle.

Au lieu de se concentrer sur la facette difficile de son attente, Matte préfère investir dans son développement et sa nouvelle fonction de centre cadrait avec cette approche.

« Rien n’est coulé dans le béton encore, mais je suis identifié comme le centre numéro deux. C’est tellement nouveau que c’est normal que je commette quelques erreurs, mais je m’améliore et j’aime ça. C’est un défi et je veux être le meilleur dans ce que j’entreprends, donc ça me motive à étudier davantage et progresser », a raconté le gaillard qui s’est fait valoir avec les Texans de Houston dans la NFL en 2010 avant d’être retranché et de se rapporter aux Alouettes.

Même si son rôle est acquis sur l’unité partante, Brodeur-Jourdain aborde la situation avec sa mentalité d’athlète.

« On se retrouve en compétition étant donné qu’il s’entraîne comme centre, mais je tiens à rassurer les gens qu’elle est saine. Je lui donne le maximum de conseils pour l’aider dans sa progression », a expliqué la pierre d’assise du front offensif des Oiseaux.

« Il accomplit un bon travail et c’est important que les joueurs de ligne offensive soient polyvalents. Comme les autres joueurs de ligne offensive, il prend son métier avec fierté et nous sommes contents de ce groupe », a commenté l’entraîneur au sujet de Matte.

« Luc est tellement stable et c’est un peu ce qui explique la situation actuelle de Kristian. Mentalement et physiquement, Luc possède un certain avantage présentement », a-t-il ajouté.

Une dose de chance requise

Accéder à un poste de partant dans la LCF ne repose pas uniquement sur le talent et l’aplomb sur le terrain. Les athlètes doivent souvent jouer de chance pour faire leurs preuves et ne plus se faire déloger du terrain.

« Il a démontré une progression intéressante au cours des quatre années, mais il faut être réaliste, la ligne offensive montréalaise est rarement blessée et quand c’est arrivé dans le passé, ce fut surtout aux postes de bloqueur avec Jeff Perrett et Josh Bourke. Ce n’est pas une position à laquelle Kristian peut contribuer et c’est un peu ce qui explique la situation dans son cas», a ciblé Brodeur-Jourdain qui a succédé à Paul Lambert et Bryan Chiu avec brio depuis son départ à la retraite.

Même Flory, le garde étoile, a dû patienter avant de gagner son point auprès des entraîneurs. Son occasion s’est présentée à sa deuxième année quand Mike Sutherland, devenu analyste à RDS, s’est blessé.

Depuis cette ouverture survenue en 2000, Flory n’a cessé de s’attirer des éloges et il semble encore solide comme le roc même s’il célébrera son 37e anniversaire en juillet.

« Presque tous les athlètes ont dû vivre une période d’attente dans leur carrière. Tu dois aussi créer des opportunités pour toi-même et c’est ce qu’il a fait en ajoutant l’option de centre à son registre », a émis Flory.

« C’est un bon coéquipier et nous avons confiance qu’il pourrait accomplir le boulot si quelque chose survenait. Il lui reste seulement à acquérir de l’expérience en situation de match et ça va venir avec le temps », a enchaîné le garde à la fiabilité incontestable.

Le choix de première ronde des Alouettes en 2010 (7e au total) possède un nouveau contrat de trois saisons en poche et il a eu l’occasion de fouler le terrain plus souvent en 2012. Matte se considère donc prêt à prendre plus de place au sein de l’équipe.

« J’ai le sentiment qu’il a les capacités et le talent pour être partant dès maintenant. Il possède une belle diversité et un bon bagage derrière lui. Il pourrait même faire quelques jeux comme ailier rapproché comme je l’ai fait à mes deux premières années dans la LCF », a conclu Brodeur-Jourdain sans véritable soupçon de nostalgie dans la voix.