La prochaine édition de l'Omnium Britannique qui sera disputée sur le tortueux et lunaire parcours Royal St George's en Angleterre va-t-elle confirmer le début de l'époque McIlroy ?

Sa victoire acquise lors de l'Omnium Américain a confirmé son immense talent. On le savait déjà capable de grandes choses notamment à la suite de ses troisièmes positions au classement obtenues lors du Championnat de la PGA en 2009 et 2010 et lors de l'Open de l'an passé à St Andrews. On sait aussi qu'il a su se remettre se l'énorme déception encaissée lors de la finale du Tournoi des Maîtres un peu plus tôt cette année.

Mais Rory McIlroy est-il le joueur qui va succéder à Tiger Woods et prendre en main les destinées du golf professionnel ? Dans les faits, la situation est à ce point complexe qu'il est difficile de répondre à ces questions. Pour la simple et bonne raison qu'on a pas obtenu de réponses à celles qu'on ne cesse de se poser depuis deux ans.

Les époques au golf professionnel se sont toujours lentement succédé. Ce n'est pas surprenant dans un sport aussi conservateur et qui se nourrit de traditions centenaires. En Amérique, le passage s'est fait de Gene Sarazen à Walter Hagen, puis à Byron Nelson.

Puis ce fut l'époque Snead-Hogan. Ces deux-là se sont affrontés aussi souvent que les Canadiens et les Maple Leafs ne laissant après leur passage que des miettes pour les autres compétiteurs. Snead a inscrit un nombre record de 82 victoires à son tableau entre 1936 et 1965. En tout, sept titres majeurs. Hogan a répliqué avec 64 victoires de 1938 à 1959 remportant neuf tournois majeurs. Mais l'un autant que l'autre n'ont pu résister aux assauts répétés de leur successeur qui, poliment, leur a indiqué qui était le nouveau maître de la maison.

Arnold Palmer, fort de son titre de champion amateur des États-Unis en 1954; a commencé sa domination chez les professionnels l'année suivante en gagnant l'Omnium Canadien, la première de ses 62 victoires, dont sept majeures. On a beau savoir que rien n'est éternel, reste que Palmer a encaissé le choc lorsque Nicklaus lui a fait savoir en prolongation de l'Omnium Américain en 1962 que son époque était terminée. Il lui avait signifié une mise en garde deux années plus tôt en terminant derrière lui en deuxième place alors qu'il n'était pourtant qu'un joueur amateur.

Nicklaus le magnifique. Nicklaus, probablement le plus grand joueur de tous les temps, avec ses 73 victoires sur le circuit PGA Tour. Nicklaus avec 18 titres majeurs chez les professionnels et deux autres en tant que meilleur amateur. Et pourtant lui aussi, malgré une domination à outrance de sa profession s'est effacé. Il a su au terme d'un des plus grands duels de l'histoire du golf à Turnberry, qu'il était temps de partir.

Quelques comètes sont bien passées, Lee Trevino ou Johnny Miller, mais il s'agissait bien de l'époque Tom Watson. Le vénérable, encore capable d'aspirer à la victoire lors de l'Omnium Britannique à l'aube de la soixantaine en 2009; compte huit titres majeurs à sa fiche.

Puis ce fut au tour de Greg Norman. Le flamboyant joueur australien a redéfini la profession. Il compte 20 victoires en territoire nord-américain et 70 sur la scène internationale. Ses faits d'armes sont survenus lors des Omniums Britanniques de 1986 et 1993. Il a imité ses prédécesseurs Palmer et Nicklaus dans nombre de domaines et su capitaliser sur de très bonnes affaires.

Enfin, nous avons connu l'époque Woods qui a commencé avec sa victoire lors du Tournoi des Maîtres en 1997. 11 ans de domination totale. Personne n'a pu jeter ombrage à ce champion, si ce n'est lui-même.

J'écrivais qu'il est encore trop tôt pour consacrer McIlroy dans son nouveau rôle. Trop tôt, parce que Woods n'a pas abdiqué. Parce qu'il n'a pas annoncé ses intentions. J'aurais bien aimé le voir engagé dans des duels fascinants afin de déterminer l'identité de son successeur. Il n'en a pas eu la chance. Il ne s'est pas donné cette chance.

Est-ce ainsi que ça va se terminer ? Pas de passation des pouvoirs. Pas de spectacle à la Borg-McEnroe. Pas de série Yankees-Red Sox. Pas de septième mach de la Coupe Stanley. Si McIlroy dispute l'Omnium Britannique de la façon dont il a joué il y a quelques semaines à Washington, il pourrait bien confirmer le début d'une nouvelle époque sans que nous n'ayons pas célébré la fin de la précédente.

Deviendrons-nous tous des Rory à compter de lundi comme nous sommes devenus des Palmer, des Nicklaus, des Watson, des Norman et des Tiger. Je n'en suis pas encore certain.