MONTRÉAL – Une victoire en octobre n’en vaut peut-être pas une en mai, mais le Canadien trouvera néanmoins une satisfaction particulière dans celle décrochée samedi soir au Centre Bell.

Cinq mois après son élimination aux mains des Rangers de New York en finale de l’Association Est, le Tricolore a savouré une petite revanche en signant un triomphe de 3-1 sur ses tombeurs printaniers.

Le Canadien boucle ainsi son premier séjour à domicile de la saison sur une note parfaite et ses sept victoires en huit matchs lui valent le meilleur dossier de la Ligue nationale. Il faut remonter en arrière de 53 ans, à la saison 1961-62, pour recenser un meilleur début de saison à Montréal après huit matchs selon le Elias Sports Bureau.

« J’aurais été très satisfait », a simplement répondu l’entraîneur Michel Therrien, un sourire révélateur au visage, quand on lui a demandé quelle aurait été sa réaction si on lui avait dit, il y a un mois, que son équipe débuterait l’année avec une fiche de 7-1.

Fort d’une séquence de quatre victoires, il s’envolera dimanche pour l’Ouest canadien où l’attendent des affrontements contre les Oilers d’Edmonton, les Flames de Calgary et les Canucks de Vancouver.

Tomas Plekanec, Lars Eller et Max Pacioretty ont inscrit les buts des vainqueurs. Le travail de Dale Weise a été à l’origine des deux derniers.

La réplique des Rangers est venue de Carl Hagelin.

Carey Price, qui avait été mis hors d’état de nuire par une collision avec Chris Kreider dans le premier match de la dite confrontation éliminatoire, a brillé avec une performance de 34 arrêts. Derick Brassard se demande probablement encore comment la mitaine du médaillé d’or olympique a pu capter son tir des poignets alors qu’il sortait du banc des punitions en deuxième période. Dan Girardi rêvera assurément à la chance qu’il a ratée dans les derniers instants du match.

À l’autre bout de la patinoire, Henrik Lundqvist a réalisé 26 arrêts.

« J’ai beaucoup aimé notre façon de se comporter dans les deux premières périodes, a observé Therrien. On n’a pas accordé grand-chose et on a eu beaucoup de chances de marquer. Lundqvist a fait des arrêts clés pour garder les Rangers dans le match. »

« Mais en troisième, j’ai trouvé qu’on jouait un peu trop sur les talons, on pensait un peu trop à se défendre. Il faut qu’on apprenne à se défendre en restant dans leur face. On a sorti un peu de ce plan en troisième et Carey a fait des arrêts dignes d’un grand gardien de but pour nous permettre de l’emporter. »

Le Canadien a complètement tenu en échec Rick Nash, qui revendiquait huit buts en sept matchs avant d’arriver à Montréal. Le dangereux attaquant, le joueur d’avant le plus utilisé par Alain Vigneault, a été limité à un tir au but en 26 présences sur la patinoire.

Hué chaque fois qu’il touchait à la rondelle, Kreider n’a été une distraction pour personne. Il a été crédité de trois mises en échec et, comme Nash, a terminé la rencontre avec un différentiel de moins-1.

Pacioretty le passeur

Pour la première fois depuis son match d’ouverture à Toronto, le Canadien s’est rendu service en inscrivant le premier but du match.

Habituellement utilisé sur le principal duo défensif en désavantage numérique, Manny Malhotra venait de prendre place au cachot lorsque Tomas Plekanec et Max Pacioretty se sont échappés vers Henrik Lundqvist à partir de leur propre ligne bleue. Les deux comparses se sont échangé la rondelle quatre fois, le meilleur franc-tireur du club la saison dernière offrant finalement à son coéquipier tchèque son cinquième filet de la saison sur un plateau d’argent.

« J’attendais de voir la réaction du gardien pour prendre ma décision, racontait Pacioretty, auteur de 39 buts la saison dernière, après la victoire. Je m’étais dit que si le gardien poussait fort de mon côté, j’allais la redonner à Plecky et même si je crois que j’avais une ouverture suffisante, c’est ce que j’ai fait. À deux contre le gardien, c’est beaucoup plus facile qu’en échappée! »

Avec le premier but de l’équipe à court d’un homme cette saison, Plekanec touchait la cible pour la première fois depuis la visite du Canadien à Philadelphie il y a dix jours. Il est toujours le meilleur marqueur du club avec une récolte de neuf points en huit matchs.

« Nous avons écopé de bien mauvaises pénalités en début de match, mais ce but nous a permis de leur voler littéralement le momentum », juge Pacioretty, qui a joué un peu plus de deux minutes en désavantage numérique samedi.

Les Rangers ont créé l’égalité cinq minutes plus tard. Price a sorti la jambière gauche à temps pour parer un tir dévié en provenance du bâton de Girardi, mais Hagelin, oublié à proximité, a facilement redirigé le retour dans les cordages. Ce fut le seul moment de faiblesse du gardien du Canadien.

Le Québécois de 19 ans Anthony Duclair, qui disputait son sixième match de la saison, a récolté sa quatrième mention d’aide sur la séquence. La propriété des Remparts de Québec a connu un bon match aux côtés de Hagelin et Dominic Moore. En quelque 14 minutes passées sur la patinoire, il a totalisé trois lancers, deux mises en échec et montré un différentiel de plus-1.

« L’effet Weise »

Eller, qui avait déjà cinq buts à sa fiche après huit matchs la saison dernière, a finalement brisé la glace.

À la douzième minute de l’engagement médian, un tir raté de P.K. Subban a néanmoins atteint l’enclave, où il a été récupéré par Weise. Rapidement entouré par l’opposition, le nouveau membre du troisième trio du CH a reçu l’aide précieuse de son joueur de centre, qui a éventuellement réussi à pousser le disque errant sous Lundqvist.

Pas une œuvre d’art, mais Eller, qui continuait à clamer avec confiance que son éthique de travail finirait par rapporter, l’a accepté sans rechigner. Le Danois a été crédité de quatre tirs au but en plus de frapper le poteau de plein fouet en troisième période.

« Non, ce n’était certainement pas très beau, mais il ne se marque plus beaucoup de buts faciles de nos jours, a fait remarquer Eller. Il faut foncer au filet et nous l’avons fait avec beaucoup d’efficacité ce soir. À force d’aller à la chasse aux rebonds, la rondelle va finir par entrer dans le but. »

Weise, dont la contribution sur le trio d’énergie concorde exactement avec le plan imaginé par Therrien lorsque ce dernier a décidé de lui confier la place préalablement occupée par Jiri Sekac, a plus tard été à l’origine du troisième but des siens.

Descendu en maraude derrière Pacioretty, Weise s’est emparé d’un tir bloqué devant Lundqvist, a amené la rondelle derrière le filet et, sous le regard distrait de Kevin Klein et Marc Staal, l’a remise sans regarder au marqueur naturel qui attendait la passe dans son bureau.

« Je l’ai entendu me demander la rondelle et je savais qu’un défenseur était dans mon dos, alors j’ai simplement essayé de la lui refiler le plus vite possible. Un buteur de son calibre n’en ratera pas beaucoup comme celle-là », a humblement raconté Weise.

« J’étais un peu fâché contre moi-même parce que je venais juste de rater mon jeu sur un 2-contre-1, mais Dale s’est amené à toute vitesse et aussitôt qu’il est allé chercher la rondelle derrière la ligne rouge, je savais qu’elle s’en venait sur ma palette. C’était tout un jeu de sa part », a vanté Pacioretty, qui a maintenant trois buts à sa fiche.

La tête à Montréal, le cœur à Ottawa

La première mise en jeu du match a été précédée d’une cérémonie visant à rendre un hommage posthume à l’adjudant Patrice Vincent et au caporal Nathan Cirillo, deux membres des Forces armées canadiennes qui ont été les victimes d’attentats perpétrés à Saint-Jean-sur-Richelieu et Ottawa au cours de la dernière semaine.

Au moment où les membres de l’alignement partant du Canadien et des Rangers ont pris place à leur ligne bleue respective, l’écran géant du Centre Bell a transporté la foule montréalaise dans la capitale nationale, où les joueurs des Sénateurs et des Devils du New Jersey formaient un cercle au milieu de la patinoire du Centre Canadian Tire.

L’interprétation des hymnes nationaux, entonnés par Lyndon Slewidge, a ensuite été diffusée simultanément à Montréal et Toronto, où les amateurs ont joint leurs voix à celles des partisans des Sénateurs.

Mercredi, la Ligue nationale avait décidé d’annuler le match prévu entre les Maple Leafs en les Sénateurs en raison de la fusillade qui avait ébranlé la ville d’Ottawa en début de journée. Samedi, les Sens évoluaient devant leurs partisans pour la première fois depuis les troublants événements.