« J'étais Ken Dryden »
Hockey dimanche, 3 juin 2012. 12:09 vendredi, 22 nov. 2024. 16:15
Dans la vie de Bob Hartley, tout est souvent question de synchronisme. Parfois, il ne se retrouve pas au bon endroit au bon moment. Parfois, il a l'embarras du choix.
Tiens, prenons le cas du Canadien, par exemple. Lui, le Franco-ontarien qui a grandi en français et dont la langue seconde est l'anglais malgré qu'il soit natif de Hawkesbury, vient de laisser filer une seconde occasion de diriger le Canadien. Au printemps de 1997, Réjean Houle, qui était à la recherche d'un coach pour succéder à Mario Tremblay, avait demandé à Pierre Lacroix l'autorisation de discuter avec l'entraîneur de sa filiale des Bears de Hershey qui participaient à ce moment-là aux séries éliminatoires de la Ligue américaine. Après un match de la finale, Lacroix s'était présenté devant Hartley en lui tendant un billet d'avion pour Montréal.
« Le Canadien a l'intention de t'offrir le poste d'entraîneur. Tu dois être là demain. Bonne chance », lui avait-il dit.
Hartley avait figé sur place. Il n'avait jamais dirigé une formation de la Ligue nationale et c'est nul autre que le Canadien qui lui ouvrait une porte. Il avait pris possession du billet, l'avait manipulé nerveusement avant de le remettre finalement à son patron. « J'exige toujours de mes gars qu'ils se sacrifient pour l'équipe. Je ne peux pas les laisser tomber dans le moment le plus important de la saison », avait-il rétorqué.
Houle ne pouvait pas l'attendre. Les rumeurs couraient dans tous les sens. Il y avait de la pression. Il avait finalement opté pour Alain Vigneault. Deux semaines plus tard, l'équipe de Hartley gagnait le championnat. Un an plus tard, il devenait l'entraîneur de l'Avalanche.
Cette semaine, c'est lui qui était pressé par le temps. Il avait déjà bénéficié d'une rencontre avec Marc Bergevin quand Jay Feaster, des Flames, l'a invité à se rendre à Calgary. Il avait jusqu'à vendredi pour prendre une décision. Après cette date, il s'était engagé à retourner à Zurich pour y terminer son contrat de deux ans. Le temps jouait contre lui.
La période de réflexion de Bergevin n'était pas terminée. Il ne pouvait pas logiquement lui garantir le poste sans avoir fait totalement le tour de son jardin. Pour la première fois de sa jeune carrière, le jeune DG se retrouve dans l'enviable position de choisir un entraîneur. Pour éviter de commettre une erreur ou de prendre une décision pas suffisamment réfléchie, il ne pouvait pas bâcler ce dossier à la sauvette. Hartley a donc dû choisir entre Calgary et la Suisse. Un choix facile.
Il a failli ne jamais voir la Suisse
Vous voulez un autre exemple d'une situation saugrenue vécue par Hartley?
Il y a un an, les dirigeants de l'Océanic de Rimouski lui ont offert l'entière direction de l'organisation. À l'instar de Patrick Roy à Québec, il aurait été le seul maître à bord.
Les conversations téléphoniques avec le président du conseil d'administration de l'Océanic, André Jolicoeur, ont bien tourné. Ils ont donc convenu de se rencontrer à Québec pour finaliser les choses.
En route vers Québec, le téléphone de Hartley a sonné. C'était un dirigeant de l'équipe de Fribourg, en Suisse, qui désirait lui offrir le poste d'entraîneur. Il s'est arrêté sur la route à une heure de Québec. Il a communiqué avec Jolicoeur pour l'aviser qu'il devait se rendre à Fribourg pour voir de quoi il en retournait, tout en lui promettant de lui revenir dans les plus brefs délais. En faisant route vers la maison, le téléphone a retenti à nouveau. Cette fois, drôle de hasard, c'était l'équipe de Zurich qui voulait lui parler. Au bout du compte, il a accepté la proposition des Lions de Zurich et l'Océanic est passé à un cheveu d'être dirigé par un gagnant de la coupe Stanley.
« Je suis souvent impliqué dans de drôles de circonstances, dit-il. Si Fribourg m'avait appelé une heure plus tard, j'aurais été en réunion avec les gens de Rimouski après avoir laissé mon appareil cellulaire dans l'auto. Les deux propositions de la Suisse seraient arrivées trop tard. »
Ce long détour l'a finalement mené à Calgary. Pourtant, il avait eu un entretien chaleureux avec le nouveau directeur général de Canadien. Il n'avait pas ressenti le moindre désintéressement de la part de Bergevin, bien au contraire.
Il l'avait rencontré en compagnie de son adjoint Larry Carrière, un homme qu'il avait connu brièvement, il y a 11 ans. Directeur général et entraîneur du Titan de Laval, il désirait acquérir le défenseur Philippe Boucher, premier choix au repêchage des Sabres de Buffalo qui évoluait avec les Bisons de Granby. Un dirigeant des Sabres, Carrière l'avait aidé à compléter cette transaction.
« Mon audition avec le Canadien s'est fort bien déroulé, rappelle-t-il. Marc et Larry étaient bien préparés. Marc a été extraordinaire avec moi. Il a dirigé habilement l'entretien. Je peux vous dire qu'il sera tout un directeur général avec le Canadien. »
Après cette rencontre, Bergevin a gardé le contact avec lui. Ils ont échangé des messages textes. Dès le lendemain de la nomination de Rick Dudley, ce dernier lui a donné un coup de fil qui a duré entre 30 et 40 minutes. Pour la seconde rencontre, qui devait avoir lieu cette semaine, Bergevin lui avait déjà confirmé qu'il serait accompagné de Carrière, de Dudley et de Scott Mellanby.
Il admet que l'intérêt manifesté par le Canadien l'a titillé. Il ne cache pas avoir ressenti une certaine excitation.
« Je suis un petit gars de l'Est de l'Ontario, explique-t-il. Dans la rue, j'ai remporté plusieurs coupes Stanley dans la peau d'un joueur du Canadien. Dans les buts (il est un ex-gardien de but), j'étais Ken Dryden. À l'avant, j'étais Guy Lafleur. L'attrait pour le Canadien était fort, mais Jay Feaster m'avait parlé il y a plusieurs semaines déjà. »
Il y avait une autre forme d'attrait pour Hartley. Le directeur général des Flames et lui, qui ont gagné ensemble la coupe Calder à Hershey, sont très liés, on le sait.
« Jay était mon président et directeur général à Hershey. Puis, je suis parti au Colorado et lui à Tampa Bay. Deux ou trois ans plus tard, il m'a appelé pour m'offrir d'être le parrain de son fils. Je ne crois pas qu'on puisse recevoir un témoignage de respect pour fort que celui-là », souligne-t-il.
Pincement au cœur
Hartley a franchement aimé la Suisse. Son équipe et ses joueurs encore davantage. Il est extrêmement heureux et soulagé de profiter d'une autre chance d'exercer son métier dans la Ligue nationale, mais il avoue ressentir encore un pincement au cœur à l'idée de ne plus les revoir.
« J'ai entretenu une belle relation avec mes joueurs. Il leur arrivait de m'appeler à la maison. Lors de ma dernière rencontre avec eux, ils m'ont demandé de ne pas partir. Il y a beaucoup d'intérêt pour la Ligue nationale en Suisse. Les gens portent les chandails de Sidney Crosby et d'Alex Ovechkin. Dès mon arrivée, j'avais prévenu les joueurs qu'on préconiserait le style de la LNH. Il me fallait changer la mentalité et les méthodes de travail. Pour eux, c'était une façon totalement différente de travailler. Ce n'était pas évident. Il m'a fallu gagner les joueurs un à un. Il y a toujours une mule ou un pur-sang qui se terre dans un coin. Il faut lui indiquer ou se trouve l'avoine », mentionne-t-il dans son style imagé.
Ses joueurs ont répondu d'une façon incroyable, comme le confirme le championnat qu'ils ont remporté contre toute attente. À Calgary, on croit que Hartley peut changer les choses, là aussi.
Débordement
L'attente du prochain entraîneur crée de la tension et alimente mille fausses rumeurs. Il arrive même qu'on assiste à de malheureux débordements.
Le collègue Tony Marinaro est tombé à bras raccourcis sur L'antichambre et ses panélistes à la suite de l'émission de jeudi où il a été question du choix qui attend Bergevin entre, supposément, Michel Therrien et Marc Crawford. Marinaro, qui m'a qualifié de raciste (rien de moins), a réussi à monter son auditoire contre ces francophones qui ne les comprennent pas. Pas ta meilleure émission, Tony.
J'admets que la presse francophone a un préjugé favorable pour Therrien, comme TSN 990 en a un pour Crawford, un analyste régulier à TSN.
En ce qui me concerne, j'ai déclaré que dans le cas de Crawford, il y a une énorme différence entre un entraîneur francophone, tel que le suggère Serge Savard, et un coach anglophone qui parle difficilement français. Méchant raciste, mon Tony.
Quand il apparaissait à L'antichambre l'an dernier, Marinaro se servait de son émission pour promouvoir ses propres apparitions. Maintenant qu'il n'y est plus, il voit les choses d'un angle différent.
Tiens, prenons le cas du Canadien, par exemple. Lui, le Franco-ontarien qui a grandi en français et dont la langue seconde est l'anglais malgré qu'il soit natif de Hawkesbury, vient de laisser filer une seconde occasion de diriger le Canadien. Au printemps de 1997, Réjean Houle, qui était à la recherche d'un coach pour succéder à Mario Tremblay, avait demandé à Pierre Lacroix l'autorisation de discuter avec l'entraîneur de sa filiale des Bears de Hershey qui participaient à ce moment-là aux séries éliminatoires de la Ligue américaine. Après un match de la finale, Lacroix s'était présenté devant Hartley en lui tendant un billet d'avion pour Montréal.
« Le Canadien a l'intention de t'offrir le poste d'entraîneur. Tu dois être là demain. Bonne chance », lui avait-il dit.
Hartley avait figé sur place. Il n'avait jamais dirigé une formation de la Ligue nationale et c'est nul autre que le Canadien qui lui ouvrait une porte. Il avait pris possession du billet, l'avait manipulé nerveusement avant de le remettre finalement à son patron. « J'exige toujours de mes gars qu'ils se sacrifient pour l'équipe. Je ne peux pas les laisser tomber dans le moment le plus important de la saison », avait-il rétorqué.
Houle ne pouvait pas l'attendre. Les rumeurs couraient dans tous les sens. Il y avait de la pression. Il avait finalement opté pour Alain Vigneault. Deux semaines plus tard, l'équipe de Hartley gagnait le championnat. Un an plus tard, il devenait l'entraîneur de l'Avalanche.
Cette semaine, c'est lui qui était pressé par le temps. Il avait déjà bénéficié d'une rencontre avec Marc Bergevin quand Jay Feaster, des Flames, l'a invité à se rendre à Calgary. Il avait jusqu'à vendredi pour prendre une décision. Après cette date, il s'était engagé à retourner à Zurich pour y terminer son contrat de deux ans. Le temps jouait contre lui.
La période de réflexion de Bergevin n'était pas terminée. Il ne pouvait pas logiquement lui garantir le poste sans avoir fait totalement le tour de son jardin. Pour la première fois de sa jeune carrière, le jeune DG se retrouve dans l'enviable position de choisir un entraîneur. Pour éviter de commettre une erreur ou de prendre une décision pas suffisamment réfléchie, il ne pouvait pas bâcler ce dossier à la sauvette. Hartley a donc dû choisir entre Calgary et la Suisse. Un choix facile.
Il a failli ne jamais voir la Suisse
Vous voulez un autre exemple d'une situation saugrenue vécue par Hartley?
Il y a un an, les dirigeants de l'Océanic de Rimouski lui ont offert l'entière direction de l'organisation. À l'instar de Patrick Roy à Québec, il aurait été le seul maître à bord.
Les conversations téléphoniques avec le président du conseil d'administration de l'Océanic, André Jolicoeur, ont bien tourné. Ils ont donc convenu de se rencontrer à Québec pour finaliser les choses.
En route vers Québec, le téléphone de Hartley a sonné. C'était un dirigeant de l'équipe de Fribourg, en Suisse, qui désirait lui offrir le poste d'entraîneur. Il s'est arrêté sur la route à une heure de Québec. Il a communiqué avec Jolicoeur pour l'aviser qu'il devait se rendre à Fribourg pour voir de quoi il en retournait, tout en lui promettant de lui revenir dans les plus brefs délais. En faisant route vers la maison, le téléphone a retenti à nouveau. Cette fois, drôle de hasard, c'était l'équipe de Zurich qui voulait lui parler. Au bout du compte, il a accepté la proposition des Lions de Zurich et l'Océanic est passé à un cheveu d'être dirigé par un gagnant de la coupe Stanley.
« Je suis souvent impliqué dans de drôles de circonstances, dit-il. Si Fribourg m'avait appelé une heure plus tard, j'aurais été en réunion avec les gens de Rimouski après avoir laissé mon appareil cellulaire dans l'auto. Les deux propositions de la Suisse seraient arrivées trop tard. »
Ce long détour l'a finalement mené à Calgary. Pourtant, il avait eu un entretien chaleureux avec le nouveau directeur général de Canadien. Il n'avait pas ressenti le moindre désintéressement de la part de Bergevin, bien au contraire.
Il l'avait rencontré en compagnie de son adjoint Larry Carrière, un homme qu'il avait connu brièvement, il y a 11 ans. Directeur général et entraîneur du Titan de Laval, il désirait acquérir le défenseur Philippe Boucher, premier choix au repêchage des Sabres de Buffalo qui évoluait avec les Bisons de Granby. Un dirigeant des Sabres, Carrière l'avait aidé à compléter cette transaction.
« Mon audition avec le Canadien s'est fort bien déroulé, rappelle-t-il. Marc et Larry étaient bien préparés. Marc a été extraordinaire avec moi. Il a dirigé habilement l'entretien. Je peux vous dire qu'il sera tout un directeur général avec le Canadien. »
Après cette rencontre, Bergevin a gardé le contact avec lui. Ils ont échangé des messages textes. Dès le lendemain de la nomination de Rick Dudley, ce dernier lui a donné un coup de fil qui a duré entre 30 et 40 minutes. Pour la seconde rencontre, qui devait avoir lieu cette semaine, Bergevin lui avait déjà confirmé qu'il serait accompagné de Carrière, de Dudley et de Scott Mellanby.
Il admet que l'intérêt manifesté par le Canadien l'a titillé. Il ne cache pas avoir ressenti une certaine excitation.
« Je suis un petit gars de l'Est de l'Ontario, explique-t-il. Dans la rue, j'ai remporté plusieurs coupes Stanley dans la peau d'un joueur du Canadien. Dans les buts (il est un ex-gardien de but), j'étais Ken Dryden. À l'avant, j'étais Guy Lafleur. L'attrait pour le Canadien était fort, mais Jay Feaster m'avait parlé il y a plusieurs semaines déjà. »
Il y avait une autre forme d'attrait pour Hartley. Le directeur général des Flames et lui, qui ont gagné ensemble la coupe Calder à Hershey, sont très liés, on le sait.
« Jay était mon président et directeur général à Hershey. Puis, je suis parti au Colorado et lui à Tampa Bay. Deux ou trois ans plus tard, il m'a appelé pour m'offrir d'être le parrain de son fils. Je ne crois pas qu'on puisse recevoir un témoignage de respect pour fort que celui-là », souligne-t-il.
Pincement au cœur
Hartley a franchement aimé la Suisse. Son équipe et ses joueurs encore davantage. Il est extrêmement heureux et soulagé de profiter d'une autre chance d'exercer son métier dans la Ligue nationale, mais il avoue ressentir encore un pincement au cœur à l'idée de ne plus les revoir.
« J'ai entretenu une belle relation avec mes joueurs. Il leur arrivait de m'appeler à la maison. Lors de ma dernière rencontre avec eux, ils m'ont demandé de ne pas partir. Il y a beaucoup d'intérêt pour la Ligue nationale en Suisse. Les gens portent les chandails de Sidney Crosby et d'Alex Ovechkin. Dès mon arrivée, j'avais prévenu les joueurs qu'on préconiserait le style de la LNH. Il me fallait changer la mentalité et les méthodes de travail. Pour eux, c'était une façon totalement différente de travailler. Ce n'était pas évident. Il m'a fallu gagner les joueurs un à un. Il y a toujours une mule ou un pur-sang qui se terre dans un coin. Il faut lui indiquer ou se trouve l'avoine », mentionne-t-il dans son style imagé.
Ses joueurs ont répondu d'une façon incroyable, comme le confirme le championnat qu'ils ont remporté contre toute attente. À Calgary, on croit que Hartley peut changer les choses, là aussi.
Débordement
L'attente du prochain entraîneur crée de la tension et alimente mille fausses rumeurs. Il arrive même qu'on assiste à de malheureux débordements.
Le collègue Tony Marinaro est tombé à bras raccourcis sur L'antichambre et ses panélistes à la suite de l'émission de jeudi où il a été question du choix qui attend Bergevin entre, supposément, Michel Therrien et Marc Crawford. Marinaro, qui m'a qualifié de raciste (rien de moins), a réussi à monter son auditoire contre ces francophones qui ne les comprennent pas. Pas ta meilleure émission, Tony.
J'admets que la presse francophone a un préjugé favorable pour Therrien, comme TSN 990 en a un pour Crawford, un analyste régulier à TSN.
En ce qui me concerne, j'ai déclaré que dans le cas de Crawford, il y a une énorme différence entre un entraîneur francophone, tel que le suggère Serge Savard, et un coach anglophone qui parle difficilement français. Méchant raciste, mon Tony.
Quand il apparaissait à L'antichambre l'an dernier, Marinaro se servait de son émission pour promouvoir ses propres apparitions. Maintenant qu'il n'y est plus, il voit les choses d'un angle différent.