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L'appel que n'attendait pas Ève Gascon

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MONTRÉAL – En d'autres circonstances, Ève Gascon n'aurait pas touché à ses jambières cette semaine. C'est la décision qu'elle avait prise il y a un an après la conclusion de sa première année en NCAA. Une pause pour reposer le corps et regénérer l'esprit.

Mais lorsque RDS l'a contactée en fin de journée mardi, Gascon rentrait à peine à la maison après une longue journée planifiée autour d'un passage à l'aréna et d'une présence en classe. Dix jours après l'élimination de son équipe en quart de finale du championnat national, elle continue de s'entraîner avec le personnel des Bulldogs de l'Université Minnesota-Duluth.

La gardienne québécoise ne vit pas un entre-saison normal.

Il y a deux semaines, alors qu'elle se trouvait dans l'État de New York pour un important match contre l'Université Cornell, Gascon a reçu un appel qu'elle n'attendait pas. Dans son oreille, la voix de Gina Kingsbury, la directrice générale de l'équipe nationale senior. Elle lui annonçait qu'elle faisait partie des trois gardiennes sélectionnées pour les Championnats du monde au mois d'avril en Tchéquie.

Il s'agit de sa première convocation avec l'équipe menée par Marie-Philip Poulin et Ann-Renée Desbiens. Elle fêtera ses 22 ans la veille du premier match contre la Finlande.

Quel rôle entend-on lui confier? Quelles seront les attentes envers elle? Que devra-t-elle mettre dans ses bagages? « Je vais être honnête, quand elle m'a dit que je faisais partie de l'équipe, j'ai un peu arrêté d'écouter! », s'exclame-t-elle.

L'appel de Kingsbury l'a prise par surprise pour plusieurs raisons. D'abord parce que selon ses expériences précédentes, Hockey Canada a l'habitude de faire ce genre d'annonce par courriel. Puis elle ne se croyait sincèrement pas dans les plans du programme senior. Sa saison était terminée tandis que les candidates habituelles gardaient la forme dans la LPHF. Durant l'hiver, elle n'avait pas non plus été considérée pour la Série de la rivalité.

« Quand j'ai vu que [Emerance] Maschmeyer s'est blessée, je me suis dit : ‘Ah, peut-être, ça serait le fun', mais je n'y ai pas plus pensé que ça. Quand j'ai eu l'appel, j'étais avec ma famille. Mes parents étaient là pour mon match avec ma tante. C'était vraiment un beau moment. On ne s'y attendait pas. Tu espères, mais je ne me faisais pas d'attente, je faisais mes petites affaires. Ça a bien tourné. »

Gascon n'est pas étrangère à l'environnement de Hockey Canada. Elle a participé au Mondial des moins de 18 ans en 2020. Elle a ensuite accumulé de l'expérience au sein de l'équipe de développement. Elle a pris part à un camp d'entraînement avec l'équipe senior l'été dernier.

Elle a longtemps rêvé aux Jeux olympiques de Milan Cortina en 2026. Plus le temps passait, moins l'objectif lui semblait réaliste.

« Avec les équipes qui ont été faites pour les Séries de la rivalité, je pensais que ça serait peut-être après les Jeux qu'ils allaient commencer à intégrer d'autres filles qui sortent de l'université ou qui sont encore à l'université pour les préparer aux Jeux de 2030. Plus ça allait, plus je me préparais mentalement pour ça. »

« C'est pour ça que j'étais plus surprise. Là je suis vraiment contente. Je n'ai pas d'autres mots. »

Grosse et bonne expérience

Gascon n'a quand même pas été invitée en équipe nationale par charité chrétienne. Elle vient de terminer une brillante deuxième saison à l'Université Minnesota-Duluth.

L'ancienne étoile filante des Olympiques de Gatineau a affiché la 15e meilleure moyenne de buts alloués (1,83) et le septième meilleur taux d'efficacité (,942) de la NCAA tout en évoluant dans la conférence la plus corsée du réseau universitaire américain.

En effet, les quatre dernières finales du championnat national de hockey féminin ont opposé des équipes de la Western Collegiate Hockey Association (WCHA). Cette année, trois des quatre équipes qui ont accédé au carré d'as en provenaient.

Ève Gascon

Gascon a joué douze matchs cette saison – plus du tiers de sa charge de travail totale – contre ces géants que sont Wisconsin, Ohio State et Minnesota.

« Honnêtement, pour un goaler, c'est vraiment bon. J'ai reçu quasiment 50 tirs chaque match que j'ai joué contre eux. Pouvoir aider mon équipe à gagner ces matchs-là, ça a été mon objectif toute la saison. »

Gascon exagère un brin, mais pas tant. Dans une série de deux matchs en autant de jours contre Ohio State en janvier, elle a collé des performances de 58 et 44 arrêts. Elle a livré deux matchs de 48 arrêts contre Minnesota. Son équipe a maintenu une fiche de 2-10 contre ses trois principales rivales, mais sept de ces matchs ont pris fin avec un écart d'un but. Et la gardienne n'a pas nécessairement profité d'un gros appui de son attaque.

« C'est de la grosse expérience. Plusieurs de ces filles-là jouent pour l'équipe nationale des États-Unis, alors j'apprends leurs tendances. C'est bon de ce côté-là. Ça m'amène de l'expérience pour quand je vais les affronter avec Hockey Canada. » 

« Des fois, c'est tough mentalement de jouer contre ces équipes où tu dois toujours causer une surprise, mais notre confiance était tout le temps là. On s'est rendues en prolongation contre Wisconsin. C'était du bon hockey. C'est juste de la bonne expérience. »

Il n'y a pas que Hockey Canada qui a noté les bonnes performances de la native de Terrebonne. Au terme de la saison, Gascon a été élue sur la première équipe d'étoiles de la NCAA. Elle a aussi été reconnue comme la gardienne de l'année dans la WCHA.

Étrangement, le titre de gardienne par excellence à l'échelle nationale lui a échappé au profit d'Ava McNaughton, qui joue elle aussi dans la WCHA avec l'Université du Wisconsin. Plusieurs ont relevé l'illogisme de la chose au moment de l'annonce. Gascon marche sur des œufs en commentant la question.

« Je fais attention à mes mots, je ne veux pas basher, mais si tu as devant toi une équipe avec les trois finalistes pour le [titre de joueuse de l'année] et la meilleure défenseuse... »

« À la fin de la journée, poursuit-elle, ce sont des honneurs qui ne servent pas vraiment à grand-chose. Pour moi, le vrai objectif, c'est d'aider ton équipe à gagner. Et je sais qu'après chaque match, les entraîneurs des équipes adverses avaient de bons mots pour moi. Ça, c'est plus gros pour moi. Les trophées, c'est juste du bonus. »

On peut dire aussi que Gascon a amplement de quoi se consoler depuis quelques jours.

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