Il est de notoriété publique que toute vérité puisse se révéler en se demandant « pourquoi » trois fois. Je crois que cette même démarche intellectuelle a sa raison d’être au moment d’évaluer les joueurs. Mon expérience acquise en recueillant des données pour le monde du hockey a souvent été de tenter de concilier l’inconciliable.

Alors qu’à Sportlogiq nous fournissons aux équipes des données précises et des taux de réussite se basant sur des séquences de jeu réelles, et ce, sur un grand laps de temps, les formations nous demandent fréquemment des évaluations chiffrées de la vitesse d’un joueur, de sa force physique, de son niveau de compétitivité et de son sens du hockey.

Comment? Comment chiffrer une perception? Est-il même possible de la chiffrer? Personne n’affirme que vitesse, puissance, compétitivité et sens du hockey ne soient pas importants, mais bien au contraire, ils sont primordiaux. Voilà pourquoi la prochaine question se doit d’être pourquoi sont-ils si importants?

En d’autres mots, pourquoi un joueur rapide est-il plus attrayant qu’un joueur plus lent? Pourquoi un joueur plus fort physiquement est-il plus alléchant qu’un joueur frêle? Pourquoi la compétitivité est-elle recherchée? Pourquoi le sens du hockey est-il important?

Bien que les réponses soient évidentes, il est tout de même nécessaire de s’y attarder. Un joueur rapide risque davantage de récupérer les rondelles libres, de battre ses adversaires à un contre un et d’avoir un meilleur positionnement sur la patinoire qu’un joueur plus lent. Un joueur plus fort physiquement est plus susceptible de remporter ses batailles pour la rondelle qu’un joueur plus frêle, alors qu’il sera également plus difficile de lui soutirer le disque. Un joueur plus compétitif sera davantage impliqué dans le jeu que les autres joueurs, il sera aussi plus susceptible de remporter ses batailles pour récupérer la rondelle et de fournir un deuxième effort. Un joueur ayant un bon sens du hockey lira mieux le jeu, lui permettant de récupérer les rondelles libres, d’intercepter les passes de l’adversaire et de bien se positionner défensivement.

Sachant pourquoi vitesse, puissance, compétitivité et sens du hockey sont recherchés, pourquoi les équipes persistent-elles à les évaluer sur la seule base de leur perception? Cette évaluation n’est pas efficace, celle-ci se basant sur des perceptions (sur le sens du hockey ou le niveau de compétitivité) plutôt que sur des résultats (passes, tirs, harponnages).

Il est temps de regarder au-delà des atouts physiques et d’analyser comment ceux-ci affectent le jeu. Pourquoi se questionner sur la vitesse d’un joueur, sans relever le nombre de fois qu’il récupère une rondelle libre comparativement aux autres joueurs? Pourquoi se questionner sur la force physique d’un joueur, sans regarder son taux de réussite lors des batailles à un contre un le long des rampes? Ou encore sa capacité à soutirer la rondelle à l’adversaire à l’aide de son bâton ou d’une mise en échec? Pourquoi se questionner sur la compétitivité d’un joueur, sans noter le nombre d’événements dans lequel il est impliqué lorsqu’il se trouve sur la patinoire? À quelle fréquence bloque-t-il un tir?

Les questions portant sur la vitesse, le niveau de compétitivité et la force physique sont importantes. Les équipes ont tout à fait raison de se questionner à ces sujets. Mon point est plutôt pourquoi ne pas poser des questions tangibles se basant sur des résultats quantifiables? Utilisons des données recueillies sur un joueur lors de séquences réelles afin de peaufiner les évaluations basées sur des perceptions.

À Sportlogiq, nous notons tous les jeux effectués en possession de la rondelle survenant lors d’une rencontre, et subséquemment tous les changements de possession. Plus précisément, nous relevons tous les tirs, toutes les feintes, toutes les réceptions de passe, tous les dégagements faits depuis le territoire défensif, tous les rejets de la rondelle en territoire adverse et toutes les récupérations de la rondelle lorsque celle-ci est libre. Défensivement, nous notons tous les harponnages, toutes les mises en échec, tous les tirs bloqués et toutes les passes bloquées. Pour chacun de ces événements, la localisation et le moment sont également notés.

Est-ce que ces données sur les joueurs sont en corrélation directe avec le succès d’un joueur ou d’une équipe? Comme nous analysons des séquences de jeu réelles, comment pourrait-il en être autrement?