MONTRÉAL – Une anomalie saute rapidement aux yeux quand on scrute la liste des accomplissements du Wild du Minnesota depuis le début de la saison.

En effet, quelque chose d’étrange s’est produit le 27 octobre. D’abord, la défaite. On la remarque immédiatement puisque le Wild en a subi très peu, trois pour être exact, au cours du dernier mois. Mais il y a plus.

Cinq buts encaissés? Tous dans la même période? Par une équipe qui n’en avait concédé que six à ses six parties précédentes? « C’était la première fois que je vivais quelque chose comme ça », se rappelle Jason Pominville, qui en est à sa dixième saison dans la Ligue nationale.

Ce soir-là, le Wild a été complaisant. À 20 minutes de décrocher sa quatrième victoire par jeu blanc de la campagne, il a jeté aux ordures une avance de trois buts alors qu’il n’en avait auparavant jamais accordé plus de deux dans un match complet.

L’effondrement aurait pu laisser des traces, mais une fois n’est pas devenue coutume. Outre cette petite exception, le Wild est un modèle à suivre en cette jeune saison dans le circuit Bettman.

« C’est probablement le seul match cette année dans lequel on a connu une période où ça a moins bien été », relate Pominville, de forte belle humeur lorsque rejoint par RDS cette semaine.

En 1895, l’écrivain britannique Oscar Wilde accouchait de L’importance d’être Constant, un classique du théâtre qui, plus d’un siècle après sa naissance, sied à merveille à l’équipe de hockey qui porte le nom de son auteur.

Voici la définition de la constance selon l’édition 2014 du Wild. Après dix matchs, la troupe de l’entraîneur Mike Yeo domine la LNH au niveau des buts accordés (1,8) et des tirs au but accordés (22,9) par rencontre. Elle a marqué le premier but d’une rencontre à huit occasions et n’a jamais été dominée au chapitre des tirs au but. Son unité de désavantage numérique montre un pourcentage d’efficacité de 89,3 %, le quatrième plus élevé de la LNH.

Ryan SuterLe même niveau d’excellence est observé en attaque alors que seulement deux équipes marquent à un rythme plus effréné que ses 3,4 buts par partie. Et cette efficacité n’est pas le fruit du hasard : en moyenne, le Wild défie les gardiens adverses 35 fois par partie. Seuls les Blackhawks de Chicago attaquent avec autant d’acharnement.

C’est à peu près le portrait de l’équipe qui sera en visite au Centre Bell samedi prochain.

« C’est sûr qu’on joue avec beaucoup de confiance, approuve Pominville, qui amorce sa deuxième saison complète au Minnesota. On est vraiment passé à un autre niveau vers la fin de la dernière saison. On est une équipe qui contrôle beaucoup plus souvent le jeu que par le passé. Nos défenseurs sont extrêmement impliqués dans l’attaque. Dès qu’on reprend possession de la rondelle dans notre zone, on est reparti dans l’autre direction. On n’est jamais sur les talons, on presse le jeu et on force l’adversaire à faire des erreurs. Notre échec-avant et notre jeu en zone centrale nous permettent de provoquer beaucoup de revirements. »

Le Wild, qui avait raté les séries éliminatoires lors des trois saisons précédentes lorsque Yeo en a pris le contrôle avant la saison 2011-2012, semble être arrivé à maturité. À l’expérience de jeunes trentenaires comme Mikko Koivu, Zach Parise et Pominville s’est ajoutée la fougue des Mikael Granlund, Jason Zucker, Charlie Coyle et Nino Niederreiter, quatre attaquants âgés de 22 ans qui occupent des rôles clés au sein des trois premiers trios de l’équipe.

Granlund, le neuvième choix du repêchage de 2010, évolue aux côtés de Parise et Pominville sur la principale unité à vocation offensive. Il est le deuxième attaquant le plus utilisé par Yeo et montre un différentiel de plus-5. Zucker, sélectionné en deuxième ronde la même année, domine le groupe avec sept points et met l’épaule à la roue en désavantage numérique.

Les deux autres ont été acquis par le biais de judicieuses transactions qui ont coûté, entre autres, Brent Burns et Cal Clutterbuck.

Une brigade défensive impliquée

La composition de la brigade défensive copie le même modèle. Le quatuor de tête, qui compte comme tête d’affiche Ryan Suter, est complété par Marco Scandella et Jared Spurgeon, chacun âgé de 24 ans, et du Suédois Jonas Brodin, 21 ans. Matthew Dumba, 20 ans, prend place sur la troisième paire.

Marco ScandellaPour expliquer les succès du Wild, Pominville vante l’implication bien mesurée de ce groupe au potentiel énorme.

« En général, on compte sur des attaquants responsables défensivement, ce qui permet à nos défenseurs d’être plus impliqués. Ils gardent beaucoup de rondelles vivantes le long des bandes en zone offensive et n’hésitent pas à prendre des chances à la ligne bleue adverse parce qu’ils savent que la plupart du temps, quelqu’un veille à l’arrière s’ils se font prendre. Notre top-4 a pris beaucoup de maturité depuis l’an dernier et représente vraiment une grosse partie de notre attaque. »

Scandella, un ancien des Foreurs de Val-d’Or, impressionne particulièrement Pominville. Le Montréalais n'a toujours pas terminé un match avec un différentiel négatif depuis le début de la saison, son cumulatif de plus-9 est le plus élevé de l’équipe et ses 21 tirs bloqués le placent au deuxième rang parmi les défenseurs de la formation derrière Spurgeon, son partenaire de jeu.

« On pourrait s’obstiner là-dessus, mais durant les séries, il a probablement été notre meilleur défenseur. Il a énormément gagné en confiance et notre trio adore jouer avec Spurgeon et lui, qui se connaissent depuis leurs débuts dans la Ligue américaine. On sait qu’ils vont joindre l’attaque et nous donner la rondelle. Ils jouent très bien ensemble. »

Et Yeo, qui n’avait jamais dirigé dans la LNH avant de devenir le troisième entraîneur de l’histoire de la formation, semble superviser le travail de tout ce beau monde d’une main de maître. Son équipe semblait au bord de la noyade après le raz-de-marée qui l’a emportée à New York. Le lendemain, à Boston, elle perdait 3-1 après deux périodes avant que de marquer trois fois sans riposte en troisième.

Pominville se souvient que c’est une bouée lancée à la mer par son entraîneur qui a permis au Wild de revenir sur le sommet de la vague, sur laquelle il n’a pas cessé de surfer depuis.

« Ce soir-là, il a vraiment fait de bons ajustements dans la dernière période. On avait réalisé une couple d’affaires que les Bruins faisaient et je pense qu’on les a pris par surprise un peu. »

« C’est vraiment un bon gars, poursuit celui qui a joué 623 matchs sous les ordres de Lindy Ruff avec les Sabres de Buffalo. Il est vraiment près de ses joueurs. S’il a quelque chose à te dire, il va t’amener dans un coin et t’en parler en privé. Il n’est pas le genre de coach à faire une scène devant tout le monde. On aime jouer pour lui parce qu’on sait qu’il va nous supporter et si tu lui en donnes, il va t’en donner. Il est vraiment honnête. C’est facile de jouer pour un gars comme lui. »

L’intégration de Vanek

Au Minnesota, l’évolution récente du Wild s’est faite sous le signe de la stabilité. Au cours de l’été, très peu de changements ont été apportés à l’équipe qui s’est inclinée en six matchs devant les Blackhawks au deuxième tour des séries éliminatoires. Mais l’un d’eux ne fut pas négligeable.

Timide contribuable lors de ses trois années dans la région, Dany Heatley a fait ses valises et a laissé sa place, dans le vestiaire et sur la masse salariale, à Thomas Vanek, bien connu ici pour son passage éclair à Montréal le printemps dernier.

Vanek a commencé son mariage de trois ans avec le Wild de la même façon qu’il avait terminé son flirt avec le Canadien. Il a passé le mois d’octobre au grand complet en quête de son premier but de la saison, qui est finalement venu samedi dernier, à son dixième match avec sa nouvelle équipe.

Mais n’empêche, avec ses sept mentions d’aide, l’Autrichien est présentement le deuxième meilleur pointeur de l’équipe qui occupe le troisième rang au classement de la division Centrale.

« C’est pas mal le même gars, confie Pominville, qui a grandi avec Vanek dans l’organisation des Sabres. L’an passé, ça a été une année difficile pour lui avec tous les déménagements. Mais c’est le même joueur qu’il a toujours été, je ne m’attends pas à ce qu’il change sa façon de jouer. C’est un marqueur, un bon gars devant le filet qui va aider votre attaque à cinq... En général, il apporte ce qu’on attendait de lui. »

Vanek, un ancien de l’Université du Minnesota, évolue principalement avec Coyle et Koivu depuis son retour au bercail.

« Il s’est intégré assez facilement, affirme Pominville. Comme il a des racines dans le coin, il patine avec quelques gars durant l’été, alors on était plusieurs à le connaître. Et puis quand un gars veut venir jouer à quelque part, c’est toujours plus facile. C’est un bon gars d’équipe et on n’a pas eu de problème avec lui. »