Si les Hurricanes de la Caroline en avaient le pouvoir, ils recommenceraient volontiers leur saison alors qu’ils demeurent à la recherche d’un premier triomphe après huit matchs.

Mais la réalité du sport professionnel ne pardonne pas et l’entraîneur adjoint Rod Brind’Amour se démène avec autant de volonté qu’à son époque de joueur pour aider les siens. Après des efforts en vain la saison dernière pour y arriver, les Hurricanes ont indiqué la porte de sortie à l’entraîneur Kirk Muller, mais Brind’Amour n’a pas été sacrifié dans ce ménage et il entame sa quatrième saison dans ses fonctions. 

L’ancien capitaine des Canes a plutôt obtenu la chance de venir travailler derrière le banc de l’équipe, ce qu’il n’accomplissait pas par le passé.

Pour le moment, le coup de barre effectué par Ron Francis, le nouveau vice-président exécutif et directeur général, n’a pas permis de trouver un océan plus facile à naviguer pour les Hurricanes. Reconnu pour sa persévérance, Brind’Amour s’accroche à ce qu’il peut dont un retour à domicile après un pénible voyage de cinq défaites dont une en tirs de barrage.

« On sait tous que notre début de saison est laborieux, mais on espère renverser la vapeur. C’est toujours agréable de revenir à la maison après un long séjour à l’étranger, mais ce l’est encore plus à la suite d’une séquence difficile comme celle-ci », a admis Brind’Amour en entrevue au RDS.ca.

En 20 saisons et plus de 1484 parties régulières dans la LNH et une conquête de la coupe Stanley avec les Hurricanes en 2006, Brind’Amour a démontré qu’il ne cherchait jamais d’excuses. Ceci dit, il ne peut guère s’empêcher de pointer les nombreuses blessures affectant l’organisation pour expliquer une partie des déboires. On ne peut pas le blâmer pour cette analyse puisque la malchance s’est notamment abattue sur Eric Staal, Jeff Skinner, Nathan Gerbe et Jordan Staal (dont le retour n’est pas prévu avant janvier).

« On ne peut jamais utiliser des excuses, mais c’est évident que les blessures ont nui à notre départ. Outre cela, certains de nos joueurs n’ont pas contribué à la hauteur de leur talent. Nous formons pratiquement la même équipe que l’an dernier et nous avions besoin que chaque joueur élève son jeu d’un cran pour obtenir plus de succès que la saison dernière, mais ce n’est pas encore arrivé », a déploré Brind’Amour avec franchise.

L’ancien attaquant ne se gêne donc pas pour critiquer certaines pièces maîtresses du club. Parmi elles, le Russe Alexandre Semin s’attire des reproches et il pourrait écoper samedi soir face aux Coyotes.

« C’est difficile parce qu’il s’avère l’un de nos meilleurs joueurs et nous avons besoin qu’il joue bien. C’est la seule façon de gagner dans cette ligue, tu dois pouvoir miser sur tes atouts de premier plan. Il doit être aussi bon qu’il peut l’être à tous les matchs et pas seulement pendant quelques présences ici et là », a justifié le père de quatre enfants.

Derrière une formation chancelante comme celle-ci, une tenue exemplaire des gardiens Cam Ward et Anton Khudobin pourrait sauver la mise ou du moins permettre de récolter quelques précieux points supplémentaires, mais leur rendement n’est pas à la hauteur.

« C’est un autre aspect de notre jeu qui doit s’améliorer. Quand les choses se mettront en place, nous serons au niveau que nous visons », a assuré celui qui avait été repêché au neuvième rang par les Blues de St. Louis en 1988.

Tout n’est pas sombre dans le paysage des Hurricanes et quelques signes encourageants peuvent être décelés dont chez certains jeunes de l’équipe. Cependant, l’élément le plus réjouissant concerne le retour en force d’Eric Staal qui avait raté cinq rencontres.Eric Staal, Bill Peters et Rod Brind'Amour.

« Évidemment, c’était une énorme perte pour nous. Il a été très bon mardi soir et nous aurons d’autres joueurs en renfort bientôt. Tranquillement, on commencera à ressembler à notre vrai visage et on pourra progresser ensuite », a-t-il expliqué au sujet de celui qui lui a succédé en tant que capitaine.

Étant donné que les Canes n’ont pas participé aux éliminatoires lors des cinq saisons précédentes, Staal se fait parfois pointer du doigt pour son influence mitigée sur sa troupe.

« Quand une équipe ne gagne pas, la critique est facile et les journalistes le savent mieux que quiconque. C’est un phénomène naturel et il doit être notre meilleur joueur tous les soirs. Il doit le démontrer par son travail et il le sait très bien. C’est un bon ami à moi et un ancien coéquipier donc nous avons de bonnes conversations ensemble et il sait ce qu’il doit accomplir », a précisé Brind’Amour en se montrant rassurant.

Un style différent de celui de Muller

Ayant résisté à la vague de changements au sein du personnel d’entraîneurs chez les Hurricanes, Brind’Amour peut aisément comparer le boulot accompli par Peters et son prédécesseur.

Kirk Muller et Rod Brind'Amour« Ils sont différents dans le sens que Kirk (à gauche sur la photo) avait une approche plus axée sur les joueurs à la suite de son long parcours dans la LNH. Quant à Bill, c’est un entraîneur de carrière, donc il parle du hockey avec un autre vocabulaire et il l’enseigne d’une façon différente aussi, mais ça n’empêche pas que les deux méthodes sont bonnes », a-t-il analysé.

Brind’Amour s’empresse d’ajouter qu’il est épaté par ses facultés.

« Il est extrêmement intelligent. En fait, il est presque trop intelligent si bien que je dois parfois essayer de le rattraper tellement il est brillant! Mais il nous rend meilleurs, ça ne se voit peut-être pas encore, mais on remarquera les bénéfices prochainement », a vanté l’auteur de 1184 points avec les Blues, les Flyers et les Hurricanes.

Brind’Amour est ravi de pouvoir poursuivre son apprentissage du métier derrière le banc. De plus, il a hérité de certaines responsabilités sur les unités spéciales et particulièrement à propos du jeu de puissance. Lentement, mais sûrement, il semble s’approcher d’un poste d’entraîneur-chef sauf qu’il refuse de se déclarer prêt pour cette aventure exigeante.

« C’est un métier si difficile et tellement stressant. Quand une équipe gagne, le mérite revient surtout aux joueurs et quand elle perd, on vise plus les entraîneurs. C’est un niveau de stress si différent que celui d’un joueur alors que tu te défonces sur la patinoire et tu passes au prochain match. En tant qu’entraîneur, tu prépares ton équipe et tu réfléchis à la prochaine partie, mais en repensant à la dernière… C’est très exigeant et l’entraîneur-chef écope du plus gros fardeau », a-t-il d’abord rappelé.

« Je ne sais pas encore à quoi j’aspire. Je suis un Hurricane et je souhaite simplement aider cette équipe à retrouver son niveau antérieur. Nous sommes plutôt dans le fond du baril présentement, mais ce n’est pas le temps d’abandonner le navire. Je veux contribuer à la relance », a détaillé Brind’Amour.

Malgré une carrière aux nombreux sacrifices et des revenus considérables engrangés, Brind’Amour s’est accordé une minuscule année de repos avant d’entamer ce nouveau chapitre d’entraîneur. À l’occasion, il se demande lui-même pourquoi il a agi si promptement.

« Je me le demande ça aussi parfois », a-t-il lancé en riant.

« Dans un monde parfait, j’aurais sûrement attendu que tous mes enfants aient complété leur école secondaire, mais je ne suis pas du style à m’asseoir et ne rien faire. Je préfère m’investir chaque jour pour créer du positif dans ce que je m’implique », a conclu celui qui n’a probablement pas apprécié patienter plus de 1100 minutes au banc des punitions.