Trophée Calder : Faber brouille les cartes
MONTRÉAL – Connor Bedard partait largement favori dans la course au titre de recrue de l'année en début de saison l'automne dernier.
L'avance était telle que le nom du sauveur des Blackhawks de Chicago et tout premier choix du dernier repêchage était pratiquement déjà gravé sur le trophée Calder.
Les Adam Fantilli, Leo Carlsson, Logan Cooley sans oublier Luke Hughes, le dernier venu, mais non le moindre, de la famille qui a donné Quinn aux Canucks et Jack aux Devils, étaient condamnés à se battre pour la deuxième marche du podium.
Au Minnesota, les espoirs de voir un joueur du Wild se faufiler dans cette course étaient associés à l'Autrichien Marco Rossi.
Rossi connaît une bonne saison. Avec 14 buts marqués et 29 points récoltés jusqu'ici, il occupe d'ailleurs le troisième rang des marqueurs chez les recrues. Sa candidature mérite donc d'être évaluée.
Mais Rossi, comme tous ceux initialement identifiés comme principaux rivaux à Connor Bedard, ont été rejoint et dépassé par le défenseur Brock Faber avec qui l'Autrichien partage le vestiaire du Wild.
Choix de deuxième ronde (45e sélection) des Kings de Los Angeles en 2020, Brock Faber est en train de brouiller les cartes.
Meilleur défenseur recru jusqu'ici cette saison, Faber, malgré ses 21 ans, s'est hissé parmi les meilleurs arrières de la LNH tout court. Il présente des statistiques intéressantes – ses 29 passes et 33 points le placent aux 14e et 16e rangs chez les défenseurs – mais c'est surtout son temps d'utilisation moyen de 25 min 4 sec par match qui impressionne.
Une moyenne qui lui permet de coiffer Cale Makar de l'Avalanche du Colorado par une seconde au huitième rang des défenseurs les plus utilisés de la LNH jusqu'ici cette saison.
Revenu au jeu jeudi après qu'il eut raté 14 matchs en raison d'une fracture de la mâchoire, Connor Bedard devrait rapidement reprendre l'avance que Faber avait réduite pendant son absence.
Il pourrait donc éviter le coup dur que Connor McDavid a encaissé, en 2016, lorsqu'une blessure l'a privé du trophée Calder. Malgré 16 buts marqués et 48 points récoltés en 45 matchs, McDavid avait terminé la course au troisième rang derrière Artemi Panarin et Shayne Gostisbehere.
Le retour de Bedard et le spectre que la course au trophée Calder soit à nouveau qu'une formalité sont loin de faire perdre le sourire au jeune défenseur du Wild.
« Le simple fait d'entendre mon nom mentionné dans cette course est un honneur auquel j'étais loin de m'attendre. C'est vraiment cool. Ça me fait sourire. Mais en ce moment, la course aux séries est bien plus importante à mes yeux que la course au trophée Calder», a témoigné le jeune défenseur croisé dans le vestiaire du Wild, la semaine dernière, au Minnesota.
Objectifs déjà surpassés
Assis devant son casier, prenant bien son temps pour retirer son équipement, Faber jette un regard admiratif en direction du gardien Marc-André Fleury.
Dans quelques heures, avant le match qui l'opposera à ses anciens coéquipiers des Penguins, Fleury sera honoré pour ses 552 victoires qui le placent au deuxième rang dans l'histoire de la LNH – derrière Martin Brodeur – et le plateau des 1000 matchs qu'il vient de fracasser.
Faber, qui venait de célébrer son premier anniversaire de naissance lorsque Fleury a amorcé sa carrière, à Pittsburgh, semble savourer le moment tout autant que le gardien québécois.
« Je joue au hockey depuis que je suis petit et comme tous les jeunes j'ai toujours rêvé de me rendre un jour dans la Ligue nationale; y jouer de grosses minutes afin d'aider mon équipe à gagner », que l'arrière originaire du Minnesota explique.
Mais à son arrivée au camp d'entraîmement, l'automne dernier, malgré toute la confiance qui l'habite, une confiance sur laquelle il comptait pour réaliser ses rêves de jeunesse, Brock Faber visait tout simplement un poste régulier.
« C'est bien beau la confiance en soi. C'est bien beau les rêves. Mais en même temps, il faut réaliser à quel point il est difficile de percer dans la LNH. À quel point il est important de franchir les étapes une à la fois », a-t-il plaidé.
Comment a-t-il pu largement dépasser ses objectifs en devenant aussi rapidement la pierre d'assise de la défensive du Wild?
Par accident!
Bien que la haute direction tenait à prendre le temps nécessaire pour développer Faber que le directeur général Bill Guerin a acquis des Kings avec un choix de première ronde en 2022 – l'attaquant suédois Liam Ohgren – l'entraîneur-chef Dean Evason d'abord et son successeur John Hynes ensuite ont dû accélérer le rythme.
« Les blessures subies par Jared Spurgeon et Jonas Brodin ont créé des vides importants. Il fallait combler les grosses minutes et les minutes difficiles qu'ils passaient sur la patinoire contre les meilleurs des autres équipes. On a donc été obligé d'en donner de plus en plus à Brock. Plus on lui en donnait, plus il relevait les défis. Le plus impressionnant n'est pas qu'il ait réussi à combler les absences, mais bien que depuis 25 matchs, il s'est ancré au sein de notre premier duo et qu'il s'impose dans toutes les facettes du jeu », a souligné John Hynes lorsqu'on lui a demandé d'expliquer l'ascension en flèche de son jeune arrière.
Samedi après-midi, Brock Faber et ses coéquipiers du Wild recevront les Sabres de Buffalo au Xcel Energy Center.
Si le retour en force et en forme de Connor Bedard scelle pratiquement l'issue de la course au trophée Calder, la course aux séries sera tout aussi difficile à gagner.
Le Wild accuse cinq points de retard sur les Blues de St. Louis et la deuxième des deux places réservées aux clubs repêchés.
Mais avant de penser aux Blues et aux Kings – ils affichent 60 points eux aussi, mais ont deux matchs en mains sur St. Louis – Brock Faber et ses coéquipiers doivent d'abord rejoindre et dépasser le Kraken de Seattle et les Predators de Nashville qui les devancent par un point.
Cela dit, peu importe les résultats des courses au trophée Calder et aux séries, les exploits multipliés par Brock Faber depuis le début de l'année hissent le jeune défenseur au sein des meilleurs espoirs de la LNH à la ligne bleue.
Ce qui est déjà une belle victoire en soit.