Audrey-Anne Veillette a le couteau entre les dents
MONTRÉAL – Dans les six marchés de la LPHF, les camps d'entraînement ont été lancés. Les joueuses qui ont participé à la saison inaugurale du circuit sont de retour après un entre-saison qui s'est étiré sur cinq mois. Pour les recrues fraîchement repêchées, c'est la fin d'un décompte mental qui s'est amorcé en juin.
Audrey-Anne Veillette, elle, attend ce moment depuis un an et demi.
L'attaquante de la Charge d'Ottawa a le couteau entre les dents. À pareille date l'an dernier, une blessure à un genou la reléguait à un rôle de figurante au sein de l'équipe qui l'avait sélectionnée en 15e ronde du repêchage inaugural de la ligue. Gagner sa place et prouver sa valeur parmi les meilleures joueuses au monde? Sa tête n'était pas là du tout.
« J'avais même de la misère à marcher », se remémore-t-elle.
Entre Montréal et Ottawa, Veillette a passé le premier hiver de sa vie post-universitaire à suivre patiemment les étapes de sa réhabilitation. Au mois de mars, les feux ont tourné au vert. Elle a signé un contrat de joueuse réserviste. Elle a commencé à s'entraîner avec ses coéquipières, mais n'était pas admissible les jours de matchs. « J'avais un pied en dedans, un pied en dehors », illustre-t-elle. Jusqu'à la fin, la patience et la modération sont restés les thèmes de sa saison.
« Quand je suis partie, ce n'était pas la vraie Audrey-Anne. En ce moment, c'est la vraie Audrey-Anne que je montre. »
« Depuis le jour qu'ils m'ont repêchée, c'est ça mon objectif, poursuit l'ancienne attaquante vedettes des Carabins de l'Université de Montréal. Je ne savais pas si j'allais jouer l'année passée. Ce n'est pas à ça que je pensais, je pensais déjà à cette saison. Moi, je viens pour la dernière place, je viens pour faire ma place. Je n'ai pas de plan B, c'est mon plan A. Ca fait assez longtemps que je me prépare pour ça, je suis vraiment prête. »
Lorsqu'elle parle de la « dernière place », Veillette fait référence au portrait mathématique qui se présente à elle au camp de la Charge. L'équipe de la capitale canadienne a présentement 20 joueuses sous contrat sur les 23 places qui seront comblées dans son effectif final. Douze d'entre elles sont des attaquantes. Les postes à pourvoir sont rares.
Elles seront trois qui batailleront pour le titre provisoire de treizième attaquante. La Québécoise sera en compétition avec Taylor House, une Américaine de 26 ans qui a passé la dernière année avec le club de MoDo en Suède, et Mannon McMahon, 23 ans, qui vient de terminer une carrière de cinq saisons avec l'Université de Minnesota-Duluth. Cette dernière a été un choix de cinquième ronde d'Ottawa au repêchage de 2024.
On peut présumer que Veillette part avec une longueur d'avance. Elle est connue du personnel d'entraîneurs, a déjà des atomes crochus avec ses coéquipières et est familière avec l'environnement de l'équipe. La saison dernière, même vécue dans la marge, l'a aussi aidée à se faire une tête sur les exigences de la ligue. « J'étais définitivement moins stressée cette année en entrant au camp », confirme-t-elle.
Mais les limites de sa zone de confort sont bien définies. « Tout se joue au camp. C'est sûr que le fait d'avoir été avec l'équipe l'an passé, on me connaît. Mais de là à dire que j'ai un avantage sur les deux autres, je ne sais pas. Je pense que tout va se jouer au camp et surtout sur les deux matchs qu'on va jouer à Montréal », entrevoit-elle.
Effectivement, la Charge d'Ottawa et le Fleet de Boston seront à Verdun la semaine prochaine pour participer à un mini-camp auquel participera également la Victoire de Montréal. Chaque équipe y jouera deux parties préparatoires. Elles auront ensuite cinq jours, après la conclusion de l'événement, pour faire connaître leur formation finale.
« Les pratiques c'est important, mais les deux matchs je pense qu'ils vont être cruciaux », anticipe Veillette.
Là aussi, la native de Drummondville pourrait jouir de l'avantage de la familiarité. Depuis quatre ans, elle complète ses entraînements estivaux au Centre 21.02 qui jouxte le vieil auditorium de Verdun. Cette année, elle a remarqué un achalandage inhabituel dans les installations du boulevard LaSalle. « Les autres étés, on était comme cinq ou six. Les filles d'Équipe Canada partent souvent l'été pour des camps. Mais là je ne sais pas ce qui s'est passé. Tout le monde a eu le mémo de venir à Montréal. » Elle estime qu'elles étaient près d'une vingtaine de joueuses sur la patinoire du centre en septembre et en octobre. « Je n'ai jamais vu ça auparavant. »
C'est dans ce contexte qu'elle a pu continuer de façonner la joueuse qu'elle veut devenir au niveau professionnel. Après avoir marqué 26 buts en 22 matchs à sa dernière saison avec les Carabins, elle est consciente qu'elle ne pourra aider son équipe de la même façon dans la LPHF. Son entraînement estival a surtout été consacré à l'apprentissage des rudiments du jeu physique et à une exécution plus rapide du jeu.
Tout ça, elle l'espère, lui permettra de passer un deuxième pied dans l'embrasure où elle s'est retrouvée immobile, bien malgré elle, la saison passée. Ensuite, elle partira à la recherche d'autres portes à défoncer.
« Je veux jouer dans la ligue. On le sait, il y a beaucoup de blessures. Le malheur des uns fait le bonheur des autres, comme on dit. C'est ça la business du hockey, c'est une game d'opportunités. Même si je commence comme treizième attaquante avec le dernier contrat qu'il reste, il y a toujours possibilité de monter après. C'est comme ça que je le vois. »