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Nouvelle règle, nouveau casse-tête pour Kori Cheverie

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MONTRÉAL – Au milieu de la deuxième période du match préparatoire entre la Victoire de Montréal et le Fleet de Boston, mercredi, Clair DeGeorge faisait le guet devant le demi-cercle de sa gardienne Ann-Renée Desbiens tandis que ses coéquipières Claire Dalton et Dara Greig couvraient chacune leur secteur de la zone défensive en haut des cercles de mises en jeu.

L'image avait de quoi saisir : trois attaquantes qui se démenaient du mieux qu'elles le pouvaient pour limiter les dégâts en infériorité numérique.

Le déploiement atypique n'était pas le fruit d'une réflexion profonde et révolutionnaire de l'entraîneuse Kori Cheverie. Il était le résultat d'un nouveau règlement approuvé en vue de la deuxième saison de la Ligue professionnelle de hockey féminin.

Baptisée le « No Escape Rule », cette nouvelle innovation de la LPHF oblige une équipe qui se retrouve en désavantage numérique à purger le début de sa peine avec les mêmes joueuses qui étaient sur la glace lorsque le coup de sifflet de l'arbitre s'est fait entendre.  

En empêchant une équipe punie d'employer ses spécialistes en défensive ou d'envoyer des forces fraîches à un moment où la tradition et le gros bon sens le requièrent, la Ligue espère offrir à ses équipes les conditions gagnantes afin qu'elles génèrent plus d'offensive. C'était du moins l'interprétation des représentantes de la Victoire après avoir testé – ou subi – la nouvelle règle pour la première fois.

« C'est pour ça que [Mikyla] Grant-Mentis a joué en défense! Je ne demanderais jamais à Grant-Mentis de jouer en défense », s'est exclamée Cheverie, rieuse, en faisant référence à une autre occasion où une attaquante à caractère offensif s'est retrouvée malgré elle au cœur d'une mission défensive.

Cheverie a révélé avoir été informée de l'implantation du nouveau règlement deux jours seulement avant le premier match préparatoire de son équipe. Ses joueuses ont été éduquées sur ses grandes lignes quelques heures avant de sauter sur la glace pour affronter le Fleet.

« Dans la vie, il est toujours préférable de recevoir de l'information nouvelle dans un délai raisonnable. Mais on joue avec les cartes qui nous sont distribuées, a philosophé la stratège. Je suis une personne qui aime l'ordre et la structure, mais je ne déteste pas quand on envoie un peu de chaos dans mon cerveau. Ça nous force à trouver des solutions et ça démontre aux joueuses que c'est correct de ne pas toujours avoir les bonnes réponses en claquant des doigts. »

Cheverie a admis que l'assimilation en direct de nouveaux paramètres a causé de légers courts-circuits dans sa tête et dans celles de ses adjoints. Pour les entraîneurs, un nouveau règlement est une occasion de trouver une occasion d'en décoder les failles, de déjouer le système.

Le « No Escape Rule » soulève la possibilité de nombreux scénarios. Les équipes ciblées par une pénalité à retardement seront sans doute tentées de trouver un moyen sécuritaire de changer leurs effectifs avant que le sifflet de l'arbitre ne se fasse entendre. Il y aura aussi une part de risque à gérer pour effectuer les premiers changements après la reprise du jeu. Évidemment, une équipe avec une joueuse en moins pourra toujours s'éviter des problèmes en gagnant la mise en jeu et en dégageant son territoire promptement.

« Maintenant, le désavantage numérique est un peu comme mon nouveau dada, confesse Cheverie. C'est la facette des unités spéciales sur laquelle j'adore travailler. Elle vient maintenant avec un nouveau degré de difficulté. Toutes les joueuses feront partie de nos rencontres sur le sujet maintenant en sachant qu'elles pourraient avoir un rôle à y jouer! Tout le monde devra savoir gagner une mise en jeu, tout le monde devra pouvoir se débrouiller en défensive. Je suis certaine qu'elles n'avaient pas pensé que ça serait leur nouvelle réalité en devenant des joueuses professionnelles. Mais c'est un autre défi qu'on accepte de relever. »

La patronne du banc montréalais déplore toutefois le fait que les joueuses dont c'est le pain et le beurre de neutraliser l'adversaire à 4 contre 5 auront potentiellement moins d'occasions de se mettre en valeur, une tendance qui avait déjà commencé à se dessiner l'an dernier lorsque la LPHF avait décidé de récompenser les équipes qui marquaient un but en désavantage numérique. Elle craint aussi les conséquences fâcheuses qui pourraient découler de présences interminables imposées à des joueuses fatiguées.  

Aussi, la mise en pratique de la nouvelle règle exposera peut-être des bogues qui incitera à des modifications. Par exemple, en fin de deuxième période mercredi, une pénalité a été décernée à une joueuse du Fleet juste avant l'un des trois temps d'arrêt obligatoires pour les besoins des équipes de télédiffusion. Montréal a ainsi perdu l'avantage qui aurait dû lui revenir en amorçant son jeu de puissance contre des rivales à bout de souffle.

« C'est donc à souhaiter qu'on écope de beaucoup de pénalités avant ces temps d'arrêt! », a ironisé Cheverie.

« Ultimement, on doit faire notre travail dans les conditions qui nous sont imposées, s'est résignée plus sérieusement la coach. On n'est pas obligées d'aimer ça, mais la Ligue a introduit un règlement et c'est à nous de faire de notre mieux pour y répondre avec les bonnes stratégies. »