Boxe olympique à Paris : le podium de Wyatt, l'apport de Tammara

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COLLABORATION SPÉCIALE

Après l'énorme déception de l'élimination de la grande favorite des 75 kg chez les femmes, Tammara Thibeault, le Néo-Écossais Wyatt Sanford a pris la mesure du champion du monde en titre de Tashkent UZB 2023, Ruslan Abdullaev, 21 ans, et membre de la puissante équipe de l'Ouzbékistan, par 4 juges contre 1.

Sanford, bien conseillé à ces Jeux olympiques par ses entraineurs Vincent Auclair et Samir El Mais, a su s'ajuster au deuxième après un premier round difficile pour dominer Abdullaev au troisième et dernier round et obtenir la faveur des juges.

C'est la première défaite à Paris pour un membre de l'escouade ousbek qui a remplacé Cuba, depuis plusieurs années, comme la meilleure équipe de boxe amateur au monde.

Par cette victoire inattendue, sa deuxième dans ce tournoi olympique après avoir dominé le Bulgare Radoslav Rosenov 5-0 en préliminaire, le Canadien de 25 ans est assuré d'une médaille à ces JO pour la première fois depuis l'argent d'un autre Néo-Écossais, David Defiagbon, chez les moins de 92 kg à Atlanta, en 1996.

Il s'agit maintenant de déterminer la couleur de cette médaille précieuse, mais la demi-finale s'annonce comme un défi de taille.

En effet, c'est le grand favori local de 29 ans, capitaine de l'équipe nationale de France Sofiane Oumiha, qui sera dans le coin opposé dans le prestigieux Stade Roland-Garos ce dimanche.

Le Français, qui a déjà une fiche de 5-0 (3 K.-O.) chez les professionnels n'a pas perdu un combat depuis Tokyo 2021 en 28 sorties. C'est la troisième participation de Sofiane à des Jeux olympiques. À Rio en 2016, il a remporté la médaille d'argent après avoir éliminé Teofimo Lopez en préliminaires. À Tokyo en 2021, il a été éliminé à sa première sortie contre l'éventuel médaillé d'argent, l'excellent l'américain Keyshawn Davis.

Sanford, qui connait une année phénoménale, a remporté l'or aux Jeux Panaméricains à Santiago du Chili l'automne dernier en éliminant le grand favori en préliminaire, le Cubain Lazaro Alvarez, double médaillé de bronze aux JO, à Rio 2016 et Tokyo 2020.

Sanford contre Sofiane dimanche pour une place en finale, il ne faut pas manquer ça! Je peux tellement imaginer l'anxiété et en même temps la fierté d'Angela Sanford, la mère de Wyatt, avec qui j'ai siégé sur le bureau des directeurs de Boxe Canada pendant trois ans. Je suis très heureux pour cette grande bénévole dévouée.

Tammara Thibeault s'incline lors des préliminaires

C'est une Tammara dévastée qui a rencontré les médias après sa défaite contre Cindy Ngamba qui représente peut-être l'équipe des réfugiés à Paris, mais qui, dans les faits, est complètement encadrée dans l'équipe de Grande-Bretagne.

Après avoir remporté l'or aux Championnats du monde à Istamboul en 2022, aux Jeux Panaméricains en 2023 et avoir été parfaite à ses 25 derniers combats depuis Tokyo en 2021, elle était largement favorite pour l'or à Paris.

C'est une défaite par trois juges contre deux à l'issue d'un combat partagé qui s'est décidé au troisième round, alors que la Camerounaise d'origine a réussi à fermer la distance pour éliminer l'avantage de la portée de la Québécoise.

Tammara Thibeau a porté tout le programme de l'équipe nationale du Canada sur ses épaules depuis Rio. Durant tout le dernier cycle olympique, par ses performances internationales, elle a permis de rêver à une médaille en boxe pour le Canada et c'est la raison principale pour laquelle son équipe nationale a pu obtenir un solide financement par l'organisme gouvernemental « À nous le podium ».

Tout le programme national de boxe canadien doit être extrêmement reconnaissant de l'apport de cette grande athlète.

Finalement, le Canada va ramener une médaille olympique au Canada et on peut parler de mission accomplie. Ce n'est peut-être pas celle qu'on attendait, mais Tammara y aura énormément contribué.

J'espère qu'on réussira à la convaincre de profiter du reste de son séjour à Paris pour qu'elle puisse vivre pleinement de cette grande fête du sport international. Éventuellement, en perspective, elle va réaliser que ce n'est pas un cliché quand on dit que le plus important dans la vie, c'est le voyage et non la destination.

Le grand Mohammed Ali a jeté dans le fleuve Ohio sa médaille d'or olympique, remportée à Rome dans la division des mi-lourds en 1960, après avoir été refusé dans un restaurant réservé aux blancs. Choisi pour allumer la vasque olympique à Atlanta en 1996 et rencontré à la cafétéria du village olympique, il prend un siège devant moi et Gaby Mancini pour déjeuner. Gaby et lui qui partageaient le même dortoir dans le village des athlètes à Rome.

Ils ont ri de bon cœur en se rappelant de nombreuses anecdotes et souvenirs de leurs participation aux Jeux olympiques. Tous deux ont parlé d'un moment marquant de leur vie respective. On peut perdre, vendre ou lancer une médaille dans le fleuve, mais les souvenirs, on les garde pour toute la vie.

Thibeault a terminé son baccalauréat à l'université en parallèle à sa carrière de boxe amateur. Elle va bientôt s'inscrire en maîtrise. Elle est pleine de ressources et va connaitre du succès peu importe la direction qu'elle empruntera.

Ce samedi : Crawford c. Madrimov et Anderson c. Bakole

C'est samedi que seront présentés les « Saisons Riyad » du BMO Stadium de Los Angeles. Le genre d'événement qui regroupe les plus grands promoteurs et une carte de combats qui serait impossible de réunir sans la participation des « pétro-dollars » d'Arabie.

Les huit combats présentés sont dignes d'intérêt, mais j'en retiens deux plus particulièrement, soit Crawford c. Madrimov et Anderson c. Bakole.

Le boxeur no 1 livre pour livre selon la majorité des experts, Terence Crawford (40-0, 31 K.-O.) d'Omaha au Nebraska, va tenter de conquérir un titre dans une quatrième division contre le champion WBA des super mi-moyens Israil Madrimov (10-0-1, 7 K.-O.) de Khiva Ouzbékistan.

Madrimov est un autre produit de la meilleure formation nationale de boxe amateur au monde.

Crawford, 36 ans, souhaite un combat contre Canelo Alvarez (61-2-2, 39 K.-O.) et veut utiliser cette sortie comme un tremplin vers ce méga combat alors que le Mexicain va défendre les 3 ceintures qu'il lui reste, l'IBF ayant décidé de lui enlever la sienne, dans un combat qui tient plutôt d'une exhibition contre l'Américain Edgar Berlanga (22-0, 17 K.-O.).

Madrimov, 29 ans, est un boxeur amateur accompli avec une expérience limitée chez les professionnels et un faible niveau d'activité. Pro depuis 2018, il n'a livré que 11 combats en un peu moins de 6 ans.

Bien que l'Ousbek soit athlétique et compétent techniquement, j'ai de la difficulté à penser qu'il pourrait jouer un tour à Bud, un boxeur invaincu, aussi bon gaucher comme droitier et qui a toujours trouvé les failles chez ses adversaires pour les exploiter.

Depuis 2016, à ses 11 derniers combats, il a éliminé tous ses adversaires avant la limite.

Je ne crois pas que ce sera différent avec Madrimov, mais ça devrait quand même s'étirer jusqu'au 10 ou 11e round. Cependant, voir boxer Crawford, peu importe l'adversaire, c'est toujours spécial et on est toujours sur le bout de notre siège comme ce l'est de voir un match impliquant Connor McDavid ou Sidney Crosby.

Si Crawford est la plus grande vedette de la soirée, le combat qui sera le plus révélateur est celui des poids lourds impliquant le jeune Américain de 24 ans Jared Anderson (17-0, 15 K.-O.) et le Congolais de 32 ans Martin Bakole (20-1, 15 K.-O.).

On sait que le grand patron des « Saisons Riyad » Turki Alalshikh raffole des combats de poids lourds et depuis son arrivée dans le monde de la boxe, l'automne dernier, tous les meilleurs boxeur poids lourds ont été actifs et ont remporté les meilleures bourses de leur carrière.

Jared Anderson est non seulement le plus grand espoir poids lourds aux États-Unis, mais il est également le seul qui peut potentiellement évoluer avec les meilleurs au monde de la division depuis la débâcle de son compatriote Deontay Wilder.

J'ai bien dit potentiellement et c'est samedi qu'on va savoir si la possibilité peut devenir une certitude. Martin Bakole ne sera jamais champion du monde, mais c'est un gros bonhomme de près de 300 livres du haut de ses 6'6'' qui représente un test certain.

Jared Anderson veut immédiatement rejoindre la ligue des Oleksandr Usyk, Tyson Fury, Anthony Joshua, Daniel Dubois et Alalshikh le voit dans sa soupe.

Anderson est le seul poids lourd qui peut éventuellement remplir le TMobile Arena de Las Vegas, le Madison Square Garden New York ou bien la Sphere de Las Vegas. Cette donnée est très importante pour l'organisation qui s'est donné comme objectif de promouvoir le tourisme en Arabie Saoudite au pays de l'Oncle Sam.

Alors pour mettre toutes les chances du bon côté, c'est Alalshikh lui-même qui a contacté Sugar Hill Steward, l'entraineur de Tyson Fury, celui d'Adonis Stevenson également durant ses 5 années de règne comme champion WBC des mi-lourds, pour s'occuper de la préparation du jeune poids lours.

Anderson s'est donc entrainé à Delray en Floride, au gymnase de Steward, pour les 6 semaines de son camp d'entraînement qui sera dans son coin pour la première fois samedi.

Donc, une excellente audition pour le jeune Américain contre un solide adversaire qui est assez compétent pour nous donner une bonne idée de la valeur de « Real Big Daddy » Anderson.

Contrairement au dernier adversaire d'Anderson, Ryad Merhy (32-3, 26 K.-O.) qui s'est contenté de faire de la figuration et a réussi à rester sur ses pieds pour les 10 rounds, sans essayer d'en gagner un, Bakole se croit et il imagine que c'est sa chance à lui d'impressionner. Il va donc être agressif et prendre des chances.

De l'autre côté, on a reproché à Anderson de voguer vers la décision contre Merhy se contentant de prendre ce que lui donnait son adversaire au lieu de le punir.

Sugar Hill Steward amène avec lui la doctrine du Kronk GYM fondé par son oncle Emmanuel Steward qui est de tenter de passer le K.-O. à son adversaire en tout temps dans un combat et à tout prix.

Il faut donc s'attendre à un feu d'artifice dans ce combat et je vois Anderson l'emporter par un percutant K.-O. en 8 rounds.

Bonne semaine olympique!