« On a besoin d’un nouveau joueur désigné. »

« Joey doit sortir le chéquier! »

Un narratif récurrent qui s’intensifie chez plusieurs supporters de l’Impact avec l’ouverture du marché estival des transferts. L’arrivée de Gerrard à Los Angeles, ainsi que celles de Lampard et Pirlo à New York peuvent donner l’impression que le gazon n’est pas assez vert à Montréal, mais la décision d’ajouter de nouveaux joueurs à l’effectif ne peut se résumer à faire comme le voisin.

Constats sur l’entre-saison

L’objectif principal de la direction dans l’entre-saison était de solidifier la colonne vertébrale de l’équipe. À ce chapitre, des interrogations subsistent. Ciman est un roc en défense centrale, mais son partenariat avec Soumare semble remis en doute depuis un mois. Souvent utilisé sur la droite et embêté par les blessures, Cabrera a pour sa part connu un début de saison potable sans toutefois s’imposer sur la durée.

Au milieu, l’énigme reste totale. Le duo tant attendu de Marco Donadel et Nigel Reo-Coker a été très bon contre Orlando au Stade Saputo, mais a généralement offert des performances à court de qualité et d’inspiration. Le manque de forme physique et l’indiscipline de l’Italien, combiné à l’utilisation de l’Anglais comme défenseur latéral, n’ont certainement pas aidé les choses. L’amélioration possible demeure importante.

Ironiquement, c’est dans les couloirs que l’Impact a fait ses meilleures prises l’hiver dernier. Toia, Oyongo et Oduro ont tous des profils dont l’Impact avait besoin et apportent chacun une dimension intéressante au Onze montréalais. Pour ce qui est d’Alexander, Kronberg et Williams, leur utilisation a été trop faible pour asseoir un jugement étoffé.

Suffisant pour les séries

Malgré ses imperfections, la qualité du groupe que Frank Klopas et ses adjoints ont sous la main est largement suffisante pour se tailler une place en séries. Un attaquant de premier plan ou un milieu défensif imposant pourraient évidemment aider la cause des Montréalais, mais les principaux outils y sont déjà. S’agit de bien les utiliser.

À l’époque de la NASL, les ressources financières de l’Impact lui permettaient d’ajouter de nouveaux joueurs ou de carrément changer le visage de l’équipe à la mi-saison si les résultats désirés n’étaient pas atteints. Le calibre de la MLS et son plafond salarial rendent cette approche impossible en 2015. Le club doit avant tout maximiser le rendement de l’effectif qu’il a assemblé. Patrice Bernier écrivait récemment qu’il faut d’abord trouver des solutions à l’interne. J’abonde dans le même sens.

Les échos de l'entraînement de l'Impact

Bien que le Onze montréalais soit plus résilient et attaque davantage cette saison, deux principales facettes de son jeu restent à améliorer. Défensivement, l’adversaire arrive à progresser trop facilement vers Ciman et compagnie. La contribution des joueurs d’attaque pour récupérer le ballon doit être plus importante. Sur un plan offensif, les moments de grande cohésion sont rares et beaucoup repose sur l’exploit individuel.

Si ces éléments sont bien travaillés à l’entraînement, j’ai la conviction que l’Impact passera la deuxième moitié de saison parmi les cinq premières équipes de l’Est. En revanche, si ce travail de fond n’est pas effectué, il devra se battre jusqu’au bout. Un joueur désigné faciliterait peut-être la tâche, mais il n’y a aucune certitude. Même le plus grand des maestros peut sembler perdu dans un orchestre mal ajusté.

Prudence

Lors de son passage à Montréal, Caleb Porter me partageait qu’il n’y a pas que des avantages à la mise sous contrat d’un joueur désigné. L’entraîneur de Portland s’est permis de citer un rappeur des années 90 pour illustrer les dangers qui peuvent guetter les clubs de MLS : « Mo money, mo problems! », me disait-il. Pour Porter, l’équilibre du vestiaire est tout aussi important que le rendement sur le terrain.

Les José Mourinho, Carlo Ancelotti et Pep Guardiola de ce monde ont le bagage et les outils pour gérer les joueurs étoiles. En MLS, la situation peut être plus complexe. Il y a peu d’entraîneurs de la trempe de Peter Vermes (Sporting KC) qui arrivent à gagner la coupe MLS en laissant un joueur désigné sur le banc au profit d’un attaquant qui était en deuxième division quelques mois plus tôt. Cela requiert une évaluation juste de ses troupes, une vision claire et le support de la haute direction pour les décisions sportives prises par l’entraîneur.

La situation à Montréal est bien différente. Les décisions sont prises en collégialité. Cela a le mérite de mettre le savoir de tous à profit, mais ce système peut aussi engendrer plus de doute et d’incertitude quand vient le temps de prendre une décision. « Un chameau est un cheval dessiné par un comité », m’a un jour dit un entrepreneur en série. L’Impact devra être très prudent dans son choix d’un joueur désigné. Du banc de touche aux hauteurs des loges de la direction au Stade Saputo, on devra s’assurer que ce dernier cadre dans les plans de tous. Il est possible que le club doive patienter jusqu’à la fin de la saison pour trouver cette perle. Une attente qui pourrait en valoir la peine puisque la marge d’erreur est faible.

Après tout, il y a du travail à faire à l’entraînement entretemps!

Nota bene

Plusieurs supporters réclament un « nouveau » Marco Di Vaio. N’oublions pas que l’Italien était dans le vestiaire l’an dernier. Un vestiaire qu’on a dit dépourvu de leadership à la fin de la saison. Devrait-on désormais chercher un « autre » Laurent Ciman, jouant à un autre poste?