Merci Patrice!
Impact jeudi, 19 oct. 2017. 17:10 jeudi, 21 nov. 2024. 19:48Décembre 2011, l’Impact tient une conférence de presse au centre-ville de Montréal pour annoncer le retour dans l’organisation d’un Québécois qui a connu une brillante carrière à l’échelle internationale, en Norvège, en Allemagne et au Danemark, en plus d’évoluer avec l’équipe canadienne.
Il faut avouer que c’est une belle histoire. Un petit gars de Brossard qui fait ses débuts professionnels avec l’Impact au début des années 2000 et qui décide de plonger dans l’aventure européenne par la suite, avant de revenir boucler la boucle à la maison. D’une part, Bernier a la chance de retrouver ses proches et d’évoluer pour un club qu’il adore, alors qu’il s’apprête à se joindre à la MLS, dans un nouveau « projet », au sein du circuit de soccer le plus prestigieux en Amérique du Nord.
Ce jour-là, j’ai eu l’occasion de discuter avec Patrice Bernier de sa nouvelle aventure. Dès notre première conversation, j’ai senti à quel point il serait un représentant important pour l’organisation pour les années à suivre. Son charisme, son aisance devant les médias et sa détermination sont des qualités qui m’ont frappé dès le départ. J’étais loin de m’imaginer à quel point ces trois qualités définiraient une grande partie de l’association de Patrice Bernier avec l’Impact…
LE CHARISME
Dès que Patrice prend la parole, il impose le respect. Peu importe la situation qui se présente, il paraît en contrôle et aborde les choses avec un grand calme. Sa présence est rassurante pour ses coéquipiers, autant les jeunes que les vétérans. Ce charisme et son parcours professionnel lui ont également permis de discuter d’égal à égal avec les grands joueurs qu’il a côtoyés. Les Alessandro Nesta, Marco Di Vaio, Laurent Ciman, Didier Drogba ou Thierry Henry ont tous témoigné du respect qu’ils vouent à Patrice Bernier.
J’ai encore bien frais en mémoire le match du 31 mars 2012, alors que l’Impact rendait visite aux Red Bulls à New York. À égalité 2-2 à la mi-temps, les Montréalais ont subi une leçon de soccer signée Thierry Henry en deuxième demie. Après le match, l’attaquant français, qui venait d’inscrire un triplé, m’a accordé une entrevue. Il avait pris le temps de vanter l’Impact, mentionnant que ses adversaires auraient mérité un meilleur sort dans cette défaite. Ce n’était pas la dernière fois qu’Henry lançait des fleurs à la formation montréalaise. Quelques mois plus tard, il avait indiqué que l’Impact avait de bons joueurs comme Nesta et Di Vaio, mais que le meilleur de l’équipe était Patrice Bernier « et de loin ».
Les deux hommes se sont liés d’amitié et j’ai pu en être témoin lors de la présence de Bernier au match des étoiles de la MLS, en 2013. C’était beau de voir à quel point le respect qu’Henry vouait à Bernier était sincère.
D’abord, parce que Bernier était un bon joueur, mais surtout parce que quiconque a l’occasion de le rencontrer peut témoigner à quel point c’est un sapré bon gars !
L’AISANCE DEVANT LES MÉDIAS
À lire également
Patrice Bernier a été le représentant par excellence de l’Impact devant les médias, pendant ses six saisons avec le club. Dans les bons, comme les moins bons moments, il a toujours su trouver les bons mots, en faisant preuve de sincérité, en parlant avec son cœur. Il est clair qu’à certaines périodes de son séjour, la frustration était palpable pour diverses raisons, mais Patrice a toujours su faire passer les intérêts de l’équipe avant les siens. Même quand il était victime d’injustices au niveau de son temps de jeu, il ne s’est jamais défilé pour répondre aux questions.
Quand il est devenu capitaine de l’Impact, en 2014, il a admirablement géré le fait que les demandes d’entrevues et de tournages de toutes sortes étaient plus nombreuses. Si la perte de Bernier se fera sentir au chapitre du leadership dans le vestiaire et sur le terrain, on peut aussi dire qu’il a été une voix importante pour l’organisation.
Son aisance l’a également mené à collaborer comme analyste soccer, avec mes collègues et moi, sur les ondes de RDS. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de travailler ensemble sur la couverture de matchs de la ligue Europa et Patrice a démontré à quel point il sait bien partager ses connaissances.
Au cours des cinq dernières années, une seule fois j’ai senti le capitaine vulnérable devant une caméra et je ne pense pas oublier ce moment qui m’a marqué dans ma carrière de journaliste, mais aussi sur le plan humain.
C’était en novembre 2016. L’Impact venait de subir un véritable coup de tonnerre sur la pelouse du BMO Field. Le Toronto FC venait d’éliminer l’Impact, dans un match retour complètement fou.
Dès le coup de sifflet final, je me tenais sur les lignes de côté, en attente d’avoir les commentaires d’un joueur de l’Impact. Ces moments sont toujours délicats pour un journaliste, puisque les joueurs sont à fleur de peau et l’objectif n’est pas de les froisser, mais simplement de faire notre travail.
Le capitaine s’est dirigé vers moi et j’ai immédiatement ressenti à quel point il était brisé de voir s’envoler son rêve de participer à la grande finale de la MLS. Je me rappelle m’être dit que je garderais l’entrevue courte. Il était déjà généreux de se prêter à l’exercice, je n’avais pas envie de tourner le fer dans la plaie, en pointant du doigt les erreurs de l’équipe. Mon seul but était de l’entendre nous partager comment il se sentait après cette défaite crève-cœur. Je voulais surtout démontrer à Patrice que je le respectais grandement d’accepter de livrer le fond de sa pensée dans ce moment très difficile pour lui. On m’a d’ailleurs parlé de cette entrevue pendant plusieurs semaines, en me disant que c’était un moment où l’émotion était palpable.
Pour la première fois, je voyais Patrice Bernier à court de mots. J’avais devant moi un homme vidé physiquement et émotionnellement. Les astres semblaient alignés pour vivre le rêve une semaine plus tard à Seattle… mais tout s’est écroulé en quelques minutes. Après avoir vécu une charge d’émotions incroyable une semaine plus tôt au Stade olympique, voilà que la saison se terminait de cette façon. Dans cette courte entrevue, Bernier a représenté à quel point il était investi dans cette mission de remporter les grands honneurs avec son club de cœur.
LA DÉTERMINATION
Quand je pense à Patrice Bernier, le mot détermination me vient aussitôt à l’esprit. Parce que les embûches ont été nombreuses dans sa carrière et parce qu’il a toujours donné l’impression de carburer aux défis pour prouver qu’il pouvait faire la différence.
À sa première saison en MLS, en 2012, Bernier s’est retrouvé sur le onze partant 5 fois, lors des 12 premiers matchs de l’Impact. Il ne figurait pas parmi les favoris de Jesse Marsch en début de saison. Le Québécois s’est retroussé les manches et il s’est assuré de forcer la main de son entraîneur. À la fin de la saison, il a été couronné joueur par excellence de l’Impact.
Trois ans plus tard, au milieu de l’été 2015, le capitaine joue de moins en moins et se voit confier un rôle de réserviste par Frank Klopas. Plongé dans un cirque médiatique qui culmine avec une pause dont Bernier a besoin pour faire le point, il se donne encore une fois comme mandat de prouver à tout le monde qu’il a sa place dans la formation et qu’il peut jouer un rôle de premier plan.
Lorsque Mauro Biello est nommé entraîneur-chef, il affiche rapidement ses couleurs, en indiquant qu’il souhaite permettre à Bernier de démontrer son savoir-faire sur le terrain.
Bernier réussit avec brio. Son retour en force se confirme alors qu’il dispute son meilleur match dans le maillot de l’Impact, à mon avis, lors du match de barrage contre le Toronto FC, le 29 octobre 2015. Dans un scénario digne d’Hollywood, il marque le premier but du match et enflamme le stade Saputo.
La réaction de Bernier en dit long et celle de la foule, encore davantage : c’est la consécration pour le héros local. Bernier met également la table pour un but de Didier Drogba, dans une séquence où son jeu de pied mérite de se retrouver dans tous les faits saillants de la soirée !
Pour toutes ces raisons, Patrice Bernier mérite d’être salué pour son dernier tour de piste, qui s’annonce assurément émotif pour le principal intéressé. Son retour à Montréal nous a permis de découvrir un grand athlète, mais également un grand homme. L’Impact a beaucoup de chance d’avoir pu miser sur une personne entière, qui a été un fidèle représentant de l’équipe, mais surtout une inspiration pour plusieurs Québécois. Et voilà pourquoi il était important pour moi de lui rendre hommage.
Merci Patrice !