Donny Toia, un héros dans l’ombre
Impact jeudi, 1 oct. 2015. 22:35 mercredi, 11 déc. 2024. 14:56MONTRÉAL – Nul doute, l’Impact a dépensé avec merveille son argent en jetant son dévolu sur Didier Drogba et Laurent Ciman, mais l’un de ses meilleurs investissements de la saison passe nettement plus inaperçu.
Bien sûr, Donny Toia ne possède pas le dixième de la flamboyance de la vedette ivoirienne ou du général défensif belge sauf que ses comparses ne lésinent pas sur les compliments envers lui, le décrivant comme un héros dans l’ombre.
D’un naturel rieur, mais plus réservé, le défenseur américain est loin de rechercher la présence des caméras à un point qu’il déteste parler de lui-même, préférant vanter ses coéquipiers. Ceci dit, il est définitivement sorti de sa coquille en 2015 et l’avenir réserve de merveilleuses choses pour le polyvalent latéral gauche âgé de 23 ans seulement.
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Il a tellement accompli son travail dans la discrétion que certains amateurs n’ont pas remarqué son brio. Pourtant, Toia est celui qui a disputé le plus de minutes d’action et de départs derrière... le gardien Evan Bush.
Le plus beau dans cette histoire, c’est que ce bourreau de travail n’a coûté qu’un maigre salaire de 60 000 $ à l’Impact cette saison. Sélectionné dans le repêchage de dissolution du Chivas USA, Toia s’est donc avéré une extraordinaire aubaine.
« Le travail qu’il avait accompli contre (Andres) Romero quand on avait affronté le Chivas m’était resté dans la tête et on a approfondi son cas à l’approche du repêchage », s’est rappelé l’entraîneur Mauro Biello.
« C’est un guerrier! Un jeune qui est venu ici en travaillant très fort pour avoir sa place. Il sacrifie tout chaque match et on est très content de ce qu’il a procuré à l’équipe jusqu’à présent », a-t-il enchaîné.
Même s’il est ambitieux de nature pour sa carrière, Toia a reconnu qu’il était lui-même partiellement étonné de son éclosion avec sa nouvelle organisation.
« Je dois dire que je suis un peu surpris, je ne savais vraiment pas à quoi m’attendre en étant repêché par une autre équipe. Dans le fond, je devais pratiquement recommencer à zéro et il fallait que je prouve ce dont je suis capable aux entraîneurs », a évoqué celui qui a rempli cette mission.
Avec son humilité, il peine à expliquer les raisons de la solidité de son jeu à une position qui a souvent causé des problèmes à l’Impact.
« Je ne sais pas trop, ça vient sûrement du fait que je bûche au travail et que je me concentre à devenir un meilleur joueur. Évidemment, être payé pour un athlète professionnel, c’est important, mais le fait de jouer demeure la chose la plus merveilleuse à mes yeux », a exprimé l’athlète originaire de Tucson en Arizona.
Chose certaine, ses alliés de l’Impact n’ont pas besoin de réfléchir bien longtemps pour énumérer ses points forts.
« Je ne crois pas qu’ils (les dirigeants du club) s’attendaient à obtenir un tel rendement de sa part quand ils ont fait son acquisition. Avec l’arrivée retardée d’Ambroise Oyongo, on avait besoin de quelqu’un pour être un roc, une force stabilisatrice derrière, et il a réussi ça », a louangé Bush sans se faire prier.
« Il accomplit le sale boulot derrière et il n’est pas très flamboyant donc il n’obtient pas tout le mérite comparé à d’autres, mais il fait partie de la colonne vertébrale du club », a souligné Eric Kronberg, l’un de ses bons copains, qui a vanté sa ténacité.
L’un des joueurs les plus utiles, rien de moins
Ce n’est pas tout, les plus beaux compliments sont venus de deux vétérans aux expériences internationales qui en ont vu du soccer au fil de leur carrière.
Le capitaine Patrice Bernier n’est pas du style à lancer des fleurs de façon gratuite, mais il a été épaté par le rendement du petit et robuste défenseur.
« Je le place facilement dans le top-3 parmi nos joueurs les plus constants. Avant, les gens critiquaient souvent le côté gauche de notre défense et plus personne n’en parle parce qu’il a cimenté ce côté », a jugé Bernier.
« C’est un héros dans l’ombre au sein de notre équipe! », a tenu à dire le capitaine sur l’un des joueurs les plus utiles avec Laurent Ciman, Ignacio Piatti, Evan Bush et Didier Drogba bien sûr.
Durant son passage de quelques matchs avec le Chivas USA en 2014, Nigel Reo-Coker a appris à découvrir un jeune athlète, fils d’un passionné de courses d’accélération, dont la progression s’est effectuée à vive allure.
« Je l’ai vu se développer depuis ce moment et c’est fantastique de voir à quel point il a évolué comme joueur. À mon avis, il a été notre défenseur le plus constant. Il a affronté parmi les meilleurs joueurs de la MLS et il a été à la hauteur de superbe façon. Il mérite beaucoup plus de crédit que ce qu’il reçoit », a témoigné l’Anglais avant de lui tirer un peu la pipe.
« C’est le pocket rocket! Il est énormément sous-estimé », l’a surnommé Reo-Coker en référence à son physique de cinq pieds huit pouces et 160 livres.
Toujours en vertu de leur long curriculum vitae sur la planète soccer, Bernier et Reo-Coker ont, chacun de leur côté, milité pour un parcours international de leur protégé.
« Depuis le premier jour de notre parcours en Ligue des champions, il a été très solide. Les défenseurs n’obtiennent pas toujours la gloire parce qu’ils n’ont pas autant les statistiques, mais il a un talent prometteur. Quand je regarde la sélection américaine, personne ne se démarque comme latéral gauche. Il pourrait être invité et ça pourrait lui ouvrir des portes au niveau international », a prétendu Bernier avec conviction.
« Il est énormément sous-estimé et il mérite une reconnaissance internationale avec l’équipe américaine. Quand tu regardes ses attributs, il détient tout ce qu’il faut pour aller jouer en Europe ou ailleurs sur la planète », a proposé Reo-Coker.
Toia est pourtant un ancien attaquant
Sur le coup, quand il a su qu’il allait poursuivre sa carrière à l’autre bout de l’Amérique du Nord, Toia s’est posé quelques questions avant de découvrir une destination idéale. Il ne lui reste qu’à assimiler non pas une, mais plusieurs langues.
« La seule chose difficile, c’est le français que je ne parle pas. En fait, je ne parle pas espagnol, italien ou rien... », a lancé Toia avec un sourire en coin en faisant référence au côté multiculturel du club.
« J’aime la ville, le Vieux-Montréal est magnifique, j’adore les environs, la culture et l’architecture. Bien sûr, c’est très différent de l’Arizona, c’est vert ici! », a décrit celui qui capte maintenant quelques mots de la langue de Molière.
« Quand ils parlent lentement, je peux saisir certains mots simples, mais oubliez ça s’ils parlent rapidement », a enchaîné Toia en riant.
En amenant son baluchon à Montréal, Toia s’est accoutumé à un univers fort différent. En Arizona, il avait effectué ses premiers pas en course automobile dès l’âge de 8 ans. En se fiant à ses performances, son âge et sa forme physique, il possède les atouts pour s’établir à long terme à Montréal et il se promet de se familiariser avec l’héritage de course automobile d’un autre type de ses terres d'adoption.
« Heureusement, je suis jeune et j’espère que mon corps pourra tenir le coup. J’espère pouvoir jouer encore 10 bonnes saisons », a souhaité Toia, dont la copine, qui poursuit ses études en soins infirmiers, vient le visiter à l’occasion.
« Il détient tout ce qu’il faut pour devenir un pilier au sein de notre club », a argué Bernier sur l’avenir du numéro 25.
Ironiquement, Toia s’est établi comme un défenseur plus que fiable alors qu’il a œuvré en tant qu’attaquant pendant son cheminement vers les rangs professionnels. Ce n’est pas donc étonnant de l’entendre dire qu’il espère contribuer davantage au plan offensif après avoir inscrit son premier but en carrière et décoché quelques frappes convaincantes.
« Le sentiment de marquer était incroyable », s’est-il souvenu à propos de sa sublime tête contre Orlando City. « Je me consacre d’abord à mes responsabilités défensives, je suis payé pour le faire. Ceci dit, j’aimerais appuyer plus souvent l’attaque avec le temps. »
La reconnaissance de Toia a fait le tour de la MLS et ça ne saurait tarder à l’échelle des partisans. En attendant, Toia obtient tout ce qu’il désire.
« La chose la plus importante, c’est que ses coéquipiers reconnaissent son talent. On l’apprécie beaucoup au sein du club », a conclu Kronberg au sujet de son coéquipier que l’on pourrait qualifier d’aubaine par excellence.