MONTRÉAL – Yves Lavigne a foulé le tapis d’assez d’arènes d’arts martiaux mixtes pour savoir que le succès d’un arbitre ne se mesure pas nécessairement à la quantité de combats qu’il a sous la cravate, pas plus qu’à la cote de prestige des athlètes dont il a encadré le travail.

« Moins tu fais parler de toi, mieux c’est! », est l’adage de l’officiel québécois, qui a été d’une discrétion particulièrement efficace en 2013. Son travail a été récompensé par une nomination aux World MMA Awards, un gala annuel qui couronnera ses gagnants vendredi à Las Vegas.

Lavigne est en nomination avec quatre confrères pour le titre d’arbitre de l’année, une distinction qui lui était revenue en 2008.

« De mémoire en tout cas, je n’ai été mêlé à aucune controverse. Dans l’ensemble, je pense avoir fait une bonne job, mais rien de spectaculaire. Je n’ai fait que mon travail », récapitulait humblement Lavigne lorsque rejoint par RDS en fin de semaine.

Yves Lavigne donne ses explicationsL’un des visages les plus connus des MMA canadiens, Lavigne a été le troisième homme dans plusieurs combats d’envergure l’année dernière. Il a d’abord été invité au gala du week-end du Super Bowl, où il a fait la loi entre Antonio Rogerio Nogueira et Rashad Evans. C’est lui qui a dû tenir Nick Diaz en laisse dans son affrontement contre Georges St-Pierre au Centre Bell en mars. En juillet, lors de la fin de semaine de la fête nationale des États-Unis, il a officié la demi-finale du gala où Anderson Silva a été détrôné par Chris Weidman. Deux mois plus tard, il s’interposait pour mettre fin aux souffrances d’Eddie Wineland dans son combat de championnat face à Renan Barao à Toronto. Puis, entre Noël et le jour de l’An, il a joué le même rôle dans la victoire expéditive de Travis Browne aux dépens de Josh Barnett.

Il y a aussi eu un passage à Winnipeg où, en plus de ses tâches d’arbitres, Lavigne a été appelé à travailler avec la Commission athlétique du Manitoba pour peaufiner les détails de leur baptême dans les grandes ligues. Lavigne a passé une journée à donner des stages aux officiels de l’endroit pour s’assurer que tout se déroule rondement au UFC 161.

« Je me souviens aussi d’un combat en particulier, celui entre Joe Lauzon et Michael Johnson, ajoute-t-il ensuite à la liste. Johnson m’avait poussé et je l’avais ben averti qu’il risquait la disqualification s’il osait recommencer. Le lendemain, les médias saluaient la netteté de mon travail. »

Un projet outre-mer

S’il a été actif sous les plus brillants projecteurs du monde des arts martiaux mixtes, c’est dans l’ombre qu’Yves Lavigne a accompli ses plus belles réalisations en 2013.

Depuis un an, le comptable de profession s’est rendu quatre fois au Moyen-Orient pour participer à la naissance et à l’émergence de l’organisation Desert Force. En plus d’arbitrer tous les combats les soirs de gala, il supervise la logistique et conseille les dirigeants sur la marche à suivre pour que les événements soient un succès.

Yves Lavigne et Nate Diaz« Ce qui me rend le plus fier ces temps-ci, c’est d’avoir l’impression d’être en train de bâtir quelque chose là-bas. Ça me fait beaucoup penser à ce qu’on a fait au Québec il y a quelques années. Ça me fait aussi revivre les débuts du UFC, à l’époque où c’était nous qui faisions en quelque sorte le travail des commissions athlétiques. C’est très stimulant »

Jusqu’ici, Lavigne a arbitré une quarantaine de combats en Jordanie et à Dubaï. Son implication devrait prochainement l’amener au Bahreïn, en Turquie et à Abou Dhabi.

« Le but, c’est qu’éventuellement on n’ait plus besoin de moi. Un jour, je regarderai cette organisation bien rodée et je pourrai dire qu’il y a un peu de moi là-dedans. C’est le fun. »

Un dernier tour de piste

La carrière bien remplie d’Yves Lavigne tire à sa fin. Dans un monde idéal, il effectuerait un dernier tour de piste en 2014 avant de poursuivre sur des bases plus solides son travail d’éducation dans le monde des médias.

« Ça a été une aventure exaltante. Quand j’ai commencé, j’arbitrais devant 100 personnes. On me donnait 125 $ pour ma soirée de 15 combats et ça n’incluait pas le souper, ni l’essence! Jamais je n’aurais pensé que cette passion m’amènerait à vivre autant d’expériences inoubliables. »

Lavigne a une bonne idée de la tournée d’adieu qu’il aimerait s’offrir. Elle débuterait par l’ajout d’un deuxième trophée à sa collection, vendredi, puis s’étalerait sur toute la prochaine année avec une présence aux cinq galas que le UFC s’est engagé à tenir en sol canadien. De Halifax à Vancouver, un trait serait tiré sur l’impressionnant parcours de ce pionnier des arts martiaux mixtes québécois.

« Si les planètes s’alignent... », soupire Lavigne en anticipant le dernier droit.