Nikola Jokic à Paris pour se racheter
Les Jeux olympiques du rachat: la décision de Nikola Jokic de faire l'impasse sur le Mondial 2023 avait été très mal accueillie en Serbie, pays dingue de basket qui n'attend de l'idole qu'une chose, l'or olympique.
Trois fois joueur le plus utile de la NBA, une fois champion avec les Nuggets de Denver, Jokic est, avec le tennisman Novak Djokovic, l'autre icône sportive de ce petit pays des Balkans de 6,7 millions d'habitants.
Mais l'amour que lui portent ses compatriotes avait été terni par son choix l'an passé de faire l'impasse sur le Mondial 2023, après une saison éreintante dans la NBA conclue par un titre avec les Nuggets.
Sans Jokic, les « Aigles » avaient remporté la médaille d'argent. Mais de nombreux Serbes sont convaincus que si leur vedette avait été là, ils l'auraient emporté en finale face à l'Allemagne, victorieuse 83 à 77.
Quelques semaines après avoir été porté au pinacle par ses compatriotes pour son titre de la NBA avec Denver, Jokic était devenu le « traître », notamment sur les réseaux sociaux.
« Le sentiment général de la nation est tout à fait justifié », beaucoup « pensent que, pour lui, jouer pour l'équipe nationale est un passe-temps, plutôt qu'un acte de patriotisme ou un désir sincère », dit à l'AFP Vladimir Zivanovic, journaliste sportif serbe.
Le basket, aussi populaire que le football, est une religion en Serbie. À Belgrade, des matches de l'Étoile rouge ou du Partizan attirent régulièrement plus de 18 000 spectateurs dans la Stark Arena, dans une ambiance incandescente.
Des terrains ont été construits dans quasiment chaque quartier à l'époque yougoslave. Les joueurs serbes de l'autre « Dream Team » des années 1990, la Yougoslavie championne du monde, comme Vlade Divac, Zarko Paspalj, Predrag Danilovic, ont toujours le statut de demis Dieux à Belgrade.
De nombreux Serbes ont l'habitude de se lever la nuit pour regarder à la télévision des matchs de la NBA. Ils veulent croire que les « Aigles » peuvent renverser la Dream team, ultra favorite, qu'ils affrontent le 28 juillet.
En préparation, avec leur pivot de 29 ans, ils ont surclassé la France (79-67). Deux défaites ont suivi, contre l'Australie (84-73), puis les États-Unis (105-79), mais les Serbes se sont bien gardés de dévoiler leurs cartes: leur capitaine Bogdan Bogdanovic est notamment resté sur le banc.
Jokic était déjà dans l'équipe médaillée d'argent aux JO de Rio en 2016. Mais le géant de 2,11 m n'a depuis jamais remporté de tournoi majeur en sélection.
« La participation de Jokic compte bien évidemment, du point de vue de ses qualités individuelles, mais aussi de sa personnalité », a dit l'entraîneur Svetislav Pesic lors d'une interview en juin.
« MVP »
Les Serbes veulent voir à l'oeuvre sous le maillot national le joueur qui a encore été désigné joueur le plus utile au printemps dernier, incarnation de ce que les Yougoslaves appelaient le « basket jazz », reposant sur la créativité individuelle, plutôt que sur la vitesse et la puissance pure.
« On s'attend à ce qu'il se rattrape pour toutes les années précédentes et qu'il soit le meilleur joueur de l'équipe », dit Zivanovic. « Sinon, la question de sa participation à l'avenir se posera davantage. »
Malgré son impasse de 2023, Jokic reste profondément attaché à son pays.
Une fois la saison terminée, il retourne régulièrement dans sa paisible ville natale de Sombor (nord) où il se garde de toute sollicitation médiatique, passe du temps en famille et s'adonne à sa passion des courses de chevaux.
Il passe régulièrement dans son ancienne école pour bavarder avec de jeunes joueurs, sur un petit terrain de basket.
Quelques vidéos diffusées sur les réseaux le montrent volontiers dansant avec des amis au rythme de la musique folklorique des Balkans, parfois en boîte de nuit.
Ses compatriotes attendent désormais qu'il montre cet attachement sur le parquet.