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RÉSULTATS

Apprendre à gagner

Lando Norris Lando Norris - Getty
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On ne cesse de le répéter, mais la progression à vitesse Grand V de McLaren depuis un an a de quoi impressionner. Entamée l'an dernier, cette ascension se poursuit cette saison, particulièrement depuis l'arrivée de plusieurs évolutions importantes sur la monoplace lors du Grand Prix de Miami, qui ont mené à la première victoire de la carrière de Lando Norris.

En plein cœur d'une séquence de quatre épreuves en cinq semaines, on arrive même à se demander si McLaren ne compte pas, désormais, sur une voiture plus équilibrée que la Red Bull. Du moins, c'est ce qu'a notamment affirmé Carlos Sainz via le site Motorsport.com. Depuis Miami, la Formule 1 s'est posée sur plusieurs circuits aux caractéristiques bien différentes, et malgré tout, l'écurie d'Andrea Stella a toujours été en mesure de monter au moins sur la deuxième marche du podium.  

La deuxième place, c'est bien, et il n'y a pas si longtemps, c'était un exploit que McLaren ne manquait pas de souligner. Sauf que maintenant, avec une voiture qui s'améliore constamment, les objectifs changent. Ce n'est plus un Norris euphorique d'une deuxième position qu'on a vu sur le podium à Montréal et à Barcelone. C'est plutôt un Norris déçu qui affirmait, dans les deux cas, qu'il comptait sur la voiture la plus rapide et qu'il aurait dû gagner.

Alors, pourquoi est-ce que Max Verstappen s'est imposé à ces deux occasions? C'est que la voiture, même si on a parfois tendance à l'oublier, ne fait pas foi de tout en Formule 1. Norris comme McLaren doivent aussi apprendre à gagner.

Qu'est-ce que cela veut dire concrètement? Prenons par exemple ce qui s'est passé à Montréal. Alors que Norris menait la course par un peu plus de sept secondes, Logan Sargeant a perdu le contrôle de sa monoplace, provoquant la sortie de la voiture de sécurité. Norris a été le seul parmi les meneurs à ne pas s'arrêter, une décision qui lui a fort probablement coûté la victoire.

Il est vrai que lorsque le processus de voiture de sécurité est officiellement enclenché, Norris se trouvait à quelques mètres seulement de l'entrée des puits. Immédiatement, Norris a demandé à la radio : « On s'arrête ou non? » Son ingénieur de piste a alors hésité. La piste s'asséchait, mais la pluie devait recommencer quelques minutes plus tard. Sauf que la réponse devait être immédiate, et on lui a finalement dit de rester en piste, faute de temps pour prendre une décision.

Le temps était donc très limité pour Norris, c'est vrai. Sauf qu'entre le moment où Sargeant a dérapé et celui où la voiture de sécurité est enclenchée, il se passe une quarantaine de secondes. Est-ce qu'on aurait pu mieux anticiper la neutralisation? Évidemment, c'est facile à dire une fois la course terminée. Sauf que pendant ces 40 secondes, il n'y a eu aucune conversation entre Norris et son ingénieur.

Comparons un peu avec ce qui s'est passé du côté Verstappen. Dès la sortie de Sargeant, son ingénieur de piste lui posait des questions. « Comment sont les conditions de piste présentement? Si l'on doit s'arrêter et qu'on reste en intermédiaires, veux-tu des ajustements sur ton aileron? »

Quand la voiture de sécurité est déployée, Max a indiqué immédiatement à son ingénieur, Gianpiero Lambiase, qu'il veut s'arrêter pour des pneus secs. Ce dernier lui a répondu qu'il allait effectivement s'arrêter, mais pour des pneus intermédiaires, puisque la pluie va reprendre. Ce à quoi Max a simplement répondu « Ok ».

Il est clair que les sept secondes d'écart entre Norris et Verstappen ont joué un rôle important, mais la proactivité de Lambiase, en comparaison de celle de Will Joseph, fait notamment partie de ce que l'écurie devra améliorer pour battre de façon plus constante Red Bull.

On l'a presque oublié tellement la voiture était dominante l'an dernier, mais Red Bull, c'est une équipe extrêmement bien rôdée à tous les points de vue. Que ce soit sur le plan des décisions stratégiques, du travail des ingénieurs de piste, du travail des mécanos lors des arrêts aux puits, pour battre cette équipe, il n'y a pas de place à l'erreur.

Et ce n'est pas que McLaren qui constate qu'il faut être parfait à tous les points de vue. Pensez, par exemple, à Ferrari en 2022. La Scuderia avait commencé la saison sur un pied d'égalité en termes de performance avec Red Bull, mais les erreurs stratégiques, et aussi celles de Leclerc, ont fait la différence.

Car, bien sûr, il faut aussi parler de Max Verstappen, qui non, n'est pas champion seulement en raison d'une voiture dominante. La comparaison avec Sergio Perez fait peu de doutes. Le triple champion du monde en titre est au sommet de son art. Il est mature dans son pilotage, ne fait pas d'erreurs, choisit ses moments pour attaquer, mais aussi ceux où il sait qu'il doit gérer les pneus.

En Espagne, il a fait deux manœuvres qui lui ont procuré la victoire. Un meilleur départ que Norris, qui lui a permis de passer devant lui, mais surtout, un dépassement rapide sur George Russell au début du troisième tour qui lui a permis de creuser un écart sur Norris. Le Britannique, lui, a dû attendre l'arrêt de Russell à la fin du 15e tour pour le dépasser, et s'est aussi retrouvé derrière la Mercedes après son premier arrêt.

Et on parlait aussi du travail des mécanos... le deuxième arrêt de Norris d'une durée de 3,6 secondes était également trop long dans les standards de la Formule 1. C'est un autre aspect qui fait partie de l'équation.

Pour rivaliser avec Verstappen, que ce soit d'ici la fin de la saison, mais surtout lors des prochaines, McLaren et Norris devront passer au travers de ce processus et devenir une équipe encore plus rôdée. Et je ne le dis pas de façon péjorative, bien au contraire, c'est un processus normal qui doit être fait, tout simplement.

C'est ce qui a fait défaut chez Ferrari en 2021. Verstappen lui-même et Red Bull ont dû passer par cette période face à une écurie Mercedes qui était, à ce moment-là, au sommet de son art. Souvenez-vous les critiques envers le style agressif de « Mad Max ». Il a appris, comme bien d'autres anciens champions avant lui. On peut aussi dire que George Russell aussi traverse le même processus présentement.

Bien sûr, en Formule 1, la voiture compte énormément dans les succès d'un pilote et d'une équipe. Mais lorsqu'on s'attaque aux meilleurs, comme à Verstappen et Red Bull, ou à Hamilton et Mercedes il y a quelques années, il faut être parfait sur tous les aspects, semaine après semaine, tout au long de la saison. C'est là le prochain défi de McLaren... et de Ferrari et Mercedes.

Bref, de quiconque voudra détrôner les champions en titre.