Lauriane Genest savait qu'elle avait besoin de changement
Bien avant les vives déceptions vécues aux Jeux olympiques de Paris, la sprinteuse Lauriane Genest savait qu'elle avait besoin de changement. Elle en effectuera un très important dans les prochaines semaines, alors qu'elle quittera le Centre national d'entraînement de Milton, en Ontario, pour installer ses pénates au nouveau vélodrome de Bromont.
« Depuis que le vélodrome est en construction, c'était dans mon esprit, a fait valoir Genest, rencontrée plus tôt cette semaine dans les bureaux d'Intelcom, son nouveau commanditaire. J'ai fait mes premiers tours de piste là-bas. C'est à deux heures de la maison chez mes parents à Lévis, de chez mes amis. Ça fait quand même sept ans que je suis à Milton, ça commence à faire un bout. (...) Je ne savais juste pas si c'était possible. »
« Même avant les Jeux de Paris et mes mauvais résultats, j'avais mentionné à mon entraîneur que c'était ce que je voulais. Il comprenait que c'était peut-être le mieux pour moi, pour ma santé mentale et mon équilibre entre ma vie sociale et mes entraînements. Ça s'est concrétisé après les JO. Je déménage en novembre. »
« Milton, j'y retournerai pour des camps d'entraînement, mais Bromont sera vraiment là où je serai basée pour mon entraînement. C'est un gros changement, mais je crois que ça va être pour le mieux. »
Genest, médaillée de bronze du keirin des Jeux de Tokyo, en 2021, a été éliminée en quarts de finale de la discipline aux derniers Jeux olympiques de Paris. Au sprint, c'est en repêchage que son parcours a pris fin, après une huitième place au sprint par équipe, en compagnie de Kelsey Mitchell et Sarah Orban.
Ces résultats décevants l'ont hantée longtemps après la conclusion des compétitions.
« Je vais mieux que directement après les Jeux, évidemment, mais je dirais que c'est encore dur à accepter. Je n'en ai pas parlé dans les médias depuis les Jeux. Là, c'est la première fois et je me rends compte que ça vient encore me chercher. Il y a encore une douleur qui est réelle, mais ce n'est pas comme au début, alors que je pleurais tous les jours. Ça me rend encore émotive d'en parler, mais ça n'occupe plus mon quotidien. »
À ce jour, elle ne s'explique pas complètement comment les Canadiens — toute l'équipe de cyclisme sur piste a connu des Jeux décevants — ont pu être écartés de cette façon à Paris.
« Il y a énormément d'aspects. La plus grosse différence à mon sens, c'est que les autres pays ont fait cette saison en Coupe du monde sans se préparer pour les Coupes du monde, mais pour les JO. Leur niveau en Coupe du monde ne représentait pas leur niveau aux JO », a-t-elle analysé.
« Je me suis présentée aux Jeux avec le niveau de la dernière Coupe du monde. Eux étaient deux ou trois pas devant moi. C'est l'un des pires sentiments du monde, car tu te sens démunie; il est trop tard pour changer quelque chose. Tu continues d'y croire: même si tu n'as pas le niveau de la championne olympique, il y a moyen d'accomplir quelque chose dans notre sport. Tu te dis que c'est peut-être une mauvaise journée, mais après réflexion, le reste du monde s'est extrêmement développé entre la dernière Coupe du monde en avril et les JO. C'est clair qu'il y a des questions à se poser par rapport à l'entraînement. »
Ces discussions n'ont pas encore eu lieu à Cyclisme Canada, puisque les membres de l'équipe se retrouveront tous ensemble à Milton pour une première fois dans les prochains jours. Les discussions au sujet de son déménagement ont toutefois eu lieu et Genest sent qu'on l'appuie dans ses choix.
« Franck [Durivaux] va demeurer mon entraîneur (...) ça va juste se passer à distance. À Bromont, j'aurai le soutien de la fédération provinciale. Je pourrai m'entraîner pendant leurs sessions. Ils ont vraiment été d'une grande aide dans ce processus, car de mon côté, c'était le néant par rapport aux infrastructures. Je sens vraiment que j'ai le soutien, autant de Cyclisme Canada que de la fédération québécoise. Ils ont vu que ce n'est pas un plan cul-cul, que j'avais effectué mes recherches et que j'étais allée chercher les informations et l'aide dont j'avais besoin. Que c'était une démarche sérieuse et bien menée. »
« Ce n'est pas comme le patinage artistique, que je pratiquais auparavant. Tu n'as pas besoin d'un coach sur la glace à tes côtés pour regarder chaque élément, chaque chose que tu fais. C'est un sport stratégique et technique, mais parfois, ça revient simplement à pédaler le plus vite que tu peux. »
Los Angeles : à voir
Genest aimerait bien être des Jeux olympiques de Los Angeles, en 2028, mais elle est bien consciente que ses choix pourraient ne pas l'y mener.
« Je pense que j'ai toujours la passion du cyclisme, mais je ne sais pas si j'avais toujours la passion de Milton! Je pense que c'est un bon moment pour ce changement, pour essayer de nouvelles choses. J'ai hâte de découvrir autre chose, d'élargir mes horizons, de vivre une nouvelle atmosphère. Ça se peut que ça ne fonctionne pas du tout et j'ai accepté ça. »
« Les Jeux sont dans quatre ans et je sais que Milton ne me rendait plus heureuse. Ce n'est plus ce dont j'avais besoin. Je suis prête à assumer ce risque pour voir autre chose; d'essayer de faire mon chemin. De voir si en étant plus heureuse dans ma vie sociale, ça ne peut pas améliorer mes performances sur le vélo. C'est vraiment une année d'expérimentation. »
« Concrètement, j'aimerais être à Los Angeles. Mais si les sensations à Bromont, la motivation, le goût du dépassement ne sont pas les mêmes, ce sera difficile. J'y vais un an à la fois et je verrai comment ça se passe. »