CHAPITRE 2 : « LE NATUREL »
Calé dans son siège, casque d’écoute vissé sur les oreilles, Vincent Laplante révise la feuille de jeux que vient de lui remettre Benoît Groulx, le coordonnateur offensif des Dynamiques.
Il a trois heures, la durée approximative du trajet en autobus qui mène l’équipe à Québec, pour mémoriser les stratégies qu’il sera appelé à déployer face aux Patriotes de la Polyvalente Roger-Comtois.
« As-tu des questions? », s’informe Groulx au moment où Laplante lui redonne le plan, à peine quelques minutes plus tard.
« Non », répond-il, sûr de lui.
Le quart-arrière de 16 ans est un jeune homme brillant. Tout en pratiquant trois sports à des niveaux élites – football, basketball et golf –, parfois même en simultané, Laplante a maintenu une moyenne académique de 91% l’an dernier en secondaire 4. Un rendement qui lui a valu le prix de Dynamique de l’année pour ses succès scolaires et sportifs.
« Des fois, il y a des gars qui me disent que je les fais chier parce que peu importe le sport que je fais, je vais avoir une habileté naturelle », confie celui qui tout jeune, alors qu’il jouait encore au hockey, était justement surnommé « Le Naturel » par ses coéquipiers.
« Il a tout facile », jalouse son receveur Anthony Filip Rodriguez. « Si seulement je pouvais être comme lui. Qui ne le voudrait pas? [Il est] bon dans les sports, bon à l’école, bon dans le côté social… »
Laplante a intérêt à être bon cette saison. Il est le seul quart-arrière régulier à la disposition des Dynamiques. Sans réel réserviste pour le mettre sous pression, l’athlète de 6 pi 3 po et 161 lb s’en remet à Groulx pour le garder sur le qui-vive.
« Je n’ai jamais été challengé comme ça de ma vie », avoue Laplante.
Groulx s’y connaît en effet en la matière. L’ancien quart-arrière du Rouge et Or a mené l’équipe à deux conquêtes de la coupe Vanier en 2006 et 2008, en plus d’être nommé joueur universitaire par excellence au pays en 2008, avant de recycler ses connaissances dans le coaching, notamment au niveau universitaire.
« J’ai la chance d’avoir un quart-arrière qui est extrêmement intelligent, observe Groulx. C’est sûr que ça me permet de pousser un p’tit peu plus la note. »
Et jusqu’à maintenant, son poulain lui donne raison. Après des débuts modestes face à l’Arsenal, Laplante démontre dès le deuxième match de la saison qu’il est capable de mettre les savants plans de son maître à exécution.
Dans une victoire de 35-14, Laplante complète 23 de ses 27 passes pour des avancées de 324 verges, trois touchés et aucune interception. Une performance que ne manque pas de souligner Groulx sur le chemin du retour à bord de l’autobus.
« Ton QB a eu tout un match. Il était calme et il a lancé avec assurance », souligne-t-il à Pontbriand, alors que tout le personnel d’entraîneurs est réuni à l’arrière du véhicule et célèbre sa réussite.
Désigné DJ par ses collègues, Groulx épluche la liste de lecture de son iPhone à la recherche de vieux succès rap à faire résonner dans le haut-parleur Bluetooth que Coach Pont a toujours à portée de mains.
Groulx chante chacun des beats qu’il sélectionne. De Snoop Dogg à Notorious B.I.G, en passant par Wu Tang et Cypress Hill.
« Je les connais toutes par cœur », affirme-t-il en reprenant place sur son siège après s’être levé pour en réciter un avec deux membres de son unité offensive, le receveur Kenzy Paul et le porteur de ballon Angel Vital.
Fiers, les entraîneurs des Dynamiques profitent du moment. Deux victoires en autant de matchs pour amorcer la saison, c’est pour le moins inattendu et c’est de bon augure à l’aube du prochain duel, face aux puissants Condors de l’Externat Saint-Jean-Eudes.
« C’est un bon timing pour les pogner, estime Groulx en discussion avec la thérapeute de l’équipe, Vanessa Faro. On vient de signer deux victoires, et pas par seulement 7 points. Les joueurs sont en confiance, mais c’est autre chose qui nous attend. »