LES GRANDS BOXEURS - MARIE-ÈVE DICAIRE

Championne des poids super-mi-moyens de l’IBF depuis décembre 2018, Marie-Ève Dicaire présente une fiche de 17-0. Elle a été choisie comme étant la 10e plus grande boxeuse québécoise du XXIe siècle à la suite d’une consultation auprès d’experts et d’amateurs à RDS.ca.

« À tous ceux qui me disaient qu’il n’y avait pas de place pour mener une carrière en boxe féminine et que je rêvais en couleurs, je leur ai prouvé que tout est possible quand on pousse des portes. »

Marie-Ève Dicaire venait tout juste de livrer son deuxième combat dans les rangs professionnels quand elle a déclaré ces mots au représentant de RDS.ca venu recueillir ses commentaires après sa victoire par décision unanime des juges face à la Manitobaine Christina Barry en janvier 2016.

À proprement dit, Dicaire n’avait encore rien accompli dans l’univers où elle venait de sauter à pieds joints, mais cette déclaration manifestait l’attitude qu’elle conservera tout au long de son parcours jusqu’à sa conquête de la ceinture des super-mi-moyennes de l’IBF trois ans plus tard.

Si la présence de Dicaire sur les cartes de Groupe Yvon Michel relevait davantage de la curiosité au départ, la boxeuse de Saint-Eustache s’est rapidement imposée en offrant à de nombreuses reprises les combats les plus intéressants et excitants des sous-cartes auxquelles elle participait.

Sauf que l’ascension vers les plus hauts sommets n’a pas été de tout repos. Les commentaires déplacés étaient ponctuels, un choc pour l’athlète issue des arts martiaux où l’égalité prévalait. Mais Dicaire n’allait pas se laisser distraire par la situation, car elle était déterminée à gagner le respect, un peu comme elle l’avait fait quelques années plus tôt en ouvrant son école de karaté.

Les uns après les autres, Dicaire a su rallier plusieurs amateurs à sa cause. Elle savait plus que quiconque que son bagout ne suffirait pas, il fallait absolument offrir de bonnes performances en gravissant les échelons. Bref, il lui fallait apprendre son métier comme tous ses semblables.

Malgré ses énormes ambitions, Dicaire n’a jamais manqué une occasion de reconnaître qu’elle avait des faiblesses. Après ses combats, elle n’hésitait pas à montrer les points à travailler. Un manque d’énergie à son premier duel prévu pour six rounds? Ça n’arrivera plus! De la difficulté à imposer le rythme? Elle forcera son adversaire à commettre une erreur pour ensuite en profiter!

Dicaire pouvait ainsi difficilement être mieux préparée pour son combat de championnat du monde contre Chris Namus en décembre 2018 à Québec. Elle possédait tous les outils pour s’imposer dans ce qui est, encore à ce jour, de son affrontement le plus compliqué en carrière.

Grâce à l’appui d’une foule totalement acquise à sa cause, Dicaire a été en mesure de puiser au fond de ses ressources pour devenir la première championne de l’histoire de la boxe féminine québécoise. Elle avouera même candidement qu’elle a été portée par l’énergie de ses partisans vers la fin du combat et qu’elle avait alors réalisé qu’elle ne pouvait juste pas les laisser tomber.

Malheureusement pour elle, Dicaire n’a eu d’autre choix que de célébrer très sombrement son triomphe, étant donné qu’elle savait que le moment n’était pas propice aux élucubrations de joie en raison du violent knock-out encaissé par Adonis Stevenson environ deux heures plus tôt.

La conquête d’une ceinture mondiale a ensuite permis à Dicaire de légitimer la place de la boxe féminine dans le paysage sportif québécois et d’inspirer toute une génération de jeunes femmes qui peuvent également crier haut et fort « que tout est possible quand on pousse des portes ».

Francis Paquin