Apprécions Laine, malgré toutes ses fautes
COLLABORATION SPÉCIALE
Depuis le début de sa carrière, Patrik Laine a toujours fait jaser, autant pour les bonnes que les mauvaises raisons. Un joueur qui est capable de prendre contrôle d'une rencontre, ou de disparaître pour plusieurs matchs, c'est exactement ce qu'on voit lors de sa première saison à Montréal. Après une blessure au camp d'entraînement, il est revenu sur les chapeaux de roue, marquant 8 buts en avantage numérique en neuf matchs, tous sur un tir sur réception de son bureau. Il nous a aussi offert une séquence de 8 matchs sans point avec un différentiel négatif dans sept de ces rencontres. Mercredi dernier, c'est lui qui a réveillé l'équipe contre le Kraken avec un but en avantage numérique après une première période difficile, preuve que, lorsque ça clique, il peut venir changer l'allure d'une rencontre en une fraction de seconde.
Malgré les passages à vide et la rouille due aux nombreuses blessures et matchs ratés des dernières années, Patrik Laine marque à des rythmes qui sont absolument incroyables. Par exemple, il mène la LNH avec 13 buts du cercle gauche cette saison en seulement 35 rencontres. Le reste du top-5 n'est même pas dans le même code postal en termes de matchs disputés, avec Dylan Guenther le seul qui en a disputé moins de 64.
Patrik Laine - Graphique statistiques
C'est une histoire similaire pour ses 11 buts marqués avec un tir sur réception. Parmi les 16 joueurs qui en ont au moins 10, Laine est encore de loin celui qui a vu le moins d'action. Le prochain sur la liste? Alex Ovechkin, qui en a 10 en 50 matchs alors qu'il s'approche à grands pas du record de buts de Wayne Gretzky. Laine est aussi déjà au premier rang du Tricolore depuis 2008-09 avec 12 buts en avantage numérique, à égalité avec Shea Weber. Il n'est pas le joueur le plus complet, je vous l'accorde, mais son tir est une arme comme on en a rarement vu à Montréal, du moins au cours des dernières décennies.
Montréal n'a pas le luxe d'être difficile sur la provenance de sa production offensive. Depuis 1997-98, il y a eu 229 instances de clubs qui ont marqué 3,00 buts par match ou plus, soit plus ou moins huit saisons par équipe en moyenne (les expansions au cours des années viennent compliquer le calcul). Le CH n'a obtenu que trois de ces saisons; 3,13 en 2007-08, quand Kovalev est devenu le dernier joueur du CH à marquer un point par match, 3,04 en 2012-13, saison de 48 matchs écourtée par un lockout, et 3,00 exactement en 2018-19, menés par la saison de 72 points de Max Domi, qui a établi des sommets en carrière dans pratiquement toutes les catégories. En fait, si l'on exclut les clubs qui n'ont pas disputé chaque saison depuis 1997-98, Montréal a la troisième pire attaque de la LNH en buts par match à 2,70, devant seulement les Kings de Los Angeles (2,70 également, mais quelques décimales en dessous si l'on n'arrondit pas) et les (Mighty) Ducks d'Anaheim (2,63).
Simplement dit, Montréal recherche désespérément une force de frappe en attaque depuis plus de 25 ans.
Est-ce que Laine à des fautes dans son jeu? Absolument. Aucun attaquant du CH n'est impliqué dans moins de batailles 1 contre 1 par 20 minutes que Laine. Est-ce qu'il y a assez de questions pour faire hésiter Kent Hughes à le garder au long terme après son contrat? Sans aucun doute. Il a un long historique de blessures et peut disparaître à 5 contre 5, quoi que l'absence d'un véritable centre numéro deux ne vient pas aider sa cause, lui qui a besoin d'un bon fabricant de jeu pour maximiser ses talents.
Malgré tout, c'est important de remettre tout ça en contexte. Ce n'est pas comme si Laine était un investissement majeur pour le CH. Il n'a pas coûté un gros contrat à long terme sur le marché des joueurs autonomes, ni les meilleurs espoirs dans un échange, ni un choix élevé au repêchage. Il nous a été pratiquement donné lors de la transaction, avec les Jackets qui nous ont envoyé un choix de 2e tour avec Laine en retour de Jordan Harris pour s'assurer que Montréal prenne l'entièreté de son contrat. Contrat qui, d'ailleurs, se termine l'an prochain. Rien ne lie le Canadien à l'attaquant finlandais à long terme. Son salaire, bien qu'onéreux, est loin d'être problématique pour une équipe qui n'a aucun problème à se retrouver sous le plafond salarial. Dans le cas de Laine, Montréal joue avec l'argent de la maison, essentiellement.
Alors, la prochaine fois que vous dites que Laine ne fait rien sur la glace autre que marquer des buts, prenez un moment pour vous rappeler les plus de deux décennies d'anémie offensive et à quel point ses buts ont de la valeur pour l'organisation. Et prenez le temps d'apprécier ses tirs foudroyants, car malgré toutes ses fautes, il demeure l'un des meilleurs marqueurs purs que l'on a vus dans la LNH au cours des dernières générations, et certainement un des meilleurs dans l'uniforme du Tricolore depuis le début du millénaire.