Celebrini-Hutson : les hauts et les bas d'un sensationnel duel
MONTRÉAL - Impliqué dans un duel enlevant pour mettre la main sur le trophée Calder – un duel qui est davantage une course à trois avec le gardien des Flames Dustin Wolf et même à quatre puisque Matvei Michkov, des Flyers, s'est hissé au premier rang des marqueurs chez les recrues – Macklin Celebrini et Lane Hutson ont offert, jeudi soir, au Centre Bell, des performances moussant leurs chances d'être élu recrue de l'année dans la LNH.
Hutson est sorti gagnant du face-à-face de jeudi avec son ancien coéquipier à Boston University.
Il a récolté une passe et terminé sa soirée de travail avec un différentiel de +1 dans une victoire de 4-3 arrachée en prolongation aux dépens des Sharks de San Jose.
Cette mention d'aide, une passe servie à Nick Suzuki libéré dans l'enclave en raison de l'attention que lui ont portée deux joueurs des Sharks, était la 40e de la saison pour Hutson. Le jeune défenseur est le troisième défenseur de l'histoire du Canadien à atteindre le plateau des 40 passes à sa première saison. Le premier depuis Chris Chelios (55 passes) il y a 40 ans!
Le plus beau jeu réalisé par Hutson jeudi n'a toutefois pas mené à un but. Il s'est même conclu par un coup de sifflet parce que Nick Suzuki s'est retrouvé en situation de hors-jeu par la largeur de la lame d'un patin.
Mais la bombe servie par Hutson à son capitaine n'était – et est toujours – rien de moins que sensationnel. Une passe catapultée du bas du cercle de mise en jeu à la droite de Samuel Montembeault qui s'est retrouvée sur la lame du bâton de Suzuki, à la ligne bleue adverse, en moins de temps qu'il en faut pour écrire : simonac!
Le genre de passe que 1000 défenseurs rêvent d'effectuer, mais que deux, trois ou quatre peuvent réaliser.
Si Suzuki n'avait pas été hors jeu par un fil et s'il avait pu marquer au terme de l'échappée offerte par Hutson, ce but aurait occupé une place parmi les plus spectaculaires de la saison. Et la passe de Hutson aurait occupé une place sur le podium des plus belles de la saison.
Rien de moins!
Celebrini dans tout ça?
Contrairement à Lane Hutson, Macklin Celebrini a été blanchi. Pis encore, il s'est fait sortir de ses patins par Cole Caufield qui s'est moqué de lui en le contournant pour marquer le but de la victoire en prolongation.
Ce but, le huitième en carrière marqué par Caufield en prolongation, a bien sûr soulevé le Centre Bell. Il a surtout couronné une septième remontée victorieuse en troisième période – deuxième place dans la LNH cette saison – du Tricolore qui a comblé trois fois des reculs d'un but dans ce match.
Celebrini s'est aussi rendu coupable d'un revirement qui a mené au premier but du Canadien.
Ces deux revirements et le différentiel de -2 auquel elles ont mené portent ombrage à la soirée de travail de Celebrini. C'est évident. Mais elles ne peuvent balayer du revers de la main le grand talent du tout premier choix du dernier repêchage.
À l'image de son copain et rival dans la course au trophée Calder, Celebrini a toutefois réalisé un jeu sensationnel jeudi soir au Centre Bell. Le genre de jeu que tu dois revoir une, deux, trois fois en reprise pour être convaincu d'avoir bien vu. Pour arriver à comprendre ce qui est arrivé. Pour savourer pleinement l'ampleur de ce qui vient d'arriver.
Celebrini a surpris tout le monde – à commencer par Samuel Montembeault – en refilant, du revers, la rondelle à son compagnon de jeu Willliam Eklund à la droite du gardien du Canadien. Celebrini filait à pleine vitesse et il semblait clair qu'il avait l'intention de contourner le but pour prendre Montembeault de vitesse de l'autre côté. Et c'est quand le gardien s'est compromis sur sa gauche que Celebrini a effectué sa passe savante.
Eklund n'a pas marqué. Mais comme dans le cas de la bombe réalisée par Hutson en direction de Suzuki, la conclusion du jeu n'enlève rien de rien au brio de l'exécution.
Celebrini a été blanchi. Oui! Mais il a été l'attaquant le plus utilisé (21 min 11 s) par Ryan Warsofky. Il a multiplié les passes et les occasions servies à ses coéquipiers en plus de cadrer quatre des neuf tirs qu'il a tentés… tout en se rendant coupable de quatre des 23 revirements imputés aux Sharks par les officiels mineurs.
Savoir racheter des erreurs
Lane Hutson, toujours en combinaisons aux couleurs du Canadien, attendait Macklin Celebrini dans le corridor séparant les deux vestiaires après le match.
Ils ont sans doute échangé des commentaires positifs sur les jeux sensationnels qu'ils ont réalisés au cours du match. Hutson s'est peut-être – sans doute même – aussi payé la tête de son ami victime du but gagnant de Caufield.
Mais comme Celebrini, Hutson s'est rendu coupable de quelques bévues dans la victoire.
Fabian Zetterlund a marqué le premier but du match sous les yeux de Hutson qui n'a pas fait le poids contre lui. Concédant près de 30 kilos à son adversaire des Sharks, Hutson pouvait difficilement sortir de ce corps à corps. Mais rien ne l'empêchait de lui faire perdre la rondelle avant qu'il ne marque.
Hutson s'est aussi rendu coupable de quelques revirements à la ligne bleue du Tricolore.
C'est grave?
Pas vraiment quand on s'appuie sur le grand principe philosophique que seuls ceux et celles qui ne font jamais la vaisselle ne cassent pas d'assiettes.
Ça devient même une source de motivation quand des jeunes aussi talentueux que Hutson et Celebrini redoublent d'efforts pour faire oublier ces bévues.
Ce que Hutson a fait plusieurs fois jeudi soir. Ce qu'il fait à répétition depuis le début de la saison.
Martin St-Louis qui a commis sa part d'erreurs au fil de sa carrière a toujours su de reprendre de brillante façon. Sa place au Temple de la renommée du hockey est là pour en témoigner. Il est donc le premier à comprendre l'importance d'aider ses jeunes joueurs à racheter leurs erreurs.
«Tu ne peux pas juste «focusser» sur les mauvaises actions d'un joueur. Tu ne peux pas monter un gars, monter la confiance d'un joueur, si ce joueur ne veut pas lui-même monter. Tu peux toutefois descendre un gars – miner sa confiance – même s'il ne veut pas descendre», a reconnu Martin St-Louis qui tente donc de trouver le bon équilibre entre critiques et encouragements afin d'aider ses joueurs à se remettre de leurs mauvais coups.
«Il faut faire attention de ne pas être trop omniprésent non plus. Tu ne veux pas menotter tes joueurs. Dans le sport, un gars qui joue avec confiance peut offrir des performances qui dépassent son niveau d'habiletés. Inversement, un gars qui n'a pas de confiance va jouer en bas de son niveau d'habiletés. L'équilibre est vraiment important. Surtout avec de jeunes joueurs», a indiqué l'entraîneur-chef du Canadien.
Que Lane Hutson et Macklin Celebrini soient en mesure de se remettre aussi rapidement que facilement des bévues normales dont ils se rendent coupables en jouant aussi souvent qu'ils le font est normal.
Ils sont déjà des vedettes et seront des super vedettes dans un avenir rapproché.
Gestion favorable du banc
Mais Martin St-Louis a aidé la cause de son jeune défenseur en maximisant l'avantage de la patinoire dont il profitait jeudi. Car c'est contre Macklin Celebrini et ses compagnons de trio que Hutson a passé le moins de temps sur la patinoire jeudi soir.
Du bon coaching!
On a vu Hutson-Celebrini à quelques reprises l'un contre l'autre. Dont une fois en prolongation. Mais Martin St-Louis a su bien «gérer son banc» pour maximiser les chances de son jeune défenseur de sortir gagnant du duel entre les deux candidats au titre de recrue de l'année.
Bon! Il a surtout géré son banc pour guider son équipe vers une victoire qui a couronné un match bien ordinaire de son club.
«J'ai aimé le résultat, mais pas vraiment la manière dont on s'y est pris pour gagner. On a eu de bons moments. Mais nos hauts étaient très hauts alors que nos bas étaient très bas. Mais dans le cadre d'une saison, tu dois apprendre à sortir gagnant de match comme celui de ce soir», a indiqué St-Louis.
Au cours des 40 premières minutes du match, les Sharks avaient bien plus de hauts que le Canadien. Ils contrôlaient le jeu en fait.
Ils ont ensuite été victimes de ce qui arrive souvent aux jeunes équipes. Ils ont trouvé une façon de perdre au lieu de prendre les moyens de protéger leur victoire.
Et ça commence à peser lourd alors que les Sharks qui n'affichent que cinq victoires lors des 32 derniers matchs (5-23-4) ont encaissé jeudi une septième défaite de suite, dont six par un but. Les Sharks ont une fiche de 10-12-9 dans les matchs décidés par un but. Un dossier de 4-9 lorsqu'ils sont à égalité avec l'adversaire après 40 minutes.
«C'était un beau but, mais ça ne change rien au fait qu'on a encore perdu par un but», a lancé Will Smith qui a marqué son neuvième but de la saison et récolté sa 17e mention d'aide jeudi.
«Il faudra apprendre à aller chercher le but qui fait mal à l'adversaire au lieu de le laisser revenir dans le match. Ils sont revenus de l'arrière trois fois ce soir. Je crois qu'on est rendu à 25 défaites par un but ou par deux avec le dernier marqué dans un filet désert. Notre situation serait beaucoup meilleure si nous avions été en mesure de transformer quelques-unes de ces défaites en victoires», a convenu le vétéran Marco Sturm.
Le genre de commentaire qu'on entendait souvent dans le vestiaire du Canadien au fil des dernières années, mais qu'on entend moins aujourd'hui alors que le Tricolore est dans le «mix».
Mais il faudra l'entendre encore moins souvent pour que le Canadien passe du «mix» aux séries!