Filip Eriksson, un pari sur la bonne voie
BROSSARD – Au repêchage de la Ligue nationale, une multitude de facteurs peuvent faire en sorte qu'un joueur glisse à un rang de sélection qui ne soit pas un reflet fidèle de son talent.
Sean Farrell était toujours disponible en quatrième ronde en raison de son gabarit modeste. Les questions entourant l'éthique de travail de Joshua Roy l'ont fait dégringoler en cinquième ronde. Pour Filip Eriksson, ça a été une blessure.
À l'âge de 17 ans, Eriksson disputait son deuxième match en SHL, la première division suédoise, quand une mise en échec par derrière lui a bousillé le poignet gauche. Sa convalescence a duré cinq mois. Il est revenu juste à temps pour jouer quelques matchs en séries éliminatoires avec l'équipe junior du club de Växjö.
Durant ces séries, il avait eu une rencontre avec un dépisteur du Canadien, mais il ne se berçait pas d'illusions. Avec une feuille de route pratiquement vierge, il croyait avoir raté sa chance de laisser une bonne impression.
Il se trompait. À Nashville, le Canadien l'a sélectionné avec son choix de sixième ronde, le 165e du repêchage. Un an plus tard, c'est un pari qui fait bien paraître ceux qui l'ont pris.
L'attaquant de 5 pieds 11 pouces et 179 livres vient de connaître une saison plus qu'intéressante. Après un prêt en deuxième division en janvier, il a mis le pied sur l'accélérateur et a récolté 24 points en 21 matchs avec les Vikings de Nybro. Il a ensuite ajouté trois points en cinq matchs de séries.
Eriksson a ainsi su tirer le maximum d'une situation qui au départ ne lui plaisait pas. Il avait en effet débuté la saison dans la grande ligue avec Växjö, mais dans une équipe qui se battait pour le premier rang du classement général, les occasions de se faire valoir étaient trop rares. Il avait seulement six mentions d'aide en 29 parties quand ses patrons l'ont envoyé se développer dans un calibre inférieur.
« Mon début de saison a été difficile, racontait le frêle joueur de centre mercredi à Brossard. Je voulais jouer, mais je devais me battre pour des minutes. Je me suis mis à trop réfléchir. Quand je suis arrivé [en deuxième division], j'étais un peu découragé. Je ne m'attendais pas à ce que les choses s'y passent si bien pour moi. »
Eriksson compare ainsi les deux meilleures ligues de Suède : en plus d'héberger les joueurs plus talentueux, la SHL présente du jeu plus structuré et défensif tandis que l'Allsvenskan offre du hockey plus ouvert et échevelé.
Il faudrait toutefois être prudent avant de déprécier son bilan simplement parce que ses exploits n'ont pas été accomplis contre la crème de son pays. En effet, il reste inhabituel pour un joueur de son âge de brûler l'Allsvenskan.
Eriksson s'est classé au troisième rang des meilleurs marqueurs de la ligue avec une moyenne de 1,14 point par match. Dans le reste du top-10, on retrouve six trentenaires et deux joueurs de 29 ans. On ne parle pas ici d'une ligue pour les imberbes.
Lors de la saison 2022-2023, Noah Östlund et Liam Öhgren, à peine repêchés en première ronde par les Sabres de Buffalo et le Wild du Minnesota, ont respectivement amassé 26 points en 37 matchs et 20 points en 36 matchs. En 2016-2017, Jesper Bratt a cumulé 22 points en 46 matchs.
L'idée n'est pas de prétendre qu'Eriksson aurait dû être repêché cinq rondes plus tôt ni qu'il enchaînera les saisons de 70 points dans la LNH dans quelques années, mais de mettre en perspective ce qu'il a ajouté à son CV dans la dernière année.
« C'est difficile à expliquer, peinait-il lui-même à expliquer. Tout s'est mis à me sourire. Le coach m'a fait confiance, j'ai obtenu beaucoup de temps jeu, j'ai joué sur les unités spéciales. Ma confiance a grimpé. »
Eriksson a terminé sa saison dans la SHL. Il a marqué deux buts en sept matchs de séries éliminatoires avant que Växjö ne soit balayé en demi-finale par Rögle, la surprenante équipe de l'espoir du Canadien Adam Engström. Son objectif est de rester avec l'équipe à temps plein la saison prochaine.
« Je veux prendre du coffre, mais aussi gagner en confiance. Je veux essayer de jouer davantage avec la rondelle, croire en mes habiletés quand je l'ai sur ma palette. »
La bonne attitude de Zetterberg
Si vous voyez Eriksson cette semaine à Brossard, Alexander Zetterberg ne sera pas très loin. Les deux compatriotes viennent en paire autant sur la glace que dans les couloirs de l'aréna.
Zetterberg est l'un des quatorze joueurs qui ont reçu une invitation du Canadien après la conclusion du repêchage. Il s'agit d'un dénouement doux-amer pour lui. Il s'était rendu à Vegas dans l'espoir d'y être sélectionné. Craig Button, de TSN, le considérait comme le 53e meilleur espoir de sa cuvée. D'autres experts le voyaient sortir en troisième ou en quatrième ronde.
Il a finalement dû se contenter d'un texto d'un membre de l'organisation du Canadien, à la toute fin de la séance.
« C'est sûr que ça a été difficile, mais je regarde maintenant en avant. Je me suis mis un sourire dans le visage et je suis venu. Je n'ai pas de raison d'être fâché. Je suis le même joueur que j'étais avant », a-t-il philosophé.
Zetterberg est répertorié à 5 pieds 8 pouces et 159 livres. C'est assurément ce qui a incité plusieurs équipes à garder leurs distances avec cet attaquant qui a produit comme un déchaîné avec l'équipe des moins de 20 ans du club d'Örebro la saison dernière.
La saison prochaine, il fera le saut en Amérique du Nord alors qu'il s'alignera avec les Terriers de l'Université de Boston.
« Pour un jeune joueur de ma taille, c'est difficile de se faire justice chez les pros en Suède. En NCAA, j'aurai le temps de me développer physiquement et de travailler sur ce que je dois améliorer. »