CH : le développement demeure la priorité
TORONTO - À l'image des partisans et de tous les observateurs qui prédisaient une autre année misérable à son équipe, Kent Hughes est agréablement surpris du début de saison du Canadien.
Le directeur général ne se laisse toutefois pas berner par les victoires bien plus nombreuses que prévu. Pas question, non plus, de changer sa philosophie parce que le Tricolore frappe à la porte des séries.
« Le développement demeure la priorité », que Hughes a assuré, mardi, à sa sortie de la réunion des directeurs généraux, à Toronto.
En quête d'une quatrième victoire consécutive et d'un neuvième gain cette saison alors que les plus surprenants encore Devils du New Jersey étaient de passage au Centre Bell mardi, le Canadien gagne-t-il trop?
« On ne gagne jamais trop, car cela fait partie du développement de la culture qu'on veut instaurer chez nos joueurs. En même temps, nous sommes encore au mois de novembre. Nous sommes encore très loin des séries. Bien des choses peuvent se passer d'ici là », a philosophé le directeur général.
Un directeur général qui semble bien plus intéressé à mousser ses chances de gagner la loterie Connor Bedard ou de remporter le meilleur prix de consolation possible en vue du prochain repêchage, que par la possibilité d'atteindre les séries éliminatoires.
Mais si son équipe devait prolonger sa lancée du début de saison? Si elle se retrouvait toujours dans le portrait de séries dans le dernier droit de la période des transactions? Kent Hughes serait-il alors prêt à modifier sa philosophie afin d'aller chercher du renfort? De passer de club vendeur comme il admettait candidement l'être à l'aube de la saison, à un club acheteur?
« Je suis toujours ouvert à l'idée de m'adapter aux changements de situations. Mais il n'est pas question de sacrifier de l'avenir avec des espoirs ou des choix au repêchage pour améliorer le présent. »
Drouin : absence prolongée?
Il faut donc comprendre que l'état-major est toujours plus enclin à échanger un ou des vétérans afin de préparer l'avenir. Et ce même si l'avenir est déjà plus rose que gris.
C'est tant mieux!
Car il serait contre-productif de gérer à courte vue alors que Kent Hughes profite d'un immense capital de sympathie qui lui permet justement de planifier à long terme. Surtout que dans les victoires, comme dans la majorité des défaites encaissées jusqu'ici, les jeunes Suzuki, Caufield, Dach, Slafkovsky, Guhle, Harris, Xhekaj offrent des performances soutenues et des matchs excitants à leurs partisans.
L'éveil offensif de Mike Hoffman servira donc bien mieux la cause du Canadien s'il mousse de l'intérêt à l'endroit du vétéran au point de permettre à Hughes de l'échanger.
Ce qui est vrai pour Hoffman l'est aussi pour Evgeni Dadonov et les autres vétérans de son équipe. Les blessures qui gardaient Joel Armia et Jonathan Drouin hors de la formation n'aideront pas le Canadien à les échanger. Surtout dans le cas de Drouin dont l'absence pourrait se prolonger selon les dires du directeur général.
Kent Hughes est toutefois demeuré vague sur la durée.
Cela dit, une absence prolongée de Drouin permettrait de jongler plus facilement avec la liste de protection de 23 joueurs. Une liste qui deviendra encombrée avec le retour imminent de Michael Matheson qui n'a pas encore joué cette année.
Dach et Slafkovsky
Kent Hughes est aussi heureux des succès remportés par les deux premiers joueurs qu'il a greffés à sa formation l'été dernier. Kirby Dach qu'il a acquis des Blackhawks de Chicago et Juraj Slafkovsky qu'il a repêché, non sans surprise, avec la toute première sélection.
Bien qu'il complète un trio qui multiplie les points à la droite de Nick Suzuki et Cole Caufield, Kirby Dach pourrait un jour revenir au centre.
« C'est là qu'on le voyait quand nous avons fait son acquisition. Mais il est encore très jeune. Il a beaucoup de temps pour apprendre. La situation actuelle lui permet de reprendre de la confiance en récoltant des points. Une fois cette confiance revenue, il sera plus facile de prendre du temps avec lui pour améliorer les aspects défensifs et l'efficacité lors des mises au jeu », que Hughes a convenu.
Un autre exemple que pour l'état-major du Canadien, c'est le développement et la vision à long terme qui compte d'abord et avant tout.
Dans le cas de Juraj Slafkovsky, Kent Hughes souhaite voir son attaquant recru apprendre à mieux utiliser son physique sur la patinoire. Sans pour autant s'exposer à des suspensions, comme celle de deux matchs dont il a écopé pour sa mise en échec dans le dos de Matt Luff des Red Wings de Detroit.
« Juraj a raté des matchs en raison en raison de sa blessure et de sa suspension. Ça n'a d'ailleurs pas fait l'affaire de sa mère qui était venue le voir jouer... Mais on aime ce qu'il nous donne. On voudrait le voir adapter son jeu aux petites patinoires. Avec sa stature, on voudrait qu'il soit plus Nord-Sud pour mettre de la pression sur les adversaires. »
Des louanges pour St-Louis
Plusieurs facteurs expliquent les succès surprenants du Canadien en début de saison : la complicité Suzuki-Caufield, l'efficacité des autres jeunes, particulièrement des jeunes défenseurs qui jouent avec un aplomb plus qu'inattendu, le travail impeccable de David Savant, les performances des gardiens.
Une grande part des succès, mais surtout de l'attitude qu'affiche le Tricolore sur la patinoire, match après match, doit revenir à l'entraîneur-chef Martin St-Louis.
Kent Hughes sourit d'ailleurs de satisfaction lorsqu'on lui demande de commenter sa sélection du nouveau coach l'hiver dernier.
« Martin nous donne exactement ce qu'on attendait de lui. Il est passionné. Il partage sa passion. Il s'assure de bien communiquer avec ses joueurs, de leur faire comprendre ce qu'il veut obtenir d'eux. Il a la capacité de traité avec un d'une manière à obtenir ce qu'il veut et à changer sa manière de faire avec un autre pour s'assurer de réussir avec lui aussi. Il s'adapte. Il n'avait pas d'expérience, c'est vrai. Mais Martin a une confiance solide qui lui permet de poser des questions afin d'obtenir des conseils au lieu de se méfier des autres. Il a toutes les qualités recherchées et il fait du très bon travail pour nous », a assuré Kent Hughes.
Le directeur général a beau jeu de couvrir son coach de compliments. Car à un moment ou un autre cette saison, il pourrait devoir lui indiquer qu'il chambardera son alignement en échangeant un ou des joueurs qui l'aident au présent afin de mieux préparer l'avenir.
Mais il semble très clair que la philosophie de Hughes soit partagée par l'ensemble de l'état-major : de Jeff Gorton à Martin St-Louis.
Cette cohésion de l'état-major qui se reflète d'ailleurs sur la patinoire est peut-être le changement qui saute le plus aux yeux depuis le début de la saison.
Plus encore que les victoires et que le fait que le Canadien soit à la porte des séries plutôt que déjà dans les bas-fonds du classement général.