MONTRÉAL - Le directeur général Kent Hughes, son patron Jeff Gorton, l’entraîneur-chef Martin St-Louis et l’ensemble de l’état-major peuvent concocter tous les plans de relance qu’ils voudront, il sera difficile, voire impossible, de mener ces plans à terme tant et aussi longtemps que l’avenir de Carey Price ne sera pas réglé.

 

Et ce n’est pas pour demain. Ni après-demain alors que Carey Price a confirmé être toujours aux prises avec des contrecoups de l’intervention au genou qu’il a subie l’été dernier.

 

Des contrecoups qui se traduisent par des inflammations qui l’inquiètent. Des contrecoups qui l’empêcheraient de disputer au-delà de 50 matchs la saison prochaine si son genou devait être dans le même état l’automne prochain. Des contrecoups qui pourraient l’obliger à subir une nouvelle intervention. Des contrecoups qui pourraient même mettre un terme hâtif à sa carrière.

 

Un spectre avec lequel il a d’ailleurs jonglé toute la journée vendredi à l’aube de l’affrontement face aux Panthers de la Floride. Un duel qu’il a gagné pour savourer sa première victoire de la saison, sa 361e et peut-être dernière en carrière.

Des décisions basées sur le développement des jeunes

 

« Je suis très conscient que le match d’hier était peut-être mon dernier. C’est pour cette raison que j’ai apprécié chaque minute de la journée. J’étais bien. J’étais en forme. J’ai disputé un bon match malgré les limites associées à l’état de mon genou. La victoire, les réactions de la foule, l’ovation que j’ai reçue lors de mon retour, je me suis assuré de savourer tout ça. Ce qui fait que si j’ai disputé mon dernier match, il m’aura permis de terminer d’une belle façon », que Price a convenu avec une belle franchise.

 

Le gardien a même admis avoir joué avec le feu en fin de troisième période lorsqu’il a salué son épouse et l’une de ses filles assises dans la première rangée à sa droite alors qu’Alexander Romanov était en possession de la rondelle à quelques pieds de son filet.

 

« J’ai vu ma fille qui me saluait de la main et j’ai décidé de lui répondre. J’aurais toutefois dû m’assurer qu’il y avait bel et bien eu un coup de sifflet alors que je croyais que le jeu était arrêté », que Price a plaidé.

 

Malgré tous les nuages qui laissent entrevoir un avenir sombre, Carey Price assure qu’il prendra tous les moyens à sa disposition pour retrouver la forme nécessaire pour lui permettre de reprendre sa place de gardien numéro un et de remplir ce rôle avec le Tricolore.

 

Pieds et poings liés

 

Comment Kent Hughes pourra-t-il composer avec l’incertitude associée à l’avenir de Carey Price? Le directeur général est le premier à reconnaître qu’il sera bien difficile d’y arriver.

 

« Ce serait plus facile si tout était noir et blanc, mais il faudra composer avec cette situation », a simplement convenu Hughes qui aurait pu profiter d’un retour en forme et en force de son gardien pour tenter de l’échanger au cours de l’été.

 

Ce qui semble bien difficile à faire alors que l’incertitude la plus complète règne toujours dans son cas.

 

Carey Price commande un salaire qui occupe 10,5 millions sur la masse salariale du Tricolore. Si on ajoute à ces 10,5 millions $, les 7,857 millions $ associés au contrat de Shea Weber, les 6,250 millions $ reliés au contrat de Jeff Petry et les 7 millions $ supplémentaires qu’empochera annuellement dès la saison prochaine Nick Suzuki, Kent Hughes dépensera plus de 31,6 millions $ sur ces quatre joueurs. Ce qui représente autour de 38 % de la masse salariale du Tricolore.

 

Avec Shea Weber dont la carrière est fichue en raison de la blessure à un pied qu’il traîne depuis des années, le Canadien pourrait difficilement se permettre de «geler» les 10,5 millions $ du contrat de Carey Price encore l’an prochain s’il devait être incapable de jouer.

 

Bon! Hughes et Gorton pourraient encore le faire, mais cela les empêcherait d’amorcer la relance qu’ils tiennent à mettre en branle. Une relance qui sera peut-être plus longue que prévue considérant le fait que l’état-major a les pieds et les pieds et les poings liés par des contraintes économiques qui rendront plus difficile encore le travail qui s’annonçait déjà ardu de relancer l’équipe.

 

Échanger Weber et Petry sans les donner

 

Kent Hughes croit encore qu’il sera possible d’échanger le contrat de Shea Weber à un club qui voudra profiter de son contrat pour gonfler sa masse salariale de 7,857 millions $ pour les quatre prochaines années alors qu’il n’aura que six millions $ à verser en salaire réel. Et encore! Car la presque totalité du salaire à verser à Shea Weber d’ici la fin de son contrat est couverte par des assurances.

 

Jeff Petry est toujours un candidat à une transaction. Et Kent Hughes continuera à tenter de satisfaire son vétéran défenseur qui veut mettre le cap sur les États-Unis afin d’y rejoindre sa famille.

 

Mais il est hors de question de donner Petry que Hughes a assuré samedi matin dans le cadre du bilan du Tricolore.

 

Je veux bien.

 

Mais s’il est incapable de se débarrasser du contrat de Weber – les informations recueillies au cours des dernières semaines indiquent toutefois que le Tricolore aurait plus de 50 % de chance d’y arriver – et que Carey Price est incapable de jouer à la hauteur de son contrat encore l’an prochain, Hughes devra peut-être simplement offrir Petry pour se donner un peu de marge de manœuvre sous le plafond.

 

Il pourrait même être obligé de garder une portion de son salaire sur les quatre prochaines saisons.

 

Ce que Hughes espère ne pas avoir à faire.

 

Et on le comprend.

« C'est possible que ma famille revienne à Montréal »

 

Car dans les plans qu’il a concoctés, Hughes reconnaît qu’il voudrait remplacer Petry par un autre vétéran si jamais le défenseur malheureux était finalement échangé.

 

Pour remplacer Petry par un vétéran défenseur de son niveau, le Canadien devra dépenser autant sinon plus.

 

À titre d’exemple, si Kent Hughes décidait de se lancer à la chasse de son ancien client Kristopher Letang qui vient de connaître, à 35 ans, une saison du tonnerre avec les Penguins de Pittsburgh qui sont encore cette année en séries, il serait difficile de lui faire accepter une grosse perte de salaire alors qu’il touchait 7,25 millions $ cette année.

 

Pourquoi alors ne pas se tourner vers les nombreux jeunes arrières qui se pointent au sein de l’organisation? Parce que Kent Hughes tient à être prudent.

 

« On fera de la place à des jeunes défenseurs la saison prochaine. C’est clair. Mais peut-être que nos jeunes alterneront entre Montréal et Laval au fil de la saison, car ce sera ce qui sera le plus important pour leur développement. On veut placer nos jeunes joueurs dans les meilleures situations possible pour maximiser leur développement. Il n’est donc pas question de prendre des décisions qui règleraient des problèmes à court terme tout en en créant de nouveaux à long terme. »

 

Sur ce point, il est impossible de contredire Kent Hughes.

 

Mais ça nous ramène à la base du problème : pour couvrir la hausse salariale de sept millions que touchera Nick Suzuki, pour embaucher un vétéran défenseur qui viendra épauler Joel Edmundson et David Savard dans le parrainage des plus jeunes, pour améliorer la ligne de centre, trouver un ailier qui saura donner un coup de main à Cole Caufield afin d’aller marquer des buts importants il faudra trouver de l’espace sous le plafond salarial.

 

Ce qui est plus facile à dire qu’à faire…

 

St-Louis de retour… avec ses adjoints

 

En attente des informations qui lui permettront de voir plus clair dans le dossier Carey Price, en attente des motivations de certains clubs à s’intéresser au contrat de Shea Weber ou au vétéran défenseur Jeff Petry, Kent Hughes a les yeux rivés sur des dossiers plus urgents à régler.

 

À commencer par celui de Martin St-Louis. Si le coach a clairement indiqué, après le dernier match vendredi soir, qu’il était prêt à retirer le qualificatif par intérim associé à son titre d’entraîneur-chef, Kent Hughes voudrait obtenir la garantie de son coach qu’il sera à la barre pour au moins les trois prochaines années.

 

Ce que St-Louis n’a pas encore considéré : «Un an, deux ans, trois ans, je n’ai pas encore pensé à ça. J’aime le hockey, je voulais revenir dans la Ligue nationale et je suis content d’avoir fait le saut avec le Canadien. Pour le reste, on va parler Kent et moi au cours des prochains jours», que le coach a tranché.

 

St-Louis a été plus tranchant encore sur la question de ses adjoints. Des adjoints dont il a hérité à son arrivée en février dernier. Des adjoints qu’il entend retrouver à l’ouverture du camp d’entraînement l’automne prochain.

« Je ne sais pas quel genre d'entraîneur je serai l'année prochaine »

 

« Je suis très à l’aise avec les gars qui sont en place. Ce sont de très bons gars de hockey. On travaille bien ensemble. Ils ont tous joué et jouaient encore il n’y a pas si longtemps et c’est très important à mes yeux », que St-Louis a affirmé.

 

Luke Richardsson, Alex Burrows, Trevor Letowski et même l’entraîneur des gardiens Éric Raymond qui était un proche de Dominique Ducharme sont donc en sécurité. Si la décision finale revient à Martin St-Louis, bien sûr.

 

Et ces adjoints n’ont pas à craindre l’arrivée d’un vétéran qui pourrait venir conseiller leur patron. L’idée d’être épaulé par un John Tortorella ou un autre coach d’expérience sans travail en ce moment ne semble pas sourire à St-Louis.

 

« Je ne crois pas avoir besoin de ça maintenant. J’ai des choses à améliorer j’en suis conscient. Je devrai être meilleur dans ma communication hors patinoire avec les soigneurs et les gars d’équipement afin de faciliter leur travail et d’obtenir de l’information. Mais pour le moment, je suis satisfait avec le groupe qui est en place. »

 

Parallèlement au dossier St-Louis que Kent Hughes devrait régler rapidement, le directeur général prépare activement le repêchage. Un repêchage qui se déroulera au Centre Bell et dont le Canadien pourrait obtenir la toute première sélection s’il gagne la loterie le 10 mai prochain. Une loterie dont il détient les meilleures chances de gagner le gros lot (25,5 %) grâce à sa 32e et dernière place au classement général.

 

« Nous étions en Allemagne la semaine dernière pour assister au Championnat du monde des moins de 18 ans. Nous irons aussi en Finlande – les Championnats du monde seniors se dérouleront à Helsinki – afin de voir des joueurs qui pourraient nous intéresser. »

 

Avec 14 sélections lors des sept rondes du prochain repêchage, il sera intéressant de voir de quelle façon le Canadien s’y prendra pour combler ses besoins à moyen et long termes. Car à court terme, il n’est pas acquis que les joueurs les plus en vue soient assurés de pouvoir venir aider le club dès octobre prochain.

 

Il sera aussi intéressant de voir si le Kent Hughes, Jeff Gorton et les dépisteurs qui les conseillent profiteront du grand nombre de sélections du Tricolore pour mousser des transactions.

 

Une solution qui pourrait aider l’état-major à apporter des améliorations en dépit de l’incertitude associée à Carey Price, Shea Weber, Jeff Petry et aux gros contrats qu’ils traînent avec leur équipement.

 

Les prochaines semaines seront cruciales pour le Canadien dans sa quête de trouver une manière de relancer l’organisation vers les séries dans un avenir plus ou moins rapproché.

 

Dès l’an prochain?

 

Ce serait rêver en couleur alors qu’il semble difficile, voire impossible, d’effectuer tous les changements nécessaires pour propulser cette équipe qui a terminé à 45 points des séries cette année est-il besoin de le rappeler.

 

Comme quoi après une saison atrocement difficile, le plus dur reste encore à venir.