Une éclipse de 250 secondes pour le CH
Parfait en première période, le Canadien de Montréal faisait mentir tous ceux et celles – vous pouvez ajouter mon nom à la liste – qui anticipaient un match très difficile au surlendemain d'un match trop facile contre des Ducks d'Anaheim qui battaient de l'aile.
Efficaces en défensive, incisifs en échec avant, les joueurs de Martin St-Louis ne donnaient rien de rien à leurs adversaires des Rangers de New York.
D'Artemi Panarin à Alexis Lafrenière, de Mika Zibanejad à Adam Fox, les Blue Shirts étaient tellement muselés qu'on peinait à comprendre comment ils pouvaient surfer sur une séquence de cinq gains consécutifs au fil desquels ils avaient marqué 18 gros buts en avaient accordé sept petits.
Mieux encore et contrairement à mardi, face aux Ducks, le premier trio n'était pas seul à contribuer à l'efficacité du Tricolore en première période.
En plus d'inscrire le premier but dans un deuxième match de suite – en passant, ses trois buts cette saison ont ouvert la marque – Jake Evans pilotait un trio complété par Tanner Pearson et Josh Anderson qui donnait de sérieux ennuis à ses adversaires.
Le trio de Brandon Gignac, flanqué de Michael Pezzetta et Brendan Gallagher de retour après sa suspension de cinq parties, n'avait rien à envier à celui d'Evans, d'Alex Newhook et même de Nick Suzuki. Chaque fois qu'ils étaient envoyés sur la glace, ces trois joueurs de qui on n'attendait pas grand-chose emboîtaient ceux des Rangers.
Les statistiques affichées par les Rangers en première période – 45 buts marqués, 48 accordés – confirment qu'ils commencent souvent leurs matchs en retard.
Les mauvaises langues ajouteront qu'il semblait évident qu'ils prenaient le Canadien à la légère.
Peu importe! Ce qui comptait pour St-Louis et les partisans de son équipe, c'est que les joueurs du Tricolore travaillaient plus et mieux que leurs adversaires. Qu'ils n'étaient pas rassasiés par le jeu blanc de 5-0 infligé aux Ducks mardi.
La crème a remonté sur le petit lait
Revenu sur la patinoire la tête haute et le torse bombé pour amorcer la période médiane, les joueurs du Canadien l'ont quittée la tête entre les jambes une quarantaine de minutes plus tard.
Comment expliquer l'éclipse de 250 secondes au cours de laquelle le Canadien qui jouait si bien, qui était si efficace, a bêtement regardé les Rangers enfiler quatre buts sans riposte?
Il serait un brin méchant, sans être totalement faux, cela dit, de simplement avancer que la crème a remonté sur le petit lait.
Après tout, les Rangers forment une des bonnes équipes de la LNH cette saison.
Et s'ils ont habitué leurs partisans et adversaires à de lents débuts de rencontre, la deuxième période est statistiquement leur meilleure. Il affichait un différentiel de +14 (61 buts marqués, 47 accordés) avant de croiser le Canadien jeudi. Ce différentiel est maintenant de +17 alors que les Blue Shirts ont gagné le deuxième vingt 4-1.
Mais ce n'est pas tout. Aussi bons soient les Rangers en période médiane, le Canadien les a aidés.
Pendant l'éclipse de 250 secondes, il a arrêté de patiner. Les acteurs, autant les vedettes que les figurants, qui remplissaient l'écran géant surplombant la patinoire, se sont mis à le regarder. Ils sont devenus des spectateurs.
Et comme Samuel Montembeault n'avait pas de magie dans ses jambières pour sauver des coéquipiers qui l'ont abandonné le temps de l'éclipse, le match si bien amorcé a finalement bien mal fini.
En prime, la contestation de St-Louis après le but de Zibanajed – pour faire 3-1 New York – a été rejetée par les officiels. Avec raison. Cela a ouvert la porte au quatrième but marqué pendant la pénalité écopée pour avoir retardé le match.
Est-ce que St-Louis aurait dû encaisser le but sans contester?
C'est trop facile à dire après coup. Dans le feu de l'action, il était normal de croire que Chris Kreider pouvait avoir nui suffisamment au travail de Montembeault pour plaider l'obstruction aux dépens du gardien. Mais au fil des reprises, on a finalement vu que Montembeault a été le principal artisan de son malheur alors que la « pomme » de son bâton s'est accrochée dans les mailles du filet. Avec le doublé de conséquences négatives que cela a entraîné.
Il y avait matière à contestation. Et comme une contestation confirmée aurait gardé le Canadien a seulement un but de recul sur les Rangers, il était normal d'afficher un brin d'agressivité dans la décision.
Mais bon...
Du positif à tirer
Aussi sombre soit-elle, l'éclipse qui a plongé le Canadien dans le noir pendant 250 secondes ne devrait pas porter ombrage à ce que le Canadien a fait de bien hier.
La contribution des trios de soutien au cours d'une première période très efficace – du gros hockey sur la route – confirme que les partisans sont en droit de s'attendre à ce genre de hockey plus souvent de leur part.
Et même si les quatre buts des Rangers ont fait très mal, le Canadien n'a pas abandonné totalement.
Juraj Slafkovsky a prolongé sa séquence offensive éclatante en marquant un but magnifique avec un tir des poignets aussi vif que précis. Le genre de tir qu'il devrait décocher plus souvent et qui lui permettra de multiplier les buts quand il le fera.
Le genre de tir qu'il pourrait utiliser plus souvent en avantage numérique si Mike Matheson regardait sur sa droite en avantage numérique au lieu de s'entêter à regarder à gauche ou vers le but.
Pourquoi Matheson, dont le flair offensif est si développé, se prive ainsi d'une complicité avec Slafkovsky qui permettrait aux deux joueurs de mousser leurs statistiques offensives?
Respect des stratégies élaborées? Plus d'aisance à repérer un coéquipier sur son côté fort? Attention concentrée à chercher un corridor pour rendre la rondelle au filet? Toutes ces réponses? Sais pas!
Mais jeudi soir, à MSG, ça sautait aux yeux que Matheson ne regardait pas autant qu'il aurait pu et dû le faire sur son côté droit.
Cole Caufield a marqué deux fois pour tenter, lui aussi, de ramener son équipe dans le coup.
En passant, c'était son premier match de deux buts de la saison. Il devient le septième joueur du Canadien à s'approcher d'un tour du chapeau après Sean Monahan, Newhook et Suzuki qui l'ont fait deux fois, Jesse Ylönen, Anderson et Slafkovsky qui l'ont fait une fois chacun.
L'ennui, c'est que le Canadien, loin de profiter du but de Slafkovsky et du premier de Caufield pour revenir dans le match, n'a pas été en mesure d'empêcher les répliques rapides des Rangers.
Le Canadien a eu quelques occasions de resserrer la marque en fin de match alors que Fox et Lafrenière ont offert des attaques massives au Canadien.
Mais Jonathan Quick a réalisé ce que Montembeault n'a pas été en mesure de faire jeudi soir, après l'avoir fait samedi contre Dallas, et très souvent depuis le début de la saison : quelques gros arrêts susceptibles de donner une chance de victoire à son équipe. Ou de confirmer le gain.
Entre les lignes
– Pendant que le Canadien est toujours en quête d'un premier tour du chapeau cette saison, il en a encaissé un quatrième cette saison. Kreider a été précédé par Auston Matthews lors du premier match de la saison, à Toronto, par Tyler Toffoli (Devils du New Jersey) et Danton Heinen (Bruins de Boston)...
– Le Canadien a encaissé quatre buts consécutifs dans un 10e match cette saison. Sans surprise aucune, il a perdu ces dix rencontres en temps réglementaire...
– C'était la 16e fois cette saison que le Canadien retraitait au vestiaire avec une avance après 20 minutes de jeu. Il a encaissé seulement sa deuxième défaite en temps réglementaire (9-2-2-3) en pareille circonstance...
– Les joueurs de centre des Rangers ont haché finement ceux du Canadien qui ont perdu 43 des 68 mises en jeu (37 %) disputées jeudi soir au Madison Square Garden...
– C'était seulement la 14e fois cette saison que le Tricolore était dominé au cercle des mises en jeu. L'efficacité de 37 % égale la pire performance jusqu'ici cette saison (22 en 60) survenue le 24 octobre dernier alors que les Devils avaient battu le CH 5-2 au Centre Bell...