Stéphane Auger veut que l'arbitrage devienne une entité en soi
Au-delà des chiffres inquiétants à propos de la violence envers les arbitres révélés mercredi par HEC Montréal, le directeur général de Hockey Québec, Stéphane Auger, se réjouit d'avoir des données scientifiques avec lesquels s'attaquer au problème.
Nommé de façon intérimaire à la tête de la fédération à la suite de la démission de Jocelyn Thibault en février, l'ancien arbitre de la Ligue nationale de hockey (LNH) a été officiellement nommé à son poste le 2 octobre dernier.
Les dossiers sont nombreux sur son bureau. Mais l'étude dirigée par le professeur Éric Brunelle, directeur et fondateur du Pôle sport HEC Montréal, a offert à Hockey Québec une plateforme crédible pour se pencher sur un problème majeur du hockey mineur.
« C'est du bonbon pour moi, s'est exclamé Auger à propos de l'étude, jeudi. Ma passion, c'est l'arbitrage – le hockey, mais aussi l'arbitrage. D'avoir le HEC qui s'intéresse à l'arbitrage, c'est "l'fun". Il n'y avait pas énormément d'études et de données sur l'arbitrage. Je vois ça d'un très bon œil, et on va s'en servir pour la suite des choses. »
« L'une des conditions de mon embauche, c'était que l'arbitrage devienne une entité en soi (au sein de Hockey Québec). L'arbitrage a toujours été un petit peu mis de côté. Moi, je trouve que c'est une partie super importante », a-t-il poursuivi.
Quelque 85 % des arbitres sondés dans le cadre de l'étude ont révélé avoir été victimes de violence verbale. Ce sont 45 % d'entre eux qui ont reçu des menaces ou qui ont vécu de la violence physique.
Cette violence est la cause de toxicité, d'épuisement, de diminution du bien-être et de désengagement qui poussent certains d'entre eux à laisser tomber l'arbitrage, peut-on lire dans le rapport.
« Un acte de violence envers un arbitre, c'est déjà trop. Les chiffres sont... le bon mot, c'est épeurant, a dit Auger. La différence avec le monde du travail normal n'a aucun sens. Je pense qu'au fil des années, des gens ont banalisé ça un peu. C'est à nous de donner les outils aux arbitres et aux intervenants pour améliorer le climat. »
L'étude propose 15 pistes de solutions concrètes regroupées en trois recommandations: renforcer le soutien organisationnel, soutenir la communauté d'arbitres et promouvoir la résilience des arbitres.
Tout un éventail de mesures est déjà en place chez Hockey Québec, mais Auger estime que l'étude permettra d'aiguiller un peu plus le plan d'action de son organisation.
« On avait déjà commencé en mettant en place un département d'arbitrage chez Hockey Québec avec une structure qui va vraiment permettre aux gens du terrain d'être directement attachés avec la fédération, a-t-il expliqué. Elles (les recommandations) viennent solidifier ce qu'on fait présentement, mais au-delà de ça, c'est de prioriser la façon dont on va le faire. »
« C'est parti et on travaille avec les parties prenantes pour faire avancer les choses. On le fait comme il le faut, on ne brusque rien, puisqu'on veut s'assurer que cette réforme, qui est assez majeure, fonctionne », a-t-il ajouté.
L'une des prémisses de cette étude était qu'il y a une pénurie d'arbitres au Québec. Or, si le problème s'est quelque peu résorbé en vertu des mesures récemment implantées par Hockey Québec, un problème demeure: de nombreux arbitres quittent le milieu après quelques années.
« Les jeunes arbitres s'inscrivent. Le défi qu'on a, c'est qu'ils ne restent pas, s'est désolé Auger. Près de la moitié part après un an ou deux. Il est là le problème: le taux de roulement. L'arbitrage, ce n'est pas juste d'apprendre le règlement; ça prend du temps. C'est du 'millage'. Tu ne deviens pas bon arbitre du jour au lendemain. Si on recommence tout le temps avec des nouveaux, c'est difficile de développer une expertise. »
« Évidemment, ça affecte le niveau du jeu et tout le développement du hockey », a-t-il résumé.
Gouvernance et hockey féminin
Deux autres priorités marqueront le mandat d'Auger à la barre de Hockey Québec: la gouvernance et le hockey féminin.
Lorsque Thibault a quitté son poste, il a lancé un message très clair à son successeur. Certains dirigeants d'associations régionales ne veulent rien entendre des changements au niveau de la gouvernance.
Pour Auger, le chantier n'en est qu'à ses débuts. L'accueil positif au sein des associations du projet pour un département d'arbitrage semble être un premier pas positif dans les relations. Le directeur général croit que les associations ont adhéré au plan et que ça va «super bien».
En ce qui a trait à la gouvernance, Auger estime qu'il n'a pas toutes les données en main pour se prononcer. À la fin du mois de juillet, Hockey Québec a annoncé qu'elle avait mandaté la firme KPMG pour procéder à un audit de ses programmes Sport-études et des 14 associations régionales.
« Les régions ont embarqué dans ça, a-t-il avancé. Ce qu'on leur a dit, c'est qu'on aimerait avoir un portrait de la situation. On veut voir quelles sont les problématiques. Le processus est en place, et pour l'instant, tout le monde participe bien. »
« C'est dur de prendre des actions quand des informations te manquent. Là, on va avoir un portrait général », a-t-il expliqué.
Auger a mentionné qu'il allait porter une attention particulière au développement du hockey féminin lors de sa nomination. Il est rapidement passé de la parole aux actes en mettant sur pied un département de hockey féminin et en faisant de Stéphanie Poirier sa directrice.
« C'est la première action que j'ai faite en poste », a fièrement déclaré Auger.
« Il faut plus de joueuses. On est à peu près à (8100) joueuses au Québec, et il y en a plus de 50 000 en Ontario. Évidemment, il y a une culture, un développement qui s'est fait là-bas et qui, pour toutes sortes de raison, n'a pas atteint le même niveau ici », a-t-il conclu.