Charles-Édouard D'Astous est en pleine maîtrise de son sujet en Suède
MONTRÉAL – Plusieurs questions ont suivi le Québécois Charles-Édouard D'Astous dans sa préparation pour sa sixième saison dans le hockey professionnel. Et elles étaient toutes légitimes.
Comment allait-il s'ajuster à un calibre de jeu plus relevé? De quelles responsabilités hériterait-il avec sa nouvelle équipe? Comment cette équipe, nouvellement promue, se tirerait-elle d'affaire à un niveau supérieur?
Il connaît aujourd'hui les réponses. Et elles sont toutes positives.
Après avoir réussi sa transition européenne avec un stage de deux ans en Finlande, D'Astous brille cette saison en première division suédoise. Avec 31 points en 32 parties, il est non seulement le deuxième pointeur de son équipe, mais le défenseur le plus productif de toute la SHL. Son différentiel de +22 l'érige aussi au rang de référence dans sa nouvelle ligue.
À 26 ans, l'ancien capitaine de l'Océanic de Rimouski a l'impression d'être en pleine maîtrise de son sujet.
« Je savais que je pouvais bien faire, mais je ne mentirai pas... Sans dire que je suis surpris, on a tellement de bons défenseurs, pourtant c'est moi qui joue sur la première vague de l'avantage numérique. Je ne m'attendais peut-être pas à ça, », nous avouait D'Astous lorsque nous l'avons rejoint à la fin du mois de décembre.
D'Astous est arrivé au Brynäs FC l'été dernier sur recommandation de l'entraîneur-adjoint Ove Mollin, dont le fils avait été un de ses coéquipiers en Finlande. Il a été l'un des quatre défenseurs ajoutés à une brigade renforcée pour un retour en première division.
Victor Söderström, le 11e choix au total du repêchage de la LNH en 2019, rentrait au pays après trois saisons passées en Amérique du Nord. Même chose pour Axel Andersson, un choix de deuxième ronde des Bruins de Boston. Christian Djoos, vétéran de 180 matchs dans la LNH et vainqueur de la Coupe Stanley avec les Capitals de Washington, revenait lui aussi au bercail en provenance de la Suisse.
Parmi ces anciennes pépites et ces vétérans aguerris, c'est à D'Astous, qui n'a jamais pu s'implanter à un niveau plus élevé que l'ECHL avant de faire le saut en Europe, qu'on a confié le rôle de général. « Mes entraîneurs m'avaient beaucoup vu jouer et savaient de quoi j'étais capable. Dès le début, on m'a donné beaucoup de temps de glace, beaucoup de responsabilités. Et j'ai répondu à l'appel. »
Talent + chimie = succès
Le passage vers une nouvelle ligue et l'adaptation à de nouveaux coéquipiers sont toujours un petit saut dans le vide. Mais il y avait une part d'inconnu supplémentaire dans le pari que D'Astous a relevé en acceptant l'offre de Brynäs.
Le club basé à Gävle, au nord de Stockholm, a passé la saison 2023-2024 dans l'Allsvenskan, le deuxième championnat en importance au pays. En y raflant les grands honneurs, il a rapidement mérité une promotion dans la grande ligue. Mais pour y être compétitif, il ne pouvait y retourner avec le même effectif.
En plus des acquisitions déjà mentionnées en défense, les dirigeants ont rapatrié trois joueurs locaux avec l'expérience de la LNH : les attaquants Jakob Silfverberg et Oskar Lindblom en plus du gardien Erik Källgren. Deux Américains, dont l'ancien choix de première ronde des Canucks de Vancouver Jordan Schroeder, sont aussi débarqués dans le vestiaire.
Ça aurait pu partir dans toutes les directions. Mais D'Astous, qui dit avoir été accueilli comme un frère par le vétéran canadien Greg Scott, s'est tout de suite senti comme dans une grande famille.
« Les nouveaux, c'était des anciens nouveaux, si je peux dire ça. Silfverberg, par exemple, a joué son junior et ses premières années pro ici. Même chose pour Djoos, même chose pour Lindblom, même chose pour Söderström. Donc la plupart de nos nouveaux, c'était juste des gars qui revenaient à la maison. »
Ce fort sentiment d'appartenance partagé par des joueurs aussi doués a créé à Gävle une tempête parfaite. Après 35 matchs d'un calendrier qui en comprend 52, Brynäs occupe le premier rang du classement général.
« Je ne dirais pas que c'est un choc, estime le Rimouskois. Quand tu regardais notre alignement au début de l'année, on savait qu'on était bons. Mais à ce point-là? C'est sûr qu'on est un peu surpris. Mais notre succès s'explique facilement. Oui, tous les gars qui sont revenus ici ont beaucoup de talent, mais on est une équipe qui travaille extrêmement fort. »
Une étiquette à décoller
D'Astous a toujours été un défenseur porté vers l'attaque. Il a produit à un rythme supérieur à un point par match durant ses deux dernières saisons dans la LHJMQ ainsi qu'à sa dernière saison professionnelle en Amérique du Nord. Une fois habitué au style de jeu européen, il s'est réapproprié son identité. Il a cumulé 46 points en 54 matchs à sa dernière saison en Finlande.
Aujourd'hui, alors qu'il caresse le rêve d'apparaître sur l'écran radar d'une équipe de la LNH, il réalise que ses statistiques attirent l'attention et peuvent le placer dans certaines conversations. Mais son expérience lui permet aussi d'en reconnaître les effets pervers.
« C'est plate à dire, mais je pense que mes points et mon talent offensif me nuisent quasiment. Je pense que quand tu vois un défenseur comme ça, souvent les équipes vont des dire "Ah, mais il n'est pas capable de...".Surtout dans la Ligue américaine. Tu es identifié comme un joueur offensif et ça arrive parfois qu'ils ne te regardent quasiment pas parce qu'ils croient que tu ne peux pas jouer défensivement », déplore-t-il.
« Il y a une différence entre voir les chiffres et regarder un match, poursuit-il. Je pense que défensivement, je suis vraiment solide. Depuis que je suis parti de l'Amérique, je me suis vraiment amélioré de ce côté-là. Dans mes trois dernières années, j'ai joué beaucoup en désavantage numérique contre les grosses lignes, contre des gars qui ont joué du haut niveau. Je fais super bien. Cette année, je suis premier dans les ‘+/-‘ dans toute la ligue au complet. Oui je fais des points, mais si je fais deux buts et que je me fais scorer deux à tous les matchs, je vais être à zéro. »
« C'est quelque chose qui me rend fier, de bien faire défensivement. Je ne suis vraiment pas stressé que je serais capable d'affronter des gars dans la Ligue nationale. »