Le « déclic » d'Antonin Verreault
Le RDS.ca webdiffuse le duel entre les Huskies et les Voltigeurs dès 19 h ce soir.
MONTRÉAL – Martin Dagenais s'allouait 24 heures. Une journée complète avant de se justifier. Cela laisserait le temps à Antonin Verreault de décompresser, pensait-il, après avoir réchauffé le banc pour la majeure partie de la troisième période du match contre les Eagles du Cap-Breton.
Ce soir-là, le 14 octobre dernier, les Huskies de Rouyn-Noranda ont signé un gain de 4-2 contre des visiteurs dirigés par Louis Robitaille, l'ancien entraîneur-chef de Verreault chez les Olympiques de Gatineau de 2020 à 2023.
« Je ne l'ai presque pas fait jouer parce que je trouvais qu'il essayait de trop en faire. Il ne jouait pas de la façon qu'on voulait qu'il joue », se souvenait l'entraîneur-chef des Huskies, jeudi, en entrevue au RDS.ca.
« Le lendemain matin, j'arrive à l'aréna et c'est le premier qui m'attend à mon bureau. Il fallait qu'il me parle tout de suite. »
Fut un temps, au cours des dernières campagnes, où l'attaquant de 19 ans aurait sans doute ruminé pareil rappel à l'ordre pendant encore un, deux, voire trois matchs avant de mettre les choses au clair.
« Des fois, je gardais un peu trop d'affaires à l'intérieur. »
Plus maintenant.
« Je suis un joueur de 19 ans dans la ligue et ils ont quand même beaucoup donné pour m'avoir. Je pense que c'était important de comprendre pourquoi [on ne m'avait pas utilisé en fin de match]. »
« On s'est assis 40 minutes ensemble, révèle Dagenais, qui était à ce moment peu satisfait du jeu sans la rondelle de son joueur étoile. Il a joué un super bon match contre les Sea Dogs de Saint John le lendemain à la maison. Et depuis ce temps-là, c'est le jour et la nuit. »
Les chiffres le prouvent. Dans les 10 matchs qui ont suivi la discussion, le 2e choix au total du repêchage de 2020 n'a été blanchi qu'à deux reprises, inscrivant 10 buts et récoltant neuf passes. Dans sept de ces rencontres, il a ajouté au moins deux points à son dossier qui en compte aujourd'hui 29, le cinquième plus haut total du circuit. Le modeste différentiel cumulatif de plus-1 qu'il affichait au terme de son neuvième match contre les Eagles est quant à lui passé à plus-14.
« Depuis cinq semaines, c'est notre meilleur attaquant, observe Dagenais. Il y a comme un déclic qui s'est fait. Est-ce que ça va continuer? On l'espère. Il lance plus au filet, il est plus engagé et il ne triche pas. Je peux l'employer autant en désavantage numérique qu'en avantage numérique. »
Une utilisation qui fait du bien, concède le principal intéressé, après deux saisons où il ne l'a pas eu facile.
Antonin Verreault
« La pire année de ma vie »
Élu recrue offensive par excellence de la LHJMQ au terme d'une campagne 2020-2021 tronquée par la pandémie de COVID-19, le petit attaquant de 5 pi 8 po et 166 lb a amorcé le calendrier régulier suivant avec l'étiquette d'espoir de premier plan.
Selon la première liste de joueurs à surveiller publiée à l'époque par la Centrale de recrutement de la LNH, Verreault était un candidat pour les deux premières rondes du repêchage de 2022. Mais une blessure persistante à un poignet a miné à la fois ses performances et ses chances que ces projections deviennent réalité.
« Mon année de 17 ans, ç'a pas mal été la pire année de ma vie mentalement. Je pensais me faire repêcher et ça n'a pas été le cas. »
Opéré au cours de l'été 2022 pour soigner cette blessure, Verreault a non seulement dû faire une croix sur le camp des recrues des Oilers d'Edmonton auquel il était convié, il a de plus été contraint de faire l'impasse sur les trois premiers mois de la saison 2022-2023.
Ce n'est que le 23 novembre qu'il a effectué un retour au jeu. Moins de deux mois plus tard, c'est une fracture de la mâchoire qui l'écartait momentanément à nouveau de la patinoire. Rien pour l'aider à solidifier sa place dans le haut de la hiérarchie offensive gatinoise, récemment bonifiée par les arrivées de Riley Kidney, Alexis Gendron et Cam MacDonald.
« Ç'a été vraiment dur pour moi de moins jouer, confie celui qui a été limité à 38 matchs et une récolte de 29 points l'an dernier. Je suis passé d'être classé dans les deux premières rondes [du repêchage de la LNH] à 17 ans, à jouer 13-14 minutes l'année passée en séries. J'ai trouvé ça vraiment dur, mais en même temps on avait vraiment une bonne équipe. C'était important pour moi de rester avec eux autres l'année passée. »
À la conclusion de celle-ci, il avait toutefois tourné la page et demandé un échange.
« C'est juste que je ne voulais pas faire partie d'une reconstruction, explique-t-il. Je voulais vraiment avoir la chance de compétitionner avec une autre équipe et essayer cette fois-là d'aider cette équipe à gagner la coupe. »
Chez les Huskies, qui ont fait son acquisition en retour de deux choix de première ronde et un autre de deuxième tour, c'est ce que Verreault semble avoir trouvé. Épaulés par les champions de la Coupe Memorial William Rousseau et Jérémy Langlois, de même qu'Andrei Loshko, également ajoutés à la formation au cours de l'été, le rapide ailier gauche aide le club abitibien à préserver son statut de prétendant. L'équipe occupe actuellement le troisième rang du classement général et a une présence régulière dans le top-10 hebdomadaire de la LCH.
« En allant le chercher, on espérait qu'il explose, note Dagenais. Après les trois premières semaines, ce n'est pas qu'on n'était pas certains [qu'il en soit capable], mais on voyait qu'il y avait de l'ouvrage à faire. »
« C'est un gars qui est très militaire, très professionnel, développe Dagenais. Des fois il pense quasiment trop. On en veut des gars de même, mais je pense qu'il était un peu trop dans sa tête au début. »
En zone ennemie, cette pression à vouloir trop en faire l'incitait à s'accrocher à la rondelle, à jouer en périphérie en attente du jeu parfait, du deux contre un qui ne se présenterait jamais. Au fil de rencontres régulières avec son nouvel entraîneur-chef, souvent initiées par lui-même, Verreault s'est toutefois réapproprié l'enclave et le devant du filet adverse.
« Le hockey a changé, mais des guerriers, des gars qui ont du chien – et Antonin c'en est un – on en cherche tous. Parce que ça t'en prend dans ton club des gars qui vont payer le prix, rentrer à l'intérieur. Ça va faire mal, mais ils vont être récompensés. »
Jetez un coup d'œil au match de ce soir contre les Voltigeurs de Drummondville sur le RDS.ca et c'est sans doute à cet endroit que le jeu de Verreault vous sautera aux yeux.
« La grosse différence, c'est qu'il va au net et qu'il est dans le demi-cercle, cerne Dagenais. Il veut la rondelle. Ça n'a jamais été par manque d'efforts pour Antonin. C'était juste de savoir comment tout mettre ça à en place. »
La vitesse, le lancer, la confiance... Verreault semble pour l'instant avoir trouver la façon d'assembler tout ça pour se relancer. Mêmes les échappées, qui se terminaient trop souvent en échecs en début de campagne, se sont mises à prendre une tournure heureuse récemment.
« C'est comme si tout d'un coup, tout fonctionne pour lui », se réjouit Dagenais.
« Depuis un bout de temps, il m'en donne plus que j'aurais pensé. C'est notre but de continuer à le défier, à le challenger pour qu'il devienne encore meilleur et qu'il fasse tourner des têtes, parce que là, ça va super bien son affaire. »