Avec Jérémie Poirier, les Flames ont flairé l’aubaine
LNH jeudi, 8 oct. 2020. 08:00 vendredi, 22 nov. 2024. 11:18MONTRÉAL – Le message avait été passé aux dépisteurs des Flames de Calgary. Dans la mesure du possible, le repêchage 2020 devait servir à regarnir la banque de jeunes défenseurs de l’organisation.
Le plan a été mis à exécution mercredi alors que les trois premiers choix de la deuxième journée de l’encan ont été investis sur des arrières. Dès la deuxième ronde, les Flames ont sélectionné Yan Kuznetsov, un pan de mur russe qui a déjà une année d’expérience dans le réseau universitaire américain.
Le directeur général Brad Treliving avait bien prévenu ses hommes : gare aux coups de tête et aux élans d’enthousiasme démesurés. Des défenseurs, oui, mais pas à n’importe quel prix. Sauf qu’en troisième ronde, c’est devant le risque inverse, celui de la méfiance excessive, que s’est retrouvé le caucus des Flames quand on s’est rendu compte que Jérémie Poirier était toujours disponible.
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Le fait que le quart-arrière des Sea Dogs de Saint John n’avait toujours pas desserré sa cravate ne devait pas nécessairement être considéré comme une hérésie. Bien sûr, le jeune homme de Valleyfield avait sa part de supporteurs. La Centrale de recrutement de la LNH le classait au 18e rang sur sa liste des meilleurs espoirs nord-américains. Craig Button, le grand gourou du repêchage chez nos confrères de TSN, le voyait comme le 22e meilleur espoir de sa cuvée, juste devant Keiden Guhle, l’éventuel choix de première ronde du Canadien.
Mais son cas était loin de faire l’unanimité. Ses carences défensives effrayaient plusieurs équipes, tellement qu’en juin dernier, des dépisteurs de plus d’une équipe avaient révélé au collègue Éric Leblanc que le nom du grand rouquin n’apparaissait sur aucune de leurs listes.
Les Flames avaient eux-mêmes leurs propres réserves au sujet de Poirier. Mais au début de la troisième ronde, ils ont commencé à flairer l’aubaine.
« Il était en dégringolade comparativement à la liste de bien des gens, a constaté le directeur du recrutement Tod Button à la fin de sa journée de travail. Quand on s’est retrouvé à dix ou douze choix de notre prochain tour, au 72e rang, [mon bras droit] Fred Parker a mentionné que si Poirier était toujours là, il fallait absolument prendre le risque. Le jeu en valait la chandelle à cette position. Notre recruteur au Québec, Patrick Lachance, était du même avis. Alors on a patienté avec son nom en tête. On avait notre plan B, mais il ne faisait aucun doute pour nous qu’à ce rang, il représenterait un excellent choix. »
Les Flames possédaient deux choix de troisième ronde, mais ils sentaient que l’attention devenait trop grande autour de Poirier pour le laisser plus longtemps sur le marché.
« Il reculait, il reculait et on se disait qu’au 80e rang, par rapport à son potentiel, les chances qu’il soit là étaient minces », évalue Lachance en entrevue à RDS.
« C’est sûr que rendu à ce rang-là, les qualités qu’on voit en lui sont indéniables, justifie celui qui en était à son troisième repêchage à l’emploi des Flames. Il faisait partie de l’élite de son année en termes de qualités offensives. C’est un joueur très dynamique sur l’avantage numérique, qui a de très bonnes mains, un très bon tir. C’est un gars qui génère énormément d’offensive. C’est un peu là-dessus qu’on a décidé de le prendre. À 72, on ne voyait pas beaucoup de meilleures options. On trouvait que c’était un bon fit. »
Une volonté réciproque
Maintenant que l’équipe de détection a fait son travail en dénichant un talent hors-norme en troisième ronde, il incombera au département du développement des Flames de mener le projet à terme. Le potentiel de Poirier est pratiquement illimité, mais le cahier des charges à respecter afin de l’élever à cette hauteur est imposant.
« On s’est parlé au téléphone, a raconté Treliving lors d’un point de presse avec les journalistes de Calgary. Je lui ai dit qu’il y avait une raison pour laquelle on était en train de se parler cet après-midi plutôt qu’hier soir, au milieu de la première ronde. Il doit maintenant relever ses manches et, comme tous les jeunes de son âge, travailler pour améliorer certaines facettes de son jeu. Il est bien conscient de ses carences sans la rondelle. La clé de sa progression est entre ses mains, mais aussi entre les nôtres. »
« Avoir un talent naturel comme ça, offensivement, ça ne s’apprend pas. Par contre, apprendre à mieux jouer dans sa zone, à être efficace sans la rondelle, c’est quelque chose qui s’apprend et il a démontré une volonté à le faire, note Lachance. C’est un peu là-dessus qu’on mise. Est-ce qu’il a des choses à travailler? Oui, comme bien des gars qui ont été pris avant et après lui. Mais nous, on regarde son talent et on est prêt à travailler avec lui. »
Poirier assure que cette volonté est réciproque. Ce n’est pas d’hier que cet habile patineur, qui a amassé 53 points en 64 matchs à sa deuxième saison complète dans la LHJMQ, entend parler des défauts qui entachent son dossier. Du sous-sol de la maison de sa famille de pension, où il a suivi le repêchage, il affirme avoir entendu le message et être prêt à faire le nécessaire pour faire mentir les langues sales.
« Je ne dirais pas que ça a été frustrant, a-t-il relativisé lorsque joint par RDS. C’était peut-être plate un peu de voir ça, mais je suis un gars assez positif dans la vie et me faire du mauvais sang pour ça, ça ne changerait pas grand-chose. Je vais pouvoir retourner au travail et prouver aux équipes qui ont passé sur moi qu’ils ont eu tort de le faire. C’est une chance pour moi de faire ça. Les Flames n’ont pas à s’inquiéter. Je vais leur montrer que ça va bien aller et que je travaille sur mes faiblesses pour devenir un meilleur joueur. »
Les discussions qu’il a eues en coulisses permettent à Patrick Lachance de croire qu’il ne s’agisse pas là de paroles en l’air.
« Il ne faut pas oublier non plus que Jérémie un gros bonhomme à 6 pieds et 195 livres, rappelle celui qui a aussi contribué aux sélections de Jakob Pelletier et Dmitry Zavgorodniy depuis son embauche par les Flames. À ce gabarit-là, c’est le fun de travailler avec un coffre d’outils comme le sien. C’est un gars qu’on était très content de pouvoir récupérer en troisième ronde. »