Confessions d'intronisés
TORONTO - En plus des cérémonies officielles au cours desquelles ils reçoivent leur bague et leur veston commémorant leur intronisation au Temple de la renommée, les nouveaux immortels du hockey ont rendez-vous avec des partisans qui sont en mesure de leur poser des questions.
Toutes sortes de questions.
Réclamée par Wayne Gretzky lors de son entrée au Temple en 1999, cette rencontre est devenue une tradition courue au cours de laquelle on peut obtenir des anecdotes et même des confessions de la part des intronisés.
Un exemple :
Portant fièrement un chandail des Rangers, un partisan des Blue Shirts a demandé à Henrik Lundqvist d'expliquer pourquoi diable il a pu un jour enfiler un chandail des Capitals de Washington. « Comment as-tu pu nous faire ça », que le partisan a lancé?
« Je n'ai jamais disputé de match avec eux donc officiellement, je n'ai jamais porté leur chandail », a d'abord plaidé Lundqvist avant d'aller plus loin dans son plaidoyer.
« Initialement, il était hors de question de jouer pour une autre équipe. Mais après le congé estival, le hockey s'est mis à me manquer. Les camps d'entraînement approchaient et j'ai eu des discussions avec mon épouse. On a commencé par dresser une liste de 10 formations qui répondaient le mieux à nos attentes. On analysait la ville, les chances de gagner de l'équipe, les facilités en matière de déplacement. À la fin de l'exercice, Washington était la destination. Finalement, ce n'est pas aller plus loin et j'aurai été un Ranger toute ma carrière. Ce qui a toujours été mon souhait », a répondu Henrik.
« Est-ce que les Islanders – les ennemis jurés des Blue Shirts – étaient sur cette liste », que le partisan a répliqué.
« Non! » que Lundqvist a conclu sur un ton qui a satisfait tous les fans des Rangers présents dans le Grand Hall.
Voici quelques autres anecdotes relevées lors de la rencontre de samedi.
Qui était votre idole de jeunesse?
« Patrick Roy et Dominik Hasek, a répondu Henrik Lundqvist. Ils étaient les deux meilleurs gardiens de la Ligue. Ils étaient surtout très différents. Je regardais Hasek déposer son bâton sur la patinoire pour protéger le bas du filet et j'ai rapidement adopté cette technique. »
« Tony Esposito, a enchaîné Tom Barrasso. Premièrement parce qu'il attrapait de la main droite, comme moi, et aussi parce qu'il avait un style très différent des autres gardiens. En plus, c'est lui qui m'a amené à Pittsburgh alors qu'il était directeur général. Il m'a donné permis de soulever deux coupes Stanley avec les Penguins.
« Mon frère Sylvain qui est assis juste là », a lancé Pierre Turgeon en pointant en direction de son aîné. Il m'a fait la vie dure parfois, il m'a même envoyé dans le filet pour me siffler des rondelles aux oreilles parce qu'il tenait à améliorer la qualité de son tir quand nous étions tout jeunes à Rouyn. Ça l'a aidé à se rendre en premier dans la LNH et c'est lui que je voulais imiter. »
« Rogatien Vachon parce qu'il était de petite taille ce qui me permettait de croire en mes chances d'atteindre la LNH un jour. Mais aussi parce qu'il avait un nom sensationnel. J'ai aussi adoré Gerry Cheevers à cause de son masque spectaculaire et sa technique. J'ai eu la chance de le rencontrer ce matin pour la toute première fois. C'était un moment vraiment spécial pour moi », a indiqué Mike Vernon.
Qui vous a le plus aidé quand vous êtes arrivés dans la LNH?
« Robert Sauvé était le gardien numéro un des Sabres à mon arrivée. Même si j'avais comme objectif de lui voler son poste, il m'a toujours aidé à apprivoiser ma nouvelle vie. J'avais 18 ans, je ne connaissais rien. Il avait 10 ans de plus que moi et des enfants à la maison. On ne pouvait pas vivre des réalités plus différentes l'un et l'autre. Malgré tout, il m'a appris comment faire mon travail dans la LNH », a souligné Tom Barrasso.
« France St-Louis », a répondu sans hésiter Caroline Ouellette.
« Je ne parlais pas un mot d'anglais quand je suis arrivé à Buffalo, a témoigné Pierre Turgeon. Je vivais en pension et j'étais incapable de communiquer avec les membres de la famille. Jacques Cloutier, alors gardien auxiliaire, demeurait de l'autre côté de la rue. Je me souviens d'être allé le voir pour lui demander comment dire "j'ai faim" en anglais. Je partais de très loin. C'est lui qui m'a parrainé ensuite. »
« J'ai eu la chance de compter sur l'appui de Réjean Lemelin. Il n'y avait pas d'entraîneur des gardiens dans mon temps. On travaillait ensemble pour se préparer le mieux possible. On était surtout des complices. Il aimait le golf, moi aussi. Ça nous rapprochait. Nous étions amis et quand je lui ai ravi son poste deux ou trois ans plus tard, il a été le premier à me dire bravo. À me dire de ne pas m'en faire avec ce qui arrivait », a répondu Mike Vernon.
Qui vous a donné le plus d'ennuis au cours de votre carrière?
« La pire chose qui pouvait m'arriver au cours d'un match c'est de me retrouver au banc des pénalités pour deux minutes. C'était vraiment une torture. Et les jumelles Lamoureux (Monique et Jocelyne) étaient les meilleures pour me faire perdre ma concentration et me pousser à écoper des pénalités contre elles. Elles étaient de très bonnes joueuses et la rivalité entre nous était très intense », a indiqué Caroline Ouellette.
« La moitié de la Ligue nationale, a lancé le gardien Mike Vernon en riant. Mais Claude Lemieux était certainement le plus détestable de tous. Il ne se gênait jamais pour venir me frapper dans la zone réservée et m'a même fait sauter les patins à quelques occasions… C'est toutefois Luc Robitaille que j'avais le plus de difficulté à stopper. Ce n'est pas mêlant, je pense qu'il aurait pu marquer contre moi, même assis sur la patinoire », a conclu Vernon.
Les grands défenseurs Raymond Bourque et Nick Lidström ont toujours été les bêtes noires de Pierre Turgeon. « Ils étaient toujours collés à moi. Ils savaient t'enlever le temps et l'espace que tu as besoin pour créer des choses offensivement. »
« Michel Goulet a marqué plus de 500 buts dans la LNH (548) et je suis certain que c'est contre moi qu'il en a marqué le plus. Je lui ai mentionné ça vendredi quand je l'ai rencontré et il m'a dit qu'il avait au moins eu son 450e à mes dépen s», a partagé Tom Barrasso.
« Il n'y a rien de pire que d'accorder des buts à des amis proches. Je me souviens d'un match à New York au lendemain d'un souper que j'avais partagé avec Henrik Zetterberg. La partie venait à peine de commencer et j'ai été déjoué par un tir que je n'ai jamais vu venir. La première chose que j'ai vue c'est le sourire au visage d'Henrik qui m'a parlé de ce but tout au long du match », a souligné Henrik Lundqvist.
Qui était la plus « grande gueule » sur la patinoire?
« Avery! » que Pierre Turgeon a lancé sans hésité. Et même s'il n'a pas prononcé son prénom (Sean), les quelque 200 amateurs devant lui savaient exactement de qui il parlait.
« Matthew Barnaby! Je suis convaincu qu'il faisait des recherches pour trouver la bonne manière de me déconcentrer », a mentionné Tom Barrasso.
« L'Américaine Angela Ruggiero – intronisée en 2015 – était très bonne à ce jeu, mais aucune de mes adversaires ne pouvait rivaliser avec ma coéquipière Tessa Bonhomme. Elle a toujours été dans une classe à part », a confessé Caroline Ouellette.
À quel moment avez-vous réalisé que vous étiez rendu dans la LNH?
C'est Henrik Lundqvist qui a le premier voulu répondre à cette question.
« Il restait encore une trentaine de joueurs lorsqu'on a pris la direction de l'école militaire de West Point pour aller poursuivre le camp d'entraînement. Je n'avais aucune idée de ce qui allait m'arriver. Mais en consultant la liste des chambres, j'ai vu que mon nom était associé à celui de Jaromir Jagr. J'étais estomaqué. Je n'ai pas été capable de lui dire un mot quand nous étions tous les deux dans la chambre. J'ai attendu qu'il sorte et j'ai aussitôt appelé mon frère pour lui conter l'histoire. Disons que c'est mon plus beau cadeau d'arrivée dans la LNH. »