Shawn Allard renonce à son rôle avec l'Avalanche pour encader Connor McDavid
MONTRÉAL – Ça semble fou d'abandonner un poste d'entraîneur avec l'Avalanche du Colorado, un an après avoir soulevé la coupe Stanley? Mais pas lorsque Connor McDavid désire que tu travailles avec lui.
Voici la fabuleuse histoire du Franco-Ontarien Shawn Allard, un réputé entraîneur de patinage et d'habiletés, qui a osé opter pour ce changement durant la saison morte.
« C'est Connor McDavid qui m'a insufflé le plus de confiance pour prendre cette décision. Quand un gars comme lui, si humble, qui est le meilleur joueur du monde et qu'il veut travailler avec toi, c'est très difficile de dire non... », a raconté Allard dans une très généreuse entrevue avec le RDS.ca.
« C'est un plaisir de travailler avec lui par sa façon dont il travaille pour être le meilleur et pour sa vision afin de mener Edmonton à la coupe Stanley. Pour moi, qui fait ce métier depuis 15 ans, c'est rafraîchissant et énergisant », a poursuivi l'entraîneur de 48 ans.
Ça reste qu'Allard comprend qu'on lui demande si ça prenait un brin de folie pour foncer dans cette direction. Expressif de nature, Allard ne peut qu'acquiescer du visage.
« Oh boy, c'était l'une des décisions les plus difficiles de ma vie. Il y a eu beaucoup de sourire et de tristesse en même temps, ce n'était pas facile à faire. Ma femme a fait des recherches sur Google pour savoir combien d'entraîneurs de la LNH quittent un poste. Je crois que la réponse était 1 sur 12 millions », a répondu Allard avec humour.
À ses yeux, le moment était le bon. Il se concentrera sur une dizaine de joueurs de la LNH dont McDavid et Steven Stamkos tout en demeurant une ressource pour quelques patineurs de l'Avalanche.
Il veillera aussi au développement de sa compagnie Perfect Skating qui est implantée dans plusieurs régions du pays via des franchises, dont à Montréal sous la supervision de Nathaniel Marx.
Mais le plus important, c'est qu'il pourra être davantage présent dans la vie de ses quatre enfants (Sutton, Tristan, Owen et Ashley) qui traversent chacun des périodes intéressantes dans leur parcours au hockey.
« C'est beaucoup à cause de ça. J'ai manqué plusieurs événements dans la vie de mes enfants en travaillant avec Nashville et ensuite au Colorado », a admis Allard qui a obtenu un précieux support de sa femme Andrea.
Tristan vient d'ailleurs de jouer ses premiers matchs préparatoires avec le Lightning de Tampa Bay et il a affronté Roman Josi qui venait souper chez lui quand il était petit. On aura le plaisir d'y revenir, mardi, dans le deuxième article.
Il n'était tout de même pas question que les autres équipes de la LNH laissent Allard s'éloigner si facilement d'un poste à temps plein.
« J'ai reçu plusieurs messages et j'ai parlé avec trois ou quatre équipes. Je suis très reconnaissant et humble face à ça. C'était difficile de dire non à ces offres », a avoué Allard quand on a insisté à ce sujet.
Éventuellement, il se verrait accepter un poste qui se décrirait comme un directeur du développement technique des joueurs. Notre petit doigt nous dit qu'une équipe ne tardera point à se laisser convaincre par ce projet.
Comment faire pour que McDavid progresse?
Autant que c'est stimulant de « coacher » McDavid, il faut être en mesure de trouver des éléments pour peaufiner cette merveille du hockey moderne.
Pour Allard, son expertise ne provient pas d'un talent d'observateur hors du commun.
« Je ne crois pas à ça. Pour moi, le travail, c'est le talent. Quand tu lis le livre de Karl Anders Ericsson (une sommité sur ce sujet), ça passe par des heures de pratique. Ça fait près de 17 ans que j'enseigne depuis mes débuts en France, ça fait longtemps que je regarde du hockey », a-t-il noté.
Dans son approche, Allard cherche à maximiser l'identité d'un joueur par rapport « aux choses que ce joueur fait tellement bien et différemment des autres ». À partir de là, il voit la suite comme la construction d'une maison qui progresse étape par étape.
« Des joueurs comme McDavid, (Leon) Draisaitl, (Nathan) MacKinnon ou (Cale) Makar, ils ont de petites choses dans leurs mouvements que tu peux améliorer et des éléments de leur préparation également », a mentionné Allard qui passe trois heures à fignoler une vidéo d'éducatifs destinés à McDavid ou MacKinnon par exemple.
Allard s'assure aussi d'exposer les tendances de leurs adversaires.
« Ce n'est pas évident pour un joueur de savoir tout ce que les autres font. Oui, tu as un feeling de tes adversaires que tu connais le mieux. Mais c'est difficile de bien comprendre 700 joueurs donc je leur fournis de l'aide pour mieux s'ajuster à leurs adversaires et, du même coup, améliorer leurs performances », a-t-il suggéré.
Avec l'Avalanche, une grande partie du mandat d'Allard consistait à trouver de petites nuances ou occasions pour que l'équipe explose offensivement. « Et je parle du jeu à 5 contre 5, pas l'avantage numérique. C'est quelque chose que j'aime bien faire », a présenté Allard alors que l'Avalanche a terminé au deuxième rang pour les buts marqués en 2021-2022.
Le côté offensif est en vogue dans la LNH avec l'évolution du jeu. Mais la conscience défensive demeure bien importante pour aspirer aux grands honneurs.
« Je regarde plusieurs tendances dont celles de bâtir de l'attaque à partir du F3 (l'attaquant le moins avancé en zone offensive), mais chez les équipes qui sont bonnes offensivement et respectées défensivement. Car même Edmonton, qui marque près de quatre buts par match, veut améliorer son jeu défensif pour gagner le championnat », a-t-il décrit.
Ultimement, que ce soit chez Perfect Skating ou avec une équipe de la LNH, Allard vise ce but.
« Un match de hockey, c'est très réactionnaire. Mais, les meilleurs joueurs, ne sont jamais réactionnaires. Et même pour eux, on veut augmenter le pourcentage du temps qu'ils ne sont pas réactionnaires. Quand tu peux bâtir ça chez un joueur, il va exploser », a ciblé Allard que l'on aimerait écouter lors d'une séance sur la glace avec l'élite du hockey.
*Mardi, un 2e article sera publié à propos de l'ascension inusitée vers la LNH de Shawn Allard.