Samuel Poulin revient grandi à la suite d'enjeux de santé mentale
BUFFALO – Samuel Poulin venait d'effectuer ses débuts dans la LNH. De l'extérieur, on aurait pu croire que le Québécois vivait ses plus beaux moments. Ébranlé par des enjeux de santé mentale, il s'est éloigné du hockey et il y revient fier du chemin parcouru avec le sourire au visage.
À la vitesse que la vie se déroule, on oublie parfois à quel point un sourire est précieux. Mais le sourire qui émergeait du visage de Poulin faisait chaud au cœur. En décembre 2022, l'attaquant s'est retiré du hockey, le sport qui avait été toute sa vie jusqu'à ce point.
Après un cheminement, bien accompagné, de plus de trois mois, il s'est senti assez fort pour y retourner à la mi-mars 2023.
« J'ai commencé à jouer à 4-5 ans, j'avais un sourire dans la face chaque fois que j'avais un bâton dans les mains. Avec les années, j'avais perdu ça un peu et j'ai retrouvé ça dans les derniers mois. Ça fait juste vraiment du bien. C'est plutôt le meilleur feeling », a confié Poulin, vendredi, à Buffalo, à quelques journalistes du Québec.
Le rythme effréné – et souvent sans pitié - du sport professionnel ne devrait jamais nous faire oublier le côté humain. L'histoire de Poulin en est un exemple. Fils d'un ancien joueur de la LNH, Poulin était perçu comme une véritable « machine » de hockey qui s'est toujours défoncé à l'entraînement. Ce profil prometteur a incité les Penguins de Pittsburgh à le repêcher en première ronde (21e au total) en 2019.
Mais les enjeux de santé mentale peuvent frapper n'importe qui, même les plus forts.
Alors Poulin est justement surtout heureux de ressortir plus fort de cette épreuve.
« Honnêtement, c'est le jour et la nuit. J'ai appris à me connaître de A à Z et j'écoute mon corps plus qu'avant ce qui peut aider n'importe qui. Je suis vraiment content d'avoir pris ce temps de repos même si, au début, c'est sûr que je ne le voyais pas comme ça. Avec du recul, je vois que ç'a porté fruits. J'en ressors grandi », a-t-il témoigné après un match du tournoi des recrues.
Il participe donc à cet événement dans un « bon état d'esprit » grâce au travail accompli.
« Mais c'est sûr qu'il y a des émotions de plus parce que j'ai vécu bien des affaires dans les derniers mois », a indiqué l'athlète de 22 ans.
Respectueusement, Poulin a expliqué qu'il n'était prêt à parler des détails de ce qu'il a surmonté.
« Je ne veux pas trop parler de ça en ce moment, je veux me concentrer sur mon camp, j'en ai déjà beaucoup à gérer. Mais, c'est sûr que c'est du stress de plus. J'ai joué deux matchs dans les neuf derniers mois, ça ne fait pas beaucoup de hockey. Comme tout le monde qui subit une blessure et qui revient, c'est un peu plus stressant. Je vais le faire éventuellement quand ce sera un meilleur moment », a-t-il précisé.
Car, malgré tous les efforts investis, Poulin doit agir avec prudence même s'il se sent bien.
« Oui, mais c'est un processus en continu. Je vais encore avoir des journées plus dures. C'est juste d'apprendre de ces mauvaises journées pour ne pas faire les mêmes erreurs et repasser par les mêmes embûches. On a tous de mauvaises journées. C'est juste de voir le positif dans tout ça et apprendre de ces moments », a exposé le jeune homme.
« Quand mon père jouait, c'était : tu ne dis rien, tu fermes ta bouche »
Poulin est donc revenu dans l'entourage des Penguins de Wilkes-Barre/Scranton en mars et il a joué les rencontres du 7 et 10 avril alors que sa partie précédente remontait au 4 décembre.
Si ces deux matchs étaient importants pour lui, il tenait aussi à expliquer à ses coéquipiers ce qu'il avait vécu.
« C'est arrivé soudainement et mes coéquipiers n'étaient pas au courant, ils ne m'ont pas vu pendant près de quatre mois. Je leur ai expliqué tout ce qui s'était passé et les trucs que j'avais travaillés à la maison. Ça me tenait à cœur de le faire parce que ce sont mes coéquipiers. Ils souhaitent le meilleur pour moi comme je souhaite le meilleur pour eux, ils devaient s'inquiéter un peu », a décrit Poulin.
Son témoignage a été apprécié et ce ne serait pas étonnant que des coéquipiers ou des adversaires le contactent éventuellement pour obtenir du support à leur tour.
« Personne ne l'a fait pour l'instant, mais si ça arrive, je vais comprendre plus que n'importe qui avec les épreuves que j'ai surmontées. Ça fait du bien aussi de savoir que je peux aider du monde. »
Quand il a quitté son organisation, Ron Hextall était le patron des Penguins et Poulin s'est senti beaucoup supporté. Depuis, Kyle Dubas a pris les commandes du club et il n'a que du positif à raconter.
« L'équipe m'a demandé si je voulais participer au camp de développement, en juillet. Au début, j'étais plus sur les talons, ça ne me tentait pas trop. Mais j'y ai pensé et j'y suis allé. J'ai eu une discussion avec Dubas et Jason Spezza à la fin du camp. C'était juste vraiment chouette de leur part comment ils me parlaient. Il me disait que des gens de son personnel à Toronto sont passés par là et qu'il savait comment ça affectait les personnes », a raconté Poulin.
Cette évolution par rapport à l'époque du père de Poulin, Patrick, fait le bonheur de tous.
« C'est merveilleux qu'on soit rendus là. Il y a quelques années, quand mon père jouait, c'était zéro comme ça. C'était : tu ne dis rien, tu fermes ta bouche et tu vas travailler. Ça devient moins tabou. »
D'ailleurs, Poulin a admis que sa situation a mené son père et sa mère à mieux comprendre les enjeux de santé mentale.
« Parfois, ils ne comprenaient pas des choses que je travaillais et je devais leur expliquer. Éventuellement, ça faisait du sens pour eux. Ils ont grandi énormément et ç'a juste beaucoup aidé la famille. »
Poulin confiait aussi qu'il a reçu des témoignages de personnes qui ne sont pas dans le milieu du hockey. Il a mieux compris qu'il n'était pas le seul à traverser cette réalité plus présente qu'on peut le penser.
Au cours des derniers mois, il a eu de nombreuses heures pour réfléchir à son avenir. S'il possède encore l'avenir devant lui – autant au hockey que dans la vie – Poulin ne vise pas absolument la LNH.
« Je ne me stresse pas trop à jouer dans la LNH ou la Ligue américaine. Si je dois jouer ECHL parce que j'en ai trop perdu, mais que je suis heureux d'être là-bas, ce sera ça », a réagi Poulin qui ajoute ne pas avoir perdu son côté compétitif.
Voilà ce qui demeure le plus important à ses yeux.
« Souvent, les gens ne veulent pas dealer avec les émotions plus difficiles. Ils essaient de les repousser le plus possible, mais ce n'est pas en faisant ça que ça va s'améliorer. C'est en abordant le problème qu'on va en sortir plus forts », a conclu Poulin, avec justesse, qui est reconnaissant de l'aide venant de sa famille, sa copine, ses amis, son agent, le personnel médical et l'organisation des Penguins.