Lettonie 3 - Canada 2 (F) : une déroute historique
OTTAWA – Vendredi matin, au lendemain d'une solide performance de ses troupes contre la Finlande, Dave Cameron se méfiait de la menace d'un relâchement 24 heures plus tard contre la Lettonie.
« Nous devrons constamment monter en puissance dans ce tournoi. Il faut s'améliorer parce que c'est ce que feront tous nos adversaires. Ce soir, il faudra être meilleurs dans toutes les facettes de notre jeu », avait souhaité l'entraîneur d'Équipe Canada junior.
On préfère vous avertir avant que vous alliez plus loin : ce n'est pas ce qui est arrivé.
Contre un adversaire qui n'avait pourtant pas les outils pour l'importuner, la formation canadienne a offert une performance d'une incompréhensible médiocrité et s'est inclinée par le pointage de 3-2 en tirs de barrage.
Inutile d'essuyer vos lunettes ou de vérifier votre connexion sans-fil. Le paragraphe précédent a été lu, relu et ne contient que la pure vérité.
Pendant 65 minutes, ce qui devait être une victoire sans histoire a évolué devant nos yeux en un haletant thriller. Pour l'équipe locale et ses partisans, il s'est terminé en inimaginable cauchemar quand, au huitième tour de la fusillade, l'attaquant des Sea Dogs de Saint John Eriks Mateiko a mis fin à un suspense surréaliste en déjouant le jeune gardien Jack Ivankovic.
Oui, le Canada a cadré 56 tirs sur le cerbère Linards Feldbergs, qui n'aura plus jamais à payer un souper de sa vie dans son pays. Et Brayden Yager a probablement raison lorsqu'il dit que « si [les Lettons] n'en avaient pas bloqué autant, on en aurait probablement eu 90. »
Mais isoler cette statistique pour justifier une pareille contre-performance relève plus de l'aveuglement volontaire que de la fine analyse.
De cette contre-performance historique du côté canadien, on retiendra plutôt une fâcheuse tendance à faire dans la dentelle, des revirements évitables en quantité inquiétante, un faible intérêt à explorer les zones dangereuses et une indiscipline qui aurait pu causer sa perte. Le baron Alain Chantelois aurait parlé avec justesse d'une proposition incolore, inodore et sans saveur.
« Si on rejouait le même match dix fois, on en sortirait avec neuf victoires. Alors ce n'est pas une régression », arguait pourtant Cameron, toujours aussi avare de mots après la rencontre.
Les Lettons n'avaient pas de temps à perdre à s'enfarger dans ce genre de scénario hypothétique. En quatre matchs contre le Canada dans l'histoire du Mondial junior, leur équipe nationale avaient perdu par un pointage combiné de 41-4. Ils ont joué le match de leur vie vendredi soir.
« Dans un match de hockey, tout peut arriver, philosophait l'entraîneur Artis Abols. Notre gardien a été bon, nos unités spéciales ont bien travaillé, les gars ont tout donné et on a trouvé une manière de les ralentir. Et comme j'ai dit, l'instant d'un match, tout est possible. »
À deux reprises, la Lettonie a comblé un déficit en troisième période. Mateiko a créé l'égalité une première fois avec un peu plus de six minutes à faire au temps réglementaire. Calum Ritchie a pendant un bref instant rétabli la logique en marquant en avantage numérique avec 5:38 à jouer, mais les négligés ont répliqué une fois de plus dans la consternation la plus totale. Peteris Bulans, des Saguenéens de Chicoutimi, a envoyé un tir de loin derrière Ivankovic avec 2:29 à écouler au cadran.
Après avoir bafoué plusieurs occasions en or d'en finir, les Canadiens ont offert un septième jeu de puissance à la Lettonie en prolongation, lorsqu'ils se sont fait prendre avec un joueur en trop sur la patinoire. Les négligés n'ont pu profiter de ce cadeau de 42 secondes pour causer la surprise. Mais ce n'était qu'une question de temps.
Feldbergs, qui évolue avec le Phoenix de Sherbrooke, a été parfait devant huit tireurs dans le dernier bris d'égalité. La liste des rivaux à qui il a fermé la porte inclut cinq choix de première ronde dans la Ligue nationale.
« Je n'arrive pas encore à croire ce qui vient de se passer, je suis encore sous le choc. Je crois que j'aurai besoin d'encore une heure avant de réaliser ce qu'on vient d'accomplir », a commenté Feldbergs, qui était devant le filet dans une défaite de 10-0 de la Lettonie contre le Canada un an presque jour pour jour plus tôt.
Dans le camp canadien, l'issue de ce match est un mystère sur lequel devront se pencher avec sérieux Cameron et ses adjoints. Leur prochain match est prévu pour dimanche contre l'Allemagne.
Mais il ne s'agit pas de leur unique souci.
L'autre mauvaise nouvelle du jour est tombée dès la première période, quand le jeune défenseur Matthew Schaefer a semblé se blesser à l'épaule gauche en entrant en collision avec le but des Lettons. L'arrière de 17 ans, l'un des patineurs les plus dynamiques du Canada depuis que le groupe s'est rassemblé pour la première fois au camp de sélection, a lourdement donné contre la rampe et est resté immobile pendant de longue seconde.
Schaefer est retourné au vestiaire et n'est pas revenu dans le match. Les propos de ses coéquipiers après la rencontre ne laissaient rien présager de bon pour la suite.
Quand on dit qu'un malheur ne vient jamais seul...