Jacob Perreault : à la recherche de la confiance perdue
LAVAL – Le jeu, analysé à l'extérieur de son contexte, est plutôt banal.
En prise de vitesse sur le flanc droit, Jacob Perreault reçoit une longue passe de Lias Andersson en zone neutre. Une fois la ligne bleue franchie, il se retrouve en duel devant le défenseur Anton Malmström, qu'il efface facilement en freinant brusquement puis en pivotant sur lui-même. Voyant un deuxième adversaire fondre sur lui, Perreault se retourne dans l'autre direction et tente une passe vers l'enclave. Le relais est imprécis. Quelques secondes plus tard, la rondelle disparaît dans les gradins. La menace est éteinte.
La séquence a bien un petit quelque chose de spectaculaire, mais elle reste un extrait anodin dans cette victoire de 7-4 que le Rocket de Laval a arrachée aux Thunderbirds de Springfield samedi. Sauf si y ajoute un peu de contexte, justement.
« Ça, je le faisais une couple de fois par match il y a deux ans, expliquait Perreault après nous avoir accueilli devant son casier dans le vestiaire du Rocket, lundi matin. À moment donné, je m'étais fait dire de ne plus le faire. Ça, je pense que je peux le ramener dans ma game. »
« Je trouve qu'à l'exception du résultat final, c'était un bon jeu. J'étais un contre un, je n'avais pas tant d'espace. J'aurais pu juste tirer sur le gardien, il aurait fait un arrêt facile. J'ai essayé une feinte, un tourniquet, j'ai essayé d'acheter du temps... »
« Il y a d'autres affaires aussi que je pense que je pourrais ramener et qui pourraient aider l'équipe à créer des chances ou, au moins, à mettre des rondelles au filet. »
Conscient que sa contribution offensive soulève des questions depuis son arrivée à Laval, Perreault planche activement sur la recherche de solutions. À l'image de l'organisation qui a fait son acquisition, on pourrait dire de cet ancien choix de première ronde qu'il est en reconstruction.
Perreault a été sélectionné au 27e rang par les Ducks d'Anaheim au repêchage de 2020. Il a aussitôt intégré les rangs professionnels, où il a laissé une bonne impression. Au moment de fêter son 20e anniversaire, il avait récolté 53 points en 76 matchs dans la Ligue américaine et avait même vécu son baptême dans la Ligue nationale.
Mais sa production a périclité à partir de sa troisième saison avec les Gulls de San Diego, le club-école des Ducks. Il y a un mois, l'équipe californienne a lancé la serviette en échangeant son espoir au Canadien en retour de Jan Myšák. Le changement de décor a tout de suite plu à Perreault, qui a dit réaliser un rêve en rejoignant l'organisation jadis représentée par son père Yanic.
Son insertion dans le projet lavallois n'a pas donné de résultats instantanés. En onze matchs, l'ailier de 21 ans n'a cumulé que deux points. Son nouvel entraîneur, Jean-François Houle, constate qu'il est trop souvent hésitant à quitter le confort de la périphérie. « Un joueur dont tu espères une récolte offensive doit aller au filet, doit aller dans les zones dangereuses », souligne-t-il.
Mais Perreault est confiant d'être sur la bonne voie. Depuis qu'il travaille avec Houle, il réentend des thèmes qui étaient abordés par Joël Bouchard lorsque ce dernier a dirigé sa seule saison à San Diego. Ça a été sa meilleure chez les pros.
« C'est quand même dur comparer des entraîneurs, ils ont tous leurs styles différents. Mais je dirais que les deux sont vraiment ouverts à faire du développement et ils prônent la créativité, propose le numéro 34 du Rocket. Fais des jeux, joue ton style et ils vont t'aider avec le positionnement, des affaires de même, pour donner du rythme à ta game. J'aime ça. Ça ne fait pas trop longtemps que je suis ici, ça prend du temps à s'ajuster. Mais les deux je les aime vraiment gros. »
Perreault sous-entend que les nombreux changements d'entraîneurs qui ont marqué son passage en Californie n'ont pas créé des circonstances optimales pour son développement. En parlant de Roy Sommer et Matt McIlvane, les deux hommes qui ont succédé à Bouchard, il dit : « Ce n'était pas ça leur préférence, que je joue avec de la confiance. Ils voulaient que je joue un style plus simple. »
À Laval, il a l'impression d'avoir retrouvé une certaine liberté dont il était privé depuis presque deux ans. Même si les conséquences concrètes tardent à apparaître.
« L'été chez mon père, à la maison, je pratique toujours mes mains, pour garder mes skills. Je regarde encore beaucoup de matchs. Quand j'étais jeune, j'en ai tellement vu. Les matchs de mon frère, ceux de ma sœur, les miens, des matchs de la LNH. Mon ‘hockey IQ' je dirais que je l'ai encore. Il faut juste que je retrouve ma confiance. »
La famille, la neige et le hockey de printemps
S'il fait abstraction de sa production personnelle, Perreault, qui est né au Québec mais qui a grandi dans la région de Chicago et qui a joué son hockey junior en Ontario, s'éclate avec sa nouvelle équipe.
Sur le plan personnel, l'échange lui a permis de renouer avec des personnes qu'il n'avait l'habitude de voir que lors de son pèlerinage estival annuel en Estrie. Ses grands-parents, des oncles, des tantes, des cousins et des amis d'enfance sont venus le voir jouer à Laval. Et pour la première fois en quatre ans, il a besoin d'un manteau pour venir à l'aréna. La grosse bordée de neige de jeudi dernier? Il en aurait repris.
« Ça fait quand même du bien de voir la neige et... vous autres, vous ne devez pas trouver que c'est si pire que ça, mais il y a des journées où c'est froid! J'aime quand même ça, avoir de l'air frais dehors. »
Mais ce qui l'enthousiasme le plus, c'est la course aux séries dans laquelle le Rocket est investi. Ça aussi, ça faisait un bail. L'année où les Gulls étaient dirigés par Bouchard, Daniel Jacob et Maxime Talbot, ils avaient joué deux matchs éliminatoires.
« L'année d'après, il restait presque 20 matchs dans la saison et on était déjà sortis », raconte-t-il. Et cette année, ses anciens coéquipiers se battent pour éviter de finir dans la cave de leur division. « Je ne pense pas qu'ils vont faire les séries. Ici, c'est vraiment quelque chose que je veux vivre. »