Les différents chapeaux de Corey Wray
MONTRÉAL – Il y a deux mois jour pour jour, Gabriel Gervais était apparu devant les médias sur la défensive, l'air tendu. Son vice-président et chef de la direction sportive venait de quitter le navire. Des rumeurs, qui se sont avérées fondées, voulaient qu'un autre membre important du département sportif soit sur son départ. Il y avait une tempête à traverser, des gens à rassurer. Sa sortie n'avait pas été très convaincante.
Le pas de recul que le président du CF Montréal avait promis de prendre pour y voir plus clair semble avoir été salutaire. Mercredi, à huit jours de l'ouverture du marché des transferts en MLS, Gervais a identifié les carences organisationnelles auxquelles il souhaitait s'attaquer et brossé un portrait lucide du rendement de son équipe sur le terrain.
Il a aussi présenté son nouveau bras droit, celui qui l'épaulera dans les décisions pressantes qui attendent le club.
Des questions demeurent au sujet de Corey Wray, dont l'embauche à titre de consultant à la stratégie sportive avait été annoncée la veille. Quelle est la durée de son mandat? Gervais a vaguement parlé de son apport dans les « prochains mois ». Pourquoi ne s'amène-t-il pas dans un rôle permanent? C'est plus ou moins clair. « Une entente qui est favorable les deux parties », dit le président.
Ce qu'on sait, c'est que le jeune gestionnaire portera plusieurs chapeaux.
À court terme, il aidera le CF Montréal à « traverser le mercato », une période de l'année critique que Gervais, même s'il dit y travailler quotidiennement depuis qu'il assure l'intérim d'Olivier Renard, n'était pas outillé à gérer seul.
L'ancien directeur général de l'équipe réserve du Crew de Columbus aura comme devoir de proposer des pistes pour améliorer l'équipe durant la prochaine fenêtre de transactions, du 18 juillet au 14 août, mais aussi de préparer la refonte de l'effectif durant la prochaine saison morte.
Gervais a dit avoir l'intention de « regarder pour faire évoluer l'équipe à court terme selon les besoins » tout en convenant qu'il n'était pas en position de donner carte blanche à ses complices. Les contraintes budgétaires imposées par le propriétaire sont bien connues, le CF Montréal opérant avec la plus petite masse salariale de la MLS. Gervais a aussi noté que toutes les places au sein de l'effectif étaient présentement comblées.
« Pour faire entrer des joueurs, il va falloir en libérer », a-t-il raisonné.
Les noms de Victor Wanyama et Mathieu Choinière viennent en tête dans l'exercice de spéculation entourant des départs potentiels. Les deux, chacun à leur manière, ont exprimé leur insatisfaction quant à leur temps de jeu ou leur rémunération cette saison.
Gervais n'a donné aucun détail sur les discussions privées qu'il a eues avec ses joueurs, mais a assuré qu'il les avait tous rencontrés individuellement au cours des deux derniers mois.
« C'est clair qui veut rester et qui ne veut pas rester », dit-il.
Une structure à bonifier
L'influence de Corey Wray pourrait être encore plus précieuse dans le mandat plus large qui lui est confié par son nouveau patron, soit celui de contribuer à « définir la structure qu'on veut mettre en place avec des postes clés ». Gervais prévient qu'au terme de ce processus, l'organigramme du secteur sportif pourrait être différent de ce à quoi il ressemblait à l'époque où Renard et son adjoint Vassili Cremanzidis tiraient les ficelles.
Les carences sont présentement évidentes. Outre Wray, seulement trois autres hommes ont un siège à la table des décideurs pour débattre des enjeux reliés au terrain. Gervais a révélé que Daniel Pozzi, qui voit au bon déroulement des activités quotidiennes de l'équipe depuis une quinzaine d'années, a hérité des anciennes responsabilités de Cremanzidis pour la gestion de la masse salariale et des règles de la MLS. Raffaele Frassetti est le dépisteur en chef du club et Luca Saputo s'occupe de faire le pont avec le club de Bologne, le grand frère de l'Impact en Italie.
« C'est comme ça qu'on est structurés pour l'instant. Est-ce qu'on peut en faire plus? Certainement », reconnaît Gervais.
Dans une longue allocution qu'il a prononcée avant de prendre les questions des journalistes, il a ciblé l'identification de talent et la récolte et l'analyse de données comme deux secteurs où le club devait faire des gains.
« Il faut absolument qu'on développe davantage notre équipe de dépistage et nos méthodes de recrutement. Il faut absolument qu'on renforce nos capacités analytiques, particulièrement dans le recrutement. Il faut continuer d'innover pour valoriser les performances de nos joueurs. On peut en faire davantage. »
Gervais a évoqué une volonté de s'appuyer davantage sur l'équipe de recrutement de Bologne, une idée que d'autres ont eu avant lui sans qu'elle ne génère de grandes retombées. Il a également réitéré son désir de s'appuyer sur l'expérience de Wray afin d'identifier les profils qui cadrent avec la philosophie du CF Montréal.
Wray a eu son mot à dire dans les succès du Toronto FC à la fin des années 2010. Ses empreintes sont aussi partout chez le Crew de Columbus, qui s'est hissé comme l'un des clubs phares de la MLS dans les dernières années. Il sait comment fonctionnent les organisations championnes et il fait peu de doute que ses conseils sauront rapprocher le CF Montréal des standards requis pour flirter avec l'excellence.
Il reste à voir si le club voudra prendre les moyens pour les mettre en application.