Le refrain du négligé, une source d'inspiration familière pour le CF Montréal
MONTRÉAL – Quand le persiflage des sceptiques arrive aux oreilles de Joel Waterman, le défenseur d'expérience se dit que ce n'est qu'au fond qu'une journée au bureau parmi tant d'autres.
Waterman n'était pas destiné à être un jour payé pour jouer au soccer lorsqu'il s'est embarqué dans l'équipe de l'Université Trinity Western, en Colombie-Britannique. Il a pourtant fait partie de la saison inaugurale de la Première ligue canadienne dès la fin de son parcours scolaire. On l'a vite condamné à un rôle d'éternel réserviste quand il a fait le saut en MLS en 2020, mais il est éventuellement devenu un pilier de la ligne arrière de Wilfried Nancy.
Et combien de fois a-t-il croisé le regard éberlué d'un adversaire lorsque la petite équipe dont il faisait partie a tout arraché sur son passage, en route vers les hauteurs du classement, la saison dernière?
Pardonnez-lui donc cette impression de déjà-vu qui le suit comme une ombre depuis que quelques jours. C'est que personne ne donne cher de la peau du CF Montréal à l'aube d'un voyage à Columbus durant lequel sera confirmé l'un de ces deux scénarios : sa participation aux séries éliminatoires ou son exclusion de celles-ci.
Sans surprise, c'est une dynamique qui lui plaît bien.
« Exactement ce que tu viens de dire : pas grand-monde ne pense qu'on peut le faire », a répondu le rouquin quand le collègue Antonin Besner lui a demandé ce qui lui permettait de croire avec confiance que David pouvait terrasser Goliath en fin de semaine.
« On en a parlé entre nous et ça nous procure beaucoup de motivation. Les gens nous ont comptés pour battus plus d'une fois cette saison, la saison dernière... ça a toujours été comme ça. Pourtant, nous avons l'occasion d'aller à Columbus et de garder le contrôle de notre destinée en empochant trois points. »
Bien que Waterman a tout notre respect, ceux qui ne partagent pas son optimisme seront ici à l'abri de tout blâme. Après avoir rattrapé de belle façon un début de saison catastrophique, le CF Montréal est devenu au cours des derniers mois une équipe moribonde. Il a gaspillé de précieux points de façon impardonnable et subi des raclées indignes d'une équipe aspirante. La tenue tout aussi médiocre des équipes à sa suite est la seule raison qui explique sa pertinence actuelle au fil d'arrivée.
Des récentes performances plus inspirées lui ont donné une petite poussée dans le dos récemment. Mais cet élan pourrait ne mener qu'à un contact plus violent à Columbus, où l'équipe locale, significativement plus talentueuse sur papier, n'a subi qu'un revers en 16 matchs cette année. Aller gagner là-bas est déjà assez difficile. Quand on y arrive avec une fiche de 2-12-2 à l'étranger, c'est carrément intimidant. Samuel Piette ne s'est pas gêné pour le dire plus tôt cette semaine.
« On a fait une saison avec beaucoup de hauts et de bas, a résumé avec franchise l'entraîneur Hernan Losada. Une très, très bonne saison à la maison et très mauvaise à l'extérieure. Mais à la base de cette très bonne saison à la maison, on a pris des points pour être devant plusieurs équipes. On ne dépend de personne. Si on gagne, on est là. C'est quelque chose qui devrait nous rendre heureux. »
À noter qu'une défaite ne nécessiterait pas automatiquement la préparation d'un bilan de fin de saison en début de semaine prochaine. Même en faisant du surplace, Montréal pourrait se faufiler en éliminatoires avec une défaite ou un match nul de deux des trois équipes qui le pourchassent, soit les Red Bulls de New York (à Nashville), le Fire de Chicago (à NYCFC) et le Charlotte FC (vs Miami).
Un bon trio
S'il y a une lueur d'espoir, elle vient aussi de la plus récente performance du Bleu-blanc-noir. Contre les Timbers de Portland il y a un peu moins de deux semaines, Losada a laissé la retenue au vestiaire en titularisant trois attaquants. Le résultat, une victoire de 4-1, a montré sous un autre jour une équipe qui n'avait jusque-là inscrit que 31 buts en 32 parties.
Ce gisement nouvellement exploité pourrait-il receler d'autres richesses à extraire dans l'Ohio?
« Je l'espère, a répondu Losada. Ils ont très bien fonctionné les trois ensemble, pas seulement avec le ballon mais aussi sans le ballon. C'est vrai que [Kwadwo] Opoku et [Romell] Quioto n'ont pas joué beaucoup ensemble, Romell à cause de sa blessure et Opoku parce qu'il est arrivé plus tard dans la saison. Ça fait du bien. Tu veux que ça fonctionne bien avec Sunusi [Ibrahim] aussi qui a fait un bon match. »
« Pour moi, c'est une combinaison de travail acharné, de travail collectif et de détermination, a énuméré Opoku, auteur d'un but et d'une passe décisive contre Portland. Les chances qu'on aura, il faudra les mettre dedans parce que si tu ne le fais pas et que l'adversaire parvient à profiter des siennes, tu perds. »
En parlant des décisions qui l'ont bien fait paraître contre Portland, Losada a affirmé que « probablement qu'on ne va pas changer ça pour samedi. » Waterman, qui anticipe un match aussi ouvert que le 4-2 que le Crew s'est offert au Stade Saputo en septembre, sera content d'entendre ça.
« L'idée est de débarquer là-bas avec agressivité, avec en tête que ça nous prend les trois points. Il faudra s'assurer de commencer le match avec aplomb et changer la perception de ce que nous avons été à l'étranger cette saison. Ça ne sera pas facile, mais l'occasion est belle de causer la surprise et d'avancer à nos conditions. »