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RÉSULTATS

Notre cercle francophone

Gabrielle Carle - Getty
Publié
Mise à jour

S'expatrier pour son sport, ça demande du courage, surtout quand la langue et la culture nous sont étrangères. Je l'ai vécu en Suède, puis aux États-Unis lors de mon arrivée à l'université Florida State il y a plusieurs années.

Lorsque je suis arrivée à Washington en janvier, j'étais la seule francophone de l'équipe. Un mois plus tard, Inès Jaurena, une Française en provenance de l'Olympique Lyonnais, venait s'ajouter à notre effectif. Nous nous sommes rapidement très bien entendues. En plus d'être une excellente milieu de terrain, Inès est la personnification d'un rayon de soleil. Elle a une énergie invitante, une joie de vivre contagieuse. Après l'arrivée d'Inès, je ne m'attendais pas à ce que notre petit cercle francophone s'agrandisse cette saison. Puis, alors que la Coupe du monde battait son plein, ce n'est pas une, mais deux Françaises qui se sont jointes à notre équipe : Ouleymata Sarr et Annaïg Butel. Deux joueuses talentueuses qui apporteront beaucoup à notre équipe dans les prochains mois. La langue maternelle que nous partageons et leurs personnalités attachantes me poussent naturellement à me tenir avec elles. Bien sûr, les différences entre la vie en France et la vie aux États-Unis sont multiples. En voici plus sur l'évolution de nos deux nouvelles joueuses françaises depuis leur arrivée à Washington.

Anna et Ouleye n'ont jamais évolué ailleurs que dans la D1 Arkema, la ligue professionnelle française. À 31 ans, Anna a passé toutes les 16 années de sa carrière de joueuse au même club, le Paris FC. De son côté, Ouleye a porté les couleurs du Paris Saint-Germain, des Girondins de Bordeaux et du Paris FC. Donc, jusqu'à présent, apprendre l'anglais n'a jamais été une nécessité pour elles. Maintenant qu'elles se retrouvent dans un pays qui ne sait majoritairement parler que cette langue, ça complique un peu les choses. Alors qu'Ouleye a une bonne compréhension de la langue anglaise, si vous parlez anglais à Anna, il y a de bonnes chances qu'elle ne vous comprenne pas (pour le moment, mais elle apprend vite). Bien que leur maîtrise de la langue soit limitée, elle réussissent tout de même à interagir et à créer des connexions avec nos coéquipières américaines. Bien sûr, l'aide d'Inès, mon aide, ou encore celui de google traduction est parfois requise.

Outre la barrière de langue, la transition entre le style de jeu français et le style de jeu américain demande un certain temps d'adaptation. Ce sont deux styles de jeu qui ne se ressemblent pas du tout, voire opposés. Le championnat français est caractérisé par un style de jeu technique, où les joueuses cherchent à combiner pour avancer. De son côté, la NWSL a un style plus transitionnel, qui s'appuie sur les qualités athlétiques de ses joueuses. Bien sûr, dire que la D1 Arkema ne contient que des techniciennes et que la NWSL n'a que des athlètes est une grande exagération. Ce sont plutôt des tendances propres à chaque ligue, et les tendances d'Ouleye et Anna s'alignent avec le style français. Elles ont un style de jeu propre et intelligent, mais elles n'ont pas l'habitude d'être en transition constante. Les phrases « On court de ouf ici » et « Je suis K.-O. » ont souvent été énoncées au court de leurs premières semaines à Washington. Je les comprend, 8 mois plus tard et je prononce encore l'équivalent québécois de ces deux phrases chaque semaine. Mais petit à petit, elles s'adaptent, et de notre côté, nous bénéficions de leur capacité à combiner et à tempérer le rythme de jeu.

Hors du terrain, il y a plusieurs aspects de la culture américaine qui ont pris Ouleye et Anna par surprise. Pour moi, ce sont des particularités que je considère maintenant normales, mais il y a 6 ans, lors de ma première année en Floride, j'avais des réactions similaires face à certaines d'entres elles. Numéro un sur leur liste : l'air climatisé. Entrer dans une pièce où il fait 20 degrés alors qu'il fait plus de 30 degrés dehors, c'est peu commun en France, et si on ne s'y attend pas, c'est un choc pour le système. Elles mentionnent cette disparité de température au moins une fois par jour. Il y a également l'heure à laquelle on soupe. J'ai appris que si je veux aller au restaurant avec elles, je dois être prête à ne pas rentrer chez moi avant 22 h. Pour elles, manger à 18 h est un concept étranger. Dernière cause de perplexité chez nos joueuses françaises, le volume impressionnant qu'une discussion entre Américains peut atteindre. Il est vrai que parfois, c'est une vraie cacophonie à l'intérieur de notre complexe d'entraînement, résultat de plusieurs conversations se faisant compétition.

Anna aime dire qu'elle et Ouleye sont présentement à l'aventure. Elles sont ouvertes d'esprit, prêtes à s'adapter sur le terrain et à vivre la vie américaine à son plein hors du terrain. À ce rythme, l'aventure deviendra bientôt conquête.

 

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