Rodri et Aitana Bonmati chez les femmes remportent encore le Ballon d'Or
Véritable Albert Einstein du QI football, Rodri a reçu la consécration du Ballon d'or, rare pour un tel profil que son entraîneur à Manchester City Pep Guardiola qualifie de « meilleur milieu de terrain du monde ».
« Rodri, c'est un ordinateur parfait, sans faille », savoure un autre technicien qui profite de son intelligence de jeu, le sélectionneur de l'Espagne Luis de la Fuente, vainqueur de l'Euro-2024, où le natif de Madrid a été élu meilleur joueur du tournoi.
« Je crois que ce trophée consacre ma victoire mais la victoire d'autant de joueurs espagnols, d'Iniesta, de Xavi (qui n'ont jamais remporté de Ballon d'or), c'est une victoire du foot espagnol et de la figure du milieu de terrain », a dit le lauréat.
Le joueur qui chérit par-dessus tout la régularité, comme son modèle absolu Sergio Busquets, du grand Barça, est cette fois pour de bon placé tout en haut, parmi les étoiles.
Rodri avait terminé 5e du Ballon d'or 2023, au bout d'un exercice où il avait déjà été déterminant, auteur notamment du seul but de la finale de Ligue des champions Manchester City-Inter Milan (1-0).
« Quand je me prendrai ma retraite, j'aimerais que les gens puissent se souvenir de moi comme d'un joueur constant dans la qualité », disait-il dans une interview à France Football.
Modèle absolu de joueur d'équipe, toujours au service du collectif, Rodri a reçu une consécration presque toujours réservée aux joueurs offensifs.
Très intelligent
Le Ballon d'or pour lui, « j'espère que ça arrivera, il le mérite, mais peut-être qu'un autre le mérite aussi, disait encore Guardiola. Rodri n'a pas seulement réalisé une saison exceptionnelle mais aussi beaucoup d'autres grandes saisons ».
« Il est très intelligent et sait quand il doit jouer long ou court », ajoutait le mentor de City.
Dès son recrutement en 2019, il disait de Rodri: « nous avons un incroyable milieu de terrain pour la prochaine décennie, ou au moins pour le temps qu'il restera ici ».
Ce Ballon d'or pourrait donner encore plus de poids au syndicaliste Rodri, qui réclamait un allègement du calendrier dingue des matches juste avant de se blesser gravement au genou.
Sa montée sur scène en béquilles, aidé par le Ballon d'or 1995 George Weah, rappelle que Rodri symbolise aussi les cadences infernales au football.
Sa voix avait porté avant le premier match de Ligue des champions de la saison, contre l'Inter Milan.
« Si cela continue comme ça, à un moment, on n'aura pas d'autres choix », disait-il à propos d'une possible grève des joueurs.
Syndicaliste
Le calendrier actuel, « à mon humble avis, c'est trop », a-t-il insisté. « Nous devons prendre soin de nous, nous sommes les personnages principaux de ce sport, ou de ce business, peu importe comment vous l'appelez"».
« C'est une opinion générale parmi les joueurs, ce n'est pas juste l'avis de Rodri"», ajoutait-il.
Jouer chaque saison "60 ou 70 matches, non. Entre 40 et 50 matchs, un joueur peut évoluer au plus haut niveau. Ensuite, vous diminuez car ce n'est pas possible de maintenir son niveau physique", développait Rodri.
Comme une malédiction, cinq jours plus tard il tombait, victime d'une rupture du ligament croisé du genou droit contre Arsenal.
« Rodri va nous manquer. Son physique, sa présence », regrettait Guardiola.
Il va manquer aussi à la sélection, lui qui mettait encore en valeur le collectif, dans les entrailles du stade de Berlin, théâtre de la finale de l'Euro-2024 remporté par la Roja.
« Nous avons montré que nous sommes une équipe, disait-il. Plus qu'une simple sélection nationale, nous avons prouvé que nous étions une équipe. Pendant tout le Championnat d'Europe et aujourd'hui, nous avons fait l'histoire ».
Son sens du tempo, de la récupération et de la passe juste a été préféré aux fulgurances de Vinicius. Mais comme disait Einstein, tout est relatif.
Les dix derniers vainqueurs du Ballon d'or
2024 : Rodri (ESP/Manchester City)
2023 : Lionel Messi (ARG/Paris Saint-Germain)
2022 : Karim Benzema (FRA/Real Madrid)
2021 : Lionel Messi (ARG/FC Barcelone/Paris-Saint-Germain)
2020 : non attribué en raison de la COVID-19
2019 : Lionel Messi (ARG/FC Barcelone)
2018 : Luka Modric (CRO/Real Madrid)
2017 : Cristiano Ronaldo (POR/Real Madrid)
2016 : Cristiano Ronaldo (POR/Real Madrid)
2015 : Lionel Messi (ARG/FC Barcelone)
2014 : Cristiano Ronaldo (POR/Real Madrid)
Aitana Bonmati conserve son Ballon d'or
L'Espagnole Aitana Bonmati conserve son Ballon d'or et entre un peu plus dans la légende du football, de quoi donner du poids à ses engagements.
Avec une Coupe du Monde et trois Ligues des Champions, le palmarès de la jeune femme de Vilanova i la Geltrú, entre Barcelone et Tarragone, est difficile à égaler, en témoignent les nombreuses reconnaissances individuelles qu'elle a reçues au cours des deux dernières années.
Si elle a échoué avec la "Roja" au pied du podium olympique cet été à Paris, Bonmati a conservé la Ligue des champions avec le FC Barcelone, le club où elle a passé la moitié de sa vie, de 13 à 26 ans.
« Je suis extrêmement reconnaissante de recevoir ce deuxième Ballon d'or consécutif », a déclaré lors de la cérémonie la joueuse du Barça rendant longuement hommage à ses coéquipières Caroline Graham Hansen et Salma Paralluelo, deuxièmes et troisièmes.
« Je fais un sport collectif et je suis entourée de joueuses incroyables en club comme en sélection. Sans elles, je ne serai pas la joueuse que je suis aujourd'hui », a ajouté Bonmati.
Son chemin vers les sommets a commencé, comme beaucoup d'autres footballeuses, par du temps de jeu partagé avec les garçons, étant donné le peu de développement du football de base féminin.
Sa confiance en elle face aux meilleures équipes du monde s'est forgée quand, enfant, elle osait des petits-ponts sur les garçons, suscitant des commentaires sexistes de la part de ses jeunes coéquipiers qui ne supportaient pas de se voir dépassés par une fille.
Après avoir rejoint le FC Barcelone à l'âge de 13 ans, il ne lui a fallu que trois saisons pour débuter avec l'équipe première. Une décennie plus tard, elle récupère un deuxième Ballon d'or après deux années au sommet.
« Aussi pour les garçons »
Saluée par une célèbre formule de Pep Guardiola, qui l'avait qualifiée de "version féminine d'Iniesta", Bonmati a toujours rêvé de s'imposer comme "une référence" pour de nombreux garçons et filles au même niveau que ses collègues masculins.
« Quand j'étais petite, il était impossible d'avoir des modèles féminins, c'est pourquoi je dis toujours que mes modèles étaient Xavi, Iniesta, etc... Mais aujourd'hui nous pouvons dire que nous sommes toutes des modèles, donc fier d'en être un, non seulement pour les filles, mais aussi pour les garçons », disait-elle.
« Je pense qu'il est très important pour les garçons d'avoir des modèles féminins lorsqu'ils sont jeunes, car lorsqu'ils grandiront, ils auront une mentalité plus égalitaire », assurait la double Ballon d'Or.
L'égalité entre les hommes et les femmes dans et hors du football est une des causes pour laquelle Aita s'est engagée.
« Il y a un long chemin à parcourir et j'espère qu'avec notre combat nous pourrons également y contribuer à l'avenir », déclarait-elle au syndicat des footballeurs FIFPro en février 2024.
Engagements
Caractère affirmé, Bonmati a aussi affronté sa Fédération. Elle faisait partie des quinze rebelles qui s'opposaient au maintien de Jorge Vilda à la tête de la "Roja". Elles finiront pourtant championnes du monde 2023 avec le même technicien.
Son engagement a pris bien d'autres formes, et son aura dépasse le football, à l'image du prix Laureus de la meilleure athlète féminine 2024, première hispanophone et premier footballeur tous sexes confondus à recevoir cette reconnaissance.
Collaboratrice de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) depuis 2022, elle a par exemple arboré après la finale victorieuse de la Ligue des champions 2023 un t-shirt avec le slogan « Changez d'avis. Accueillez les réfugiés. Sauvez leurs vies ».
Elle avait aussi soutenu sa coéquipière Jenni Hermoso, embrassée de force par l'ancien président de la Fédération espagnole Luis Rubiales: un baiser forcé peu après la victoire en finale de la Coupe du monde féminine 2023 qui avait éclipsé dans les médias l'exploit de la Roja.
En recevant un de ses nombreux prix de meilleure footballeuse, elle avait profité de l'exposition pour dénoncer la situation et continuer à promouvoir l'égalité.
« En tant que société, nous ne devons pas permettre l'abus de pouvoir dans une relation de travail ou le manque de respect », disait-elle. Avec ce second Ballon d'or, sa voix porte plus loin encore.
Les lauréates des six Ballons d'or féminin de l'histoire
2024 : Aitana Bonmati (ESP/FC Barcelone)
2023 : Aitana Bonmati (ESP/FC Barcelone)
2022 : Alexia Putellas (ESP/FC Barcelone)
2021 : Alexia Putellas (ESP/FC Barcelone)
2020 : non attribué en raison de la COVID-19
2019 : Megan Rapinoe (USA/Reign FC)
2018 : Ada Hegerberg (NOR/Olympique lyonnais)